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François Fillon, Henri Guaino, Metz, Mevlüt Çavusoglu, solidarité européenne
Le chef de la diplomatie turque vient plaider pour l’adoption du projet de révision constitutionnelle renforçant les pouvoirs du président turc. Une visite polémique.
AFP

Alors que le torchon brûle entre Ankara et La Haye, 800 personnes issues de la communauté turque de l’est de la France étaient rassemblées dimanche 12 mars à la mi-journée à Metz, avant un meeting du chef de la diplomatie turque Mevlüt Cavusoglu. La veille, il avait été refoulé des Pays-Bas par les autorités néerlandaises. À l’invitation d’une association locale, l’Union des démocrates turcs européens section Lorraine (UETD), Mevlüt Cavusoglu vient plaider pour l’adoption du projet de révision constitutionnelle renforçant les pouvoirs du président turc. Ce texte sera soumis au référendum le 16 avril. Un millier de personnes au total sont attendues. Dans le public, certains tenaient des drapeaux turcs à la main ou arboraient sur les épaules la bannière rouge et blanc au croissant et à l’étoile.
Polémique
Mais cette présence suscite une vive polémique en France. François Fillon a accusé François Hollande de rompre « de manière flagrante la solidarité européenne ». « Il est évident qu’une position commune aurait dû prévaloir pour gérer les demandes turques. Le gouvernement français aurait dû empêcher la tenue de ce meeting », écrit le candidat de la droite à la présidentielle dans un communiqué.
Henri Guaino (LR), candidat à l’élection présidentielle, a estimé que la France n’aurait pas dû autoriser le ministre turc des Affaires étrangères à participer à ce meeting. Sur BFM TV, il a affirmé que le chef de l’État turc était « dangereux pour la démocratie et la paix dans le monde ». « Quand un chef d’État, un ministre, se déplace dans un pays, il est normal qu’il aille voir la communauté » originaire de son pays, a estimé le député Les Républicains. « En revanche, je trouve tout à fait anormal qu’un ministre étranger ès qualités vienne faire une campagne politique dans un autre pays auprès de ses concitoyens », a-t-il poursuivi.
« Si l’Europe voulait signifier une forme de solidarité entre les différents pays européens, ce serait bien que la France soutienne les Pays-Bas ou l’Allemagne qui se font traiter de nazis », a déclaré Henri Guaino. Et de poursuivre : « La solidarité européenne voudrait que tous les pays européens, à commencer par la France, élèvent une protestation scandalisée auprès du gouvernement turc. Ne serait-ce que pour cela, la France n’aurait pas dû accepter que le ministre des Affaires étrangères turc vienne tenir cette réunion », a-t-il déclaré.
Une « attitude sereine »
Ce rassemblement, prévu depuis plusieurs semaines, suscite un intérêt médiatique inattendu depuis samedi avec la crise qui secoue les relations diplomatiques entre Ankara et La Haye. « L’événement a pris une autre dimension depuis hier, depuis ce qui se passe en Hollande », a commenté Saban Kiper, vice-président d’une fédération associative turque, le Conseil pour l’égalité, la justice et la paix (Cojep). « La France a adopté une attitude plus sereine que les Pays-Bas, dans un cadre démocratique », s’est-il réjoui, disant être venu assister à la « rencontre d’un ministre qui vient voir des expatriés. »
La communauté turque en France est forte d’environ 700 000 personnes, dont 160 000 dans le Grand Est. Soixante-dix mille sont inscrites sur les listes électorales, dont 60 % font traditionnellement usage de leur droit de vote. « C’est un meeting politique. Nous sommes en campagne électorale en France », a affirmé Saban Kiper. « Tout ce qui se passe dans un cadre démocratique, qui ne présente pas de menace de trouble à l’ordre public, est autorisé. Je ne vois pas pourquoi on interdirait ce genre de meetings », a-t-il dit.
Empêché samedi matin d’atterrir aux Pays-Bas, Mevlüt Cavusoglu a finalement atterri samedi dans la soirée à Metz. Il devait également participer dimanche à un rassemblement à Zurich, mais la rencontre a été annulée.