Par Éric Verhaeghe
On peut parier qu’Emmanuel Macron se serait volontiers passé de la démission de Nicolas Hulot pour sa rentrée politique. Après la succession d’affaires cet été, puis des annonces budgétaires impopulaires (notamment du fait de leur manque de vision), le départ fracassant, plein de panache, d’un ministre emblématique de ce que le macronisme pouvait apporter n’arrange pas la popote de l’exécutif.
Un an, le temps d’un désenchantement
En écoutant les propos tenus par Nicolas Hulot ce matin, forcément, on se dit que les espérances nourries par la candidature Macron auprès de certains électeurs n’étaient que des illusions. Le mythe d’un homme nouveau capable de changer le « logiciel politique », selon une expression douteuse, a vécu.
On peut penser qu’Hulot a tort, qu’il aurait dû faire autrement. Il n’en demeure pas moins que sa déception face à la lenteur du Président de la République et face à sa manière « à l’ancienne » de gouverner, conforteront beaucoup de Français dans le sentiment qu’Emmanuel Macron les a trompés sur sa véritable nature.
C’est ce qu’on appelle le désenchantement.
Critique de la méthode des petits pas
La principale raison invoquée par Nicolas Hulot pour quitter le gouvernement tient à la lenteur des réformes, et au manque d’enthousiasme et de vision avec laquelle l’exécutif intègre l’écologie. Hulot n’accuse pas Emmanuel Macron d’être contre l’écologie. Il lui reproche juste de ne pas aller assez vite, et même d’aller beaucoup trop lentement.
C’est un constat qu’on pouvait dresser (et l’auteur de ces lignes n’a pas manqué de le faire) dès l’automne 2017, où le premier budget préparé par le gouvernement Philippe témoignait d’une frilosité et d’un manque d’imagination qui ne se sont guère améliorés depuis. À l’époque, il était de bon ton, dans les salons parisiens, de stigmatiser les mises en garde sur le décalage entre les postures de rupture et de renouvellement, et la réalité politique d’un hollandisme un peu dopé, mais fondamentalement tiède.
Un an plus tard, la mollesse du macronisme, habilement dissimulée par une rhétorique qui ne pouvait pas faire éternellement illusion, apparaît au grand jour.
Hulot et la théorie du choc
Hulot a dit avec une sincérité qui l’honore sa volonté de voir l’univers politique français rompre avec ses vieux démons productivistes et entrer dans une vision alternative. Cette proposition mérite d’être entendue, car il ne plaide ni pour une rupture avec le marché, ni pour des choix utopistes à la Maduro. Il demande juste que ce qui est possible immédiatement pour inverser la courbe d’un développement nocif soit entrepris au lieu d’être remis à plus tard.
Ce qu’il demande, au fond, c’est un choc idéologique et une action politique qui en découle. Beaucoup, parmi ceux qui ont voté Macron, attendaient cela et découvrent aujourd’hui que Macron n’est pas l’homme du choc. Il est l’homme de la continuité améliorée, celle qui brasse beaucoup d’air avec une infinité de lois dont la portée est faible. On occupe le terrain de la communication, on travaille beaucoup, mais d’un travail qui occupe sans être une action concrète.