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Christophe Lamfalussy 

Chef de file des Kurdes syriens, Saleh Muslim exhorte les Européens à faire pression sur la Turquie et sur les Kurdes d’Irak pour desserrer l’embargo dans lequel ils se trouvent. L’offensive menée actuellement par l’armée turque dans le nord de la Syrie et les désaccords avec les « frères kurdes » d’Irak, proches d’Ankara, isolent largement les Kurdes syriens, malgré leur rôle important dans les actions militaires contre Daech. « L’invasion turque n’est pas un accident« , a dit jeudi à Bruxelles le coprésident du Parti de l’union démocratique (PYD), le principal parti kurde syrien. « Ils visent le modèle démocratique de Rojava. La Syrie, la Turquie et l’Iran veulent la fin de ce modèle. »Le Rojava est une région autonome du nord de la Syrie où les Kurdes ont mis en place un socialisme autogestionnaire à l’ancienne, multiculturel et ouvert à toutes les religions. Des communautés arabes et syriaques y cohabitent sans difficulté majeure.

Ses détracteurs l’accusent d’être fortement influencé par le PKK (Parti des travailleurs du Kurdistan, turc), avec lequel le PYD entretient des relations idéologiques et militaires. Les avancées des Forces démocratiques syriennes (FDS), dans lesquelles combattent Kurdes, chrétiens et Arabes, ont alarmé Ankara.

Frontière fermée du côté irakien

A plusieurs reprises, le gouvernement turc a averti qu’il ne tolérerait pas que les FDS franchissent l’Euphrate, craignant la création d’une zone à majorité kurde le long de sa frontière. Les FDS l’ont franchi et, fin août, la Turquie a lancé son opération « Bouclier de l’Euphrate ». Ankara assure que son principal objectif est de sécuriser une bande de 90 km à l’intérieur de la Syrie pour en chasser l’Etat islamique.

« Nous ne nous battons pas pour diviser la Syrie. Nous ne sommes pas des séparatistes », insiste Saleh Muslim, qui accuse la Turquie d’avoir instrumentalisé Daech, pour commettre des attentats contre les Kurdes de Turquie. Les Kurdes syriens ont également des problèmes avec les Kurdes d’Irak, proches de la Turquie avec qui ils partagent des intérêts pétroliers et une vision plus conservatrice de la société. Erbil n’ouvre qu’au compte-gouttes sa frontière pour permettre aux commerçants, journalistes ou députés étrangers de se rendre dans le Rojava.

Du coup, le Rojava demande une aide internationale. Il a le soutien militaire des Etats-Unis et la sympathie de la Russie, mais lui manque celui des Européens et, spécialement, de la Haute représentante Federica Mogherini, qu’ils suspectent de ne pas vouloir effaroucher le tumultueux partenaire turc. « Nous devons soutenir les Forces démocratiques syriennes, la force la plus efficace contre Daech. L’invasion turque en Syrie est dès lors une menace sérieuse pour la sécurité en Europe », avance l’eurodéputé Branislav Skripek, qui a invité Saleh Muslim au Parlement européen.

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