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Hla-Hla Htay – Agence France-Presse à Naypyidaw
Richard Sargent – Agence France-Presse
Le secrétaire d’État américain, Rex Tillerson, aux côtés de la dirigeante Aung San Suu Kyi
Photo: Aung Htet Agence France-Presse Le secrétaire d’État américain, Rex Tillerson, aux côtés de la dirigeante Aung San Suu Kyi

Aux côtés de la dirigeante Aung San Suu Kyi, le secrétaire d’État américain, Rex Tillerson, s’est dit opposé mercredi à des sanctions contre le Myanmar, mais a réclamé une enquête « crédible » sur les accusations de nettoyage ethnique des musulmans rohingyas par l’armée.

Depuis fin août, le Myanmar est dans la tourmente, accusé par les Nations unies d’« épuration ethnique » de cette minorité qui vit dans l’ouest du pays.Prix Nobel de la paix, Aung San Suu Kyi s’est défendue pour sa part d’« être restée silencieuse » sur ce drame alors qu’elle est critiquée sur la scène internationale pour son manque d’empathie envers cette minorité persécutée.

En réponse à des attaques perpétrées par la rébellion rohingya, l’armée mène dans l’État Rakhine (ouest) une campagne de représailles.Les plus de 600 000 réfugiés partis depuis fin août au Bangladesh, dont la moitié sont des enfants, ont témoigné d’exactions, de viols ou de meurtres de la part des soldats myanmarais.

Depuis, certains pays et les organisations de défense des droits de la personne ont appelé à imposer de nouvelles sanctions au Myanmar, qui a longtemps été isolé sur la scène internationale en réponse à la dictature militaire.« Des sanctions économiques globales ne sont pas quelque chose que je recommanderais pour l’heure », a expliqué le secrétaire d’État américain après ses rencontres, séparées, avec la dirigeante Aung San Suu Kyi et le chef de l’armée du Myanmar.

Jusqu’ici, les États-Unis, comme d’autres pays occidentaux, ont seulement renforcé quelques mesures punitives contre l’armée.Tillerson inquiet

Se disant « inquiet des informations crédibles d’atrocités commises à grande échelle par l’armée et des milices », il a appelé à la mise en place d’une commission d’enquête indépendante qui « serait utile à tout le monde ». Des milices bouddhistes ultranationalistes sont accusées de seconder l’armée dans ses exactions.Les Rohingyas représentent la plus grande population apatride du monde depuis que la nationalité myanmaraise leur a été retirée en 1982, sous le régime militaire.

Victimes de discrimination, ils n’ont pas de papiers d’identité, ne peuvent pas voyager ou se marier sans autorisation. Et ils n’ont accès ni au marché du travail ni aux services publics comme les écoles et les hôpitaux.« Les récentes et sérieuses accusations d’abus en État Rakhine exigent une enquête impartiale et crédible. Et ceux qui commettent des violations des droits de la personne doivent rendre des comptes », a affirmé M. Tillerson.

L’armée, qui affirme avoir mené sa propre enquête interne, a rejeté les accusations d’exactions.Soucieux de préserver le gouvernement civil, Rex Tillerson a réitéré le soutien des États-Unis à la dirigeante myanmaraise, qui, a-t-il ajouté, doit faire face à une « situation qui n’est pas simple ».

Face à lui, Aung San Suu Kyi, qui n’a cessé depuis le début de la crise de demander du temps pour gérer un dossier très complexe, a loué « l’ouverture d’esprit » de Tillerson, « une chose très rare de nos jours ».Les États-Unis, comme la majorité des pays occidentaux, tentent de préserver un équilibre qui complique leur action. Depuis le début de la crise, ils prennent soin de ne pas blâmer Aung San Suu Kyi, faisant la distinction entre le gouvernement civil de la lauréate du prix Nobel de la paix et les militaires.

Arrivée au pouvoir après un triomphe lors des premières élections libres depuis des décennies, la dirigeante doit composer avec une armée qui est à la manoeuvre sur le terrain et sur laquelle elle n’a pas réellement de pouvoir et une opinion publique largement xénophobe et antimusulmane.