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L’ancien ministre de l’éducation Benoît Hamon a décidé de passer à l’offensive. Mardi soir, il s’est posé en défenseur de la gauche.

Par Service politique

Benoît Hamon,  le 22 janvier, après l’annonce des résultats du premier tour de la primaire à gauche.

« Dans le débat au sein de la gauche [Manuel Valls] est la droite. » Jusqu’alors sur la défensive face aux attaques répétées de son adversaire dans la primaire de la gauche, Benoît Hamon a décidé, mardi 24 janvier, de contre-attaquer. Sur BFMTV, dans la soirée, le favori du scrutin s’est posé en défenseur de la gauche, avec une partie de laquelle « une forme de malentendu profond » s’est créée, selon lui, avec Manuel Valls.

« A toujours parler d’identité, des socialistes, des hommes de gauche, ont oublié la question sociale et ils en ont payé les conséquences dans toutes élections intermédiaires. »

Le matin, M. Hamon avait déjà appelé, sur RFI, son adversaire et ses soutiens à « un peu de sobriété » après leurs attaques sur ses propositions phare, « encore plus dures » que vis-à-vis de la droite.

Benoît Hamon a notamment défendu le revenu universel, cible des critiques de la plupart de ses adversaires lors du dernier débat. « Je défends un projet politique qui défend un futur désirable. (…) J’observe que cela heurte manifestement Manuel Valls », a-t-il remarqué, avant de lancer : « Heureusement qu’il y a mon programme pour qu’il puisse commenter cette élection ! » Le député des Yvelines a, en outre, estimé que Manuel Valls faisait preuve de « paresse intellectuelle » en critiquant le revenu universel d’existence.

« Je trouve irresponsable de la part d’un ancien premier ministre de parler comme il le fait. Je voudrais savoir ce qu’il propose, lui. »

Benoît Hamon qualifie les propositions de son adversaire de « solutions d’hier », rappelant qu’il n’a pas « l’intention de mettre [son] projet dans [sa] poche ».

« Un marchand de sable »

Manuel Valls a dit de son côté ne pas avoir « d’ennemi dans [sa] famille politique », sur BFMTV, mardi soir, analysant toutefois le deuxième tour de la primaire comme « un résumé de ce quinquennat (…) entre ceux qui ont assumé les responsabilités au gouvernement jusqu’au bout et ceux qui ont critiqué ».

Pour lui, voter pour son adversaire reviendrait tout bonnement à condamner la gauche à perdre le pouvoir.

« Benoît Hamon se réfère à Corbyn ou à Podemos. Ces deux options condamnent la gauche à être dans l’opposition. Si c’est pour rêver dans l’opposition, alors on laisse la droite faire du mal au pays. »

La veille, M. Valls disait déjà sur RTL ne pas vouloir « enfermer la gauche dans l’irréalisme et dans l’illusion ». « Est-ce que la gauche, c’est plus d’impôts, plus de déficits, une conception du travail qui n’est pas celle que je défends, (…) celle des Français ? Un travail qui rémunère qui soit digne, ou est-ce qu’on distribue la même allocation à tous ? », lançait-il à l’adresse de Benoît Hamon, décrit comme « le chantre de la fin du travail », dont le projet découlera sur « la ruine de notre budget ».

Manuel Valls, le 22 janvier, après l’annonce des résultats du premier tour de la primaire à gauche.

Mardi matin, sur France info, l’ex-premier ministre a réitéré ses attaques : « Quand on propose une réforme à 350 milliards d’euros, c’est irréaliste. Quand on bâtit le succès de sa campagne sur cette idée-là, on est un marchand de sable, un marchand d’illusion, parce que ça va créer des désillusions », a-t-il dit, assurant qu’il n’y avait « pas de violence » dans ses propos.

Les deux hommes se sont également vivement opposés sur leur vision de la place de l’islam dans la société. « Je sais quelle vision de la société je défends. Il ne peut pas y avoir un interdit pour les femmes dans les lieux publics », a dit mardi Manuel Valls, qui a dénoncé les « ambiguïtés » de Benoît Hamon à ce sujet.

« Il y a des risques d’accommodements de son côté. Ce débat devra être précisé. Je rappellerai d’abord quelle est ma vision de la laïcité, qui est là pour protéger. Il faut sortir de toutes les ambiguïtés. Il ne peut pas y avoir le moindre compromis avec le communautarisme. »

Réplique immédiate de Benoît Hamon. « On me fait le procès de quoi ? D’être élu de banlieue, d’être confronté à la réalité de ce communautarisme que je combats autrement que par des mots », a-t-il dénoncé mardi. Le député des Yvelines a critiqué la vision de la laïcité de Manuel Valls et ses positions sur l’interdiction du voile à l’université. « Ce n’est pas moi qui ai une version dévoyée de la laïcité. (…) J’observe que c’est le Conseil d’Etat qui a rappelé à Manuel Valls ce qu’est la laïcité en France », a-t-il lancé à l’endroit de son rival, ajoutant : « Moi, j’éviterai d’être sur ce terrain de spectacularisation de la vie publique. »

« On va répondre coup pour coup »

Benoît Hamon sait qu’il jouera gros au débat de l’entre-deux-tours, mercredi 25 janvier. L’ancien ministre de l’éducation nationale s’y prépare attentivement. M. Valls mise tout sur cette confrontation pour tenter de rattraper son retard et décrédibiliser la candidature de son adversaire. « On sait que Valls va tenter de nous attaquer. On va répondre coup pour coup, avec l’intention de faire du second tour un référendum pour ou contre Valls à gauche », prévient-on dans l’équipe de M. Hamon.

Ironisant sur « le théoricien des gauches irréconciliables » qui veut « rassembler la gauche », M. Hamon a affirmé que, quelle que soit l’issue du second tour, il ne « dénigrera » pas M. Valls. « Si Manuel Valls gagne, je ne contesterai pas sa victoire et je m’inscrirai dans le futur scénario de la gauche. »

La position de l’ex-premier ministre n’est pas aussi claire. Manuel Valls, qui promet d’être « offensif » mercredi lors du dernier débat, a refusé de dire s’il soutiendrait son concurrent. « J’attends dimanche, et je mène campagne pour gagner », dit-il, ajoutant : « Je ne réponds pas aux questions avant qu’elles ne se posent. »

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