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C’est la première fois qu’un membre de la famille royale anglaise se rend en Israël et dans les Territoires palestiniens occupés.
Nicolas Gauthier
Journaliste, écrivain

C’est la première fois qu’un membre de la famille royale anglaise se rend en Israël et dans les Territoires palestiniens occupés. Une première qui devrait faire date, mais pour des raisons ne devant rien au calendrier. Ainsi, le jeune prince William s’est-il fait un malin plaisir de sortir de la traditionnelle réserve qu’impose son statut quand, à l’occasion d’une rencontre officielle à Ramallah avec le président Mahmoud Abbas, il affirme tout sourire : « Merci de m’accueillir. Je suis très heureux d’une collaboration aussi étroite entre nos deux pays et des succès enregistrés dans les domaines de l’éducation et de l’humanitaire. » Mahmoud Abbas a bu du petit lait ; et Benyamin Netanyahou de la soupe à la grimace.

En effet, tel que noté par nos confrères d’Europe 1 : « Les diplomates occidentaux se gardent généralement de se référer aux “Territoires palestiniens” comme à un “État” ou à un “pays”… » L’information est passée à peu près inaperçue dans les grands médias ; mais pas dans d’autres cercles donnés pour être plus proches du pouvoir.

Du côté de Tel Aviv, on minimise, avec tweets réduits au strict minimum syndical. De celui de la droite locale, on maximalise : que le prince William considère que Jérusalem-Est puisse faire partie de ces mêmes « Territoires occupés », voilà qui la change désagréablement du sionisme autant incendiaire qu’ébouriffé de leur ami Donald Trump, avec tweets plus ou moins indignés. Au 10 Downing Street, on temporise : « Le gouvernement britannique soutient la création d’un État palestinien souverain, indépendant et viable, coexistant avec Israël dans la paix et la sécurité. » C’est de l’understatement ; mais ça veut aussi dire ce que cela signifie, et comprenne qui pourra. Bref, le prince est le prince et, vu de Buckingham Palace, on ne touche pas au prince.

De manière moins anecdotique, ces propos tombent à point nommé. L’hystérie médiatique est aux « migrants ». Au début, des « réfugiés de guerre ». Mais combien de Syriens ou de Libyens dans ces barcasses cogérées par les mafieux et les ONG ? Pas l’ombre d’un, étant emplies à ras bord d’immigrés clandestins issus d’une Afrique noire dont les pays ne sont pas tous en guerre, loin s’en faut. En revanche, en Palestine occupée, le décompte est cruel et ne participe pas des mêmes élégances humanistes : treize mille blessés par balles et près de cent-quarante morts.

Des terroristes ? Non. Leur crime ? Défiler pour le retour d’autres « migrants », chassés de leur terre natale depuis maintenant près d’un siècle. Et aussi demander que cesse le blocus de la bande de Gaza, plus forte concentration démographique au monde, condamnée à la misère, au désespoir ; et, de fait, à des actions violentes pas toujours des plus efficaces.

Les roquettes envoyées par le Hamas n’ont tué personne depuis des décennies. Les cerfs-volants envoyés par les jeunes Gazaouis n’ont, pour le moment, brûlé que quelques récoltes. Les quelques jeunes désespérés ayant poignardé des badauds israéliens n’auront pour seul mausolée que la page des faits divers. Il n’empêche que les tombereaux de cadavres palestiniens demeurent quantité négligeable, alors que le moindre enfant échoué sur une plage européenne ou que le tag le plus grotesque, peinturluré dans le Marais parisien font, eux, les unes des gazettes.

Voilà qui devrait faire honte à la fois à la droite et à la gauche. La première ne comprenant pas que la résistance palestinienne est d’essence nationaliste ; la seconde la négligeant pour de semblables raisons.

En attendant, le jeune prince n’a pas démérité.

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