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Lambrecht Laurent

1 – Que reproche-t-on à Apple ? Depuis le début des années nonante, la firme à la pomme jouit d’un traitement fiscal très particulier en Irlande. En 1991, Apple a obtenu un premier « ruling » fiscal, suivi d’un second en 2007. Selon la Commission européenne, ce traitement de faveur a permis à Apple de bénéficier d’un taux d’imposition de ses bénéfices compris entre 1 % en 2003 et 0,005 % en 2014. Ce taux très généreux a été appliqué sur ses bénéfices réalisés dans toute l’Europe, ainsi qu’au Moyen-Orient, en Afrique et en Inde. Selon la Commission européenne, Apple a organisé ses activités de telle manière que ses ventes sont enregistrées en Irlande et non dans les pays où elles ont été physiquement réalisées.

2 – Que contiennent les « rulings » ? Si l’ancien Tigre celtique propose un impôt des sociétés très attractif de 12,5 %, la firme à la pomme ne s’en est pas contentée. Grâce aux « rulings » octroyés par le fisc irlandais, la plupart des bénéfices enregistrés en Irlande ont été affectés à un siège virtuel où l’imposition est inexistante. Selon la Commission européenne, la particularité de ce siège est qu’il est situé dans aucun pays et qu’il ne possède ni locaux ni employés. Pour éclairer le public sur l’impact de cette manœuvre, la Commission européenne a pris comme exemple l’année 2011. Cette année-là, Apple aurait enregistré 16 milliards d’euros de bénéfices via ses filiales irlandaises. Mais grâce à son « ruling » fiscal, seuls 50 millions d’euros ont été imposés en Irlande, contre 15,95 milliards dans le « siège » virtuel non soumis à l’impôt des sociétés. Résultat : Apple aurait payé 10 millions d’euros d’impôt en Irlande sur ses activités européennes en 2011, soit un taux de 0,05 %.

3 – De quand datent les faits ? Le premier « ruling » datant de 1991 a été remplacé par un deuxième « ruling » similaire en 2007. Ce dernier a été supprimé en 2015 lorsqu’Apple a modifié sa structure en Irlande. Comme la Commission ne peut remonter que dix années en arrière par rapport au début de son enquête, Apple ne devra se mettre en ordre qu’à partir de l’année 2003.

4 – Combien Apple doit-elle rembourser ? La Commission européenne exige qu’Apple rembourse à l’Irlande l’avantage indûment perçu augmenté des intérêts. Selon les calculs des équipes de Margrethe Vestager, la firme à la pomme devra donc rembourser 13 milliards d’euros.

5 – L’appel est-il suspensif ? Bien qu’Apple et Dublin ont décidé de faire appel de la décision de la Commission européenne auprès de la Cour de justice de l’Union européenne, le Trésor irlandais devra récupérer les 13 milliards d’euros. La somme sera placée sur un compte en banque en attendant une décision finale dans ce dossier.

6 – D’autres pays pourraient-ils réclamer leur dû ? Selon la Commission européenne, certains pays pourraient réclamer l’impôt qui leur a échappé à la lumière des informations révélées par son enquête. Par exemple, l’Espagne pourrait considérer qu’une partie des bénéfices doit être taxée chez elle étant donné qu’une partie des ventes a été réalisée sur son territoire. Dans ce cas, le montant perçu à l’étranger viendra diminuer la somme due à l’Irlande.

7 – Apple est-il le seul dans le cas ? Apple n’est pas la première entreprise à recevoir une amende dans le cadre des enquêtes de la Commission européenne sur les généreux « rulings » octroyés par des Etats européens. Fiat et Starbucks ont été condamnés à rembourser entre 20 et 30 millions d’euros, respectivement au Luxembourg et aux Pays-Bas. Rappelons que la Belgique a été condamnée à récupérer 700 millions d’euros auprès de 35 multinationales. En outre, les Américains Amazon et McDonald’s sont dans le viseur de Margrethe Vestager en raison de « rulings » potentiellement illégaux obtenus au Luxembourg.