
« Une fausse bonne idée » a résumé Dany le vert, en commentant sa décision de ne pas rejoindre le gouvernement au poste de ministre de l’Écologie après la démission de Nicolas Hulot. Même s’il « aime beaucoup » le chef de l’État et qu’il « veut l’aider », même si, « pour la première fois de sa vie », il s’est dit « pourquoi pas », il a décliné l’offre, en commun accord avec le président de la République.
Il a eu raison. Une fois ministre, il lui aurait fallu renoncer à sa liberté d’expression, se battre contre les lourdeurs de l’appareil d’État qui méprise les électrons libres, faire des compromis permanents avec Bercy et avec le ministère de l’Agriculture et, pour finir, accepter les sinuosités d’un Emmanuel Macron qui aime bien l’écologie… mais ne veut pas froisser les chasseurs.
Sans compter une absurde affaire de mezzanine ou autre procès en immoralité qui n’aurait pas manqué de le frapper tôt ou tard. Se payer Dany le rouge, l’icône de mai 68 reconverti au macronisme libéral : Médiapart ou Le Canard enchaîné auraient adoré ! Il ne faut pas s’étonner que la vie politique attire de moins en moins les personnalités de talent et de conviction qui sont systématiquement scrutées et souvent broyées par le système de surveillance médiatico-judiciaire. Parfois à juste titre, mais pas toujours. Daniel Cohn-Bendit aurait peut-être eu le courage et le caractère qui manquaient à Nicolas Hulot pour se faire entendre. Contrairement à lui, il serait sûrement parti sur un vrai coup de gueule… mais il serait parti tôt ou tard. Alors oui, c’était une fausse bonne idée. Ce n’est pas la seule de cette rentrée.
Le retrait de la réforme sur le prélèvement à la source
La fiscalité française est l’une des plus obscures et complexes au monde, nul n’en disconviendra. La simplifier en commençant par le prélèvement à la source n’était peut-être pas la priorité. Mais les atermoiements du chef de l’État qui n’exclut pas un retrait de la réforme, si tous les voyants ne sont pas au vert, sont absurdes. La note de la Direction Générale des Finances publiques, révélée par Le Parisien aujourd’hui en France, décrit un nombre impressionnant de bugs lors du rodage (notamment ceux liés aux homonymes).
Mais tous ces dysfonctionnements ne sont pas irréparables ni insurmontables. La crainte cachée de l’exécutif, dit-on, serait l’effet psychologique négatif que produirait une feuille de paie net d’impôt, sur laquelle les réformes destinées à redonner du pouvoir d’achat aux salariés passeraient inaperçues. Mais cet effet psychologique serait tout aussi douloureux un an après. Et la répercussion politique serait pire pour Macron en troisième année de quinquennat.
Macron perd des points quand il est arrogant. Quand il stigmatise les « Gaulois réfractaires ». Quand il est ivre de lui et méprisant. Mais son camp continuera de le soutenir s’il avance sur ses réformes. On peut contester son programme. Mais il est en phase avec ses promesses électorales. Même avec des couacs, le prélèvement à la source reste une bonne idée et les couacs ne durent qu’un temps… S’il décidait de retirer cette réforme, Macron pourrait passer pour un président pragmatique qui ne s’entête pas dans une mauvaise décision. Mais cette reculade pourrait surtout le faire passer pour un indécis, un président impréparé qui ne tient plus la barre.
La nomination de Philippe Besson
Confier à l’écrivain qui a publié Un personnage de roman (Julliard, septembre 2017), livre hagiographique à l’égard d’Emmanuel Macron, le poste de consul de France à Los Angeles, est aussi une mauvaise idée. Une décision bête et inutile. Si loin de la distance jupitérienne revendiquée par le président de la République.
« Il n’y a chez moi aucun copinage pour service rendu », a déclaré Emmanuel Macron lors de son déplacement en Finlande le 30 août 2018. La nomination de Philippe Besson, ami intime du couple présidentiel, a pourtant été rendue possible grâce à un décret sur-mesure du 3 août dernier, qui ouvre une série de postes de consul, dont celui très convoité de Los Angeles, à des personnalités non diplomates de métier. Certes des précédents existent. Mais justement. Macron avait juré d’en finir avec les pratiques d’Ancien Régime. Comment croire encore au nouveau monde promis par le chef de l’État, où le fait du prince devait définitivement disparaître ?
Jupiter vacille-t-il sur son socle ? Déjà les médias qui l’encensaient commencent leur travail de sape et s’attaquent à la démolition de la statue. Mais si Macron trébuche et tâtonne, il est loin d’avoir mordu la poussière comme le voudraient ses opposants. Son talon d’Achille c’est son style. Il confond l’autorité avec la toute-puissance. C’est ballot. Et c’est dangereux pour lui. Bien plus que les couacs éventuels d’un futur prélèvement à la source.