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Guillaume Bigot est membre des Orwéliens, essayiste, et est aussi le Directeur Général de l’IPAG Business School
Une phrase de Laurent Wauquiez, dans l’enregistrement de ses propos à Lyon, est passée inaperçue. Elle est pourtant la plus lourde de sens : « Je ne suis pas un adepte de la théorie du complot mais je pense qu’il est assez vraisemblable que, dans les 3 à 4 ans, ça va péter très très mal et très très dur. »

Les « off » de Wauquiez ont donné lieu à une avalanche de commentaires, offusqués pour les uns, goguenards pour les autres. Certains se sont félicités de cet accès involontaire de « parler vrai » tandis que d’autres ont joué les vierges effarouchées, en volant au secours des personnalités calomniées et des médias accusés d’édulcorer les discours.
Personne ne semble s’être rendu compte, qu’au milieu de propos vulgaires mais somme toute assez banals, le président des Républicains lâchait une bombe.
Reconnaître à Angela Merkel le charisme d’une retraitée est-allemande en birkenchtoc, peindre Trudeau comme le « Oui Oui » du mainstream ou rappeler que les députés d’En Marche semblent politiquement aussi consistants que les Anges de la télé-réalité n’est transgressif que dans la forme.
Dans le fond, Wauquiez ne nous apprend rien que l’on ne sache déjà sinon qu’il est capable d’être grossier, méprisant et terriblement… naïf.
Wauquiez qui dénonce le double langage, c’est Tartuffe qui peste contre l’hypocrisie tant ce dernier semble, en général, parfaitement à l’aise dans cette gluante matière qu’il appelle lui-même le « bullshit » médiatique. Notre Trump malgré lui n’aurait rien dit de très politique s’il n’avait déposé devant nous sa lettre volée. Personne ne l’a remarqué. Personne n’a songer à la décacheter. Pourtant, son contenu est stupéfiant
Au milieu du déballage de ce misérable tas de petits secrets de polichinelles, le professeur vacataire de l’EM Lyon a tenu des propos qui auraient dû nous alarmer : « Je ne suis pas un adepte de la théorie du complot mais je pense qu’il est assez vraisemblable que, dans les 3 à 4 ans, ça va péter très très mal et très très dur. » Passons sur la grammaire de Youtubeur de cet agrégé d’Histoire, de telles déclarations, dans la bouche d’un chef de parti, devrait nous faire sinon frémir, du moins réagir.
Ils sont d’autant moins anodins qu’ils font écho aux prophéties de l’ex patron de la DGSI, Patrick Calvar, qui déclarait, en juin 2016, devant les parlementaires de la Commission d’enquête des attentats du 13 novembre : « Nous sommes au bord de la guerre civile. »
Que le plus pur produit de la nomenclature française redoute des troubles très graves et que l’ordre public puisse sinon céder demain, du moins être gravement mis à mal par des attentats, voilà qui n’a rien d’anodin.
« Ça va péter » : En vendant la mèche, Waquiez aurait dû mettre le feu aux poudres. D’ailleurs, interrogé par Ruth Elkrief, le principal intéressé s’est dit surpris que ces propos alarmistes ne suscitent aucune interrogation.
La France va péter mais encore. Qu’a donc voulu dire exactement Laurent Waquiez ? Anticipe-t-il seulement des attentats ou bien également des réactions incontrôlées et incontrôlables à ces attaques ? Craint-il des affrontements entre communautés ? On n’en saura pas plus tant les commentateurs obnubilés par l’accessoire manque l’essentiel. Tant les acteurs d’une époque de buzz ignorent les trends. Wauquiez dit aux Gaulois que le ciel va leur tomber sur la tête et ces derniers s’intéressent au temps qu’il va faire ce week-end.
La querelle sur le sexe des anges à la veille de la chute de Constantinople, Louis XVI notant « rien » dans son journal de bord au retour d’une chasse infructueuse le 14 juillet 1789, les événements les plus fracassants de l’histoire arrivent toujours à bas bruit. Surtout pour ceux qui se bouchent les oreilles.