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 Le JDD

Devant 500 personnes venues débattre avec lui le soir même dans les Hauts-de-Seine, l’ancien Premier ministre fait rire la salle en se moquant de ce candidat « qui confond fonctionnaires et emplois jeunes. C’est le renouveau… Le renouveau, c’est un peu comme la nouvelle cuisine : on reste sur sa faim ». D’ailleurs, si Fillon a gardé la cravate, lui aussi a laissé tomber depuis longtemps discours écrit et pupitre pour déambuler, détendu, au milieu du public en répondant aux questions. Il plaisante en saluant le très sarkozyste Roger Karoutchi, responsable de la fédération LR locale, « qui [lui] apportera son soutien au second tour ». L’intéressé sourit, tout en faisant non de la tête.

A la veille d’une journée de mobilisation de la Manif pour tous, le candidat confirme son intention de réécrire la loi ­Taubira pour y inscrire « le principe qu’un enfant est toujours le fruit d’un homme et d’une femme » et de « prendre la tête d’un combat européen pour bannir la GPA [gestation pour autrui] ». Bien qu’il ne défile pas aujourd’hui, il sera représenté par Bruno Retailleau et Valérie Boyer et a, dans un communiqué, exprimé sa « sympathie » à l’endroit du mouvement. Il regrette qu’Hervé Mariton, ferrailleur en chef contre le mariage pour tous, ait choisi de rallier Alain Juppé : « Il ne pouvait pas faire des choix plus éloignés de ses convictions. »

En sortant d’une intervention devant l’UNI à l’Assemblée nationale, il tombe nez à nez avec Alain Juppé. Poignée de main rapide ; déjà Fillon s’engouffre dans l’ascenseur. Il vient de railler devant les étudiants « ce candidat qui ne dit rien de peur d’abîmer ses sondages ». En privé, Fillon va encore plus loin : « C’est dangereux. C’était la stratégie de Balladur. »

Fillon y croit plus que jamais. « Ma présence au second tour est une hypothèse tout à fait ­probable. » À l’entendre, le « duopole » ­Sarkozy/Juppé n’existe que dans les médias, et « les sondeurs vont se planter ». Au second tour, il se voit plutôt affronter Alain Juppé. « Le rejet de Nicolas Sarkozy est très puissant », glisse-t-il.

Regrette-t-il sa petite phrase assassine de Sablé-sur-Sarthe fin août – « Qui imagine de Gaulle mis en examen? » –, qui a ulcéré ­Sarkozy et fait des vagues jusque chez ses amis? « Non. Parce que c’est ce que je crois. C’est une ­réalité. » Lui qui met désormais en avant la valeur de « l’honneur » dans ses réunions publiques ­insiste : « Je suis choqué par ­l’absence de jugement moral des élites et du système médiatique sur ce qui se passe. » Non, il n’a pas vu le reportage d’envoyé spécial sur l’affaire Bygmalion. Un silence. « J’ai honte. On est dans un pays un peu sous-développé de ce point de vue-là… »