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ntretien de Jean-Pierre Chevènement au Monde, propos recueillis par Gaïdz Minassian et Frédéric Lemaître,
Aujourd’hui, les nationalistes appellent à manifester dans la rue à l’occasion de la venue du président de la République en Corse. Cet appel, particulièrement déplacé eu égard aux circonstances, est révélateur d’une méthode qui, depuis le début, c’est-à-dire depuis la fin des années 1970, n’a pas changé : exercer la pression maximale sur les autorités de la République pour les amener à reculer.
Que vous inspire la victoire des nationalistes en décembre 2017 et comment jugez-vous leur attitude depuis lors ?
Je ne vois pas l’utilité d’introduire une référence à la Corse dans la Constitution. Ou alors, pourquoi pas pour le Territoire de Belfort ?
Le français est la langue de la République. La co-officialité du français et du corse fournirait un prétexte à la « corsisation » des emplois. Elle serait le début d’un engrenage infernal. A travers un droit à deux vitesses, l’adoption d’un statut de « résident » aboutirait à fracturer la citoyenneté française. L’octroi d’un tel statut conduirait à reconnaître, sur le modèle néo-calédonien, l’existence d’un « peuple premier ». Ce serait ouvrir la voie à la décomposition par scissiparité de l’unité française.
En matière de « girondinisme », je ne suis pas, à vrai dire, un expert, bien que j’aie apporté ma pierre à l’édifice de la décentralisation républicaine, s’agissant de la régionalisation des lycées, de la départementalisation des collèges et de l’intercommunalité. Je n’ai pas à me substituer au président de la République dans la définition de ses orientations, mais, en ce qui concerne l’aménagement du territoire, on peut toujours trouver un peu de grain à moudre.
La commémoration de l’assassinat du préfet Erignac peut-elle être l’occasion de dépasser certains antagonismes ?
Peut-on établir un parallèle entre la situation en Corse et celle en Catalogne ?
Il y a cependant une grande différence entre la Catalogne et la Corse : la Catalogne paye des impôts à Madrid. En Corse, c’est l’inverse : les transferts nets de Paris vers la Corse dépassent 2 milliards d’euros par an.