Le ministre saoudien des Affaires étrangères, Adel Al-Jubeir. Photo : Reuters/Faisal Nasser
Le ministre saoudien des Affaires étrangères, Adel Al-Jubeir, affirme que son pays est ouvert à la critique sur la question des droits humains, mais pas aux « sermons », accusant Ottawa d’être allé trop loin.
Un texte de Rania Massoud
C’est dans le cadre d’une conférence organisée par le Conseil des relations étrangères à New York qu’Adel Al-Jubeir a fait ces déclarations.
La relation entre le royaume wahhabite et le gouvernement de Justin Trudeau est à un creux depuis l’épisode explosif de l’été dernier au cours duquel le Canada a critiqué les arrestations en Arabie saoudite de militants des droits de la personne.
« C’est scandaleux, de notre point de vue, qu’un pays nous sermonne de la sorte, en faisant des demandes », a affirmé le chef de la diplomatie saoudienne, en référence au tweet envoyé par Ottawa réclamant la libération de Samar Badawi, la sœur du célèbre détenu Raïf Badawi qui croupit également dans une geôle saoudienne, le 2 août dernier.
« Vous demandez la « libération immédiate »? Vraiment ? », a-t-il dit. « Dans ce cas, nous demandons alors l’indépendance immédiate du Québec, et l’égalité des droits aux Autochtones canadiens », a-t-il ajouté.
Vous pouvez nous critiquer au sujet des droits humains et des droits des femmes. Les États-Unis le font, le parlement britannique le fait aussi, tout comme les Européens, les Français, les Allemands, et d’autres pays. C’est leur droit de le faire. […] Mais appeler à la libération immédiate? Nous ne sommes pas une république bananière!
Le responsable saoudien affirme, par ailleurs, que par son geste, Ottawa « joue le jeu des extrémistes qui s’opposent à notre processus de réformes ». « Vous êtes responsables de cette situation, a-t-il lancé aux autorités canadiennes. Corrigez-la. Vous nous devez une excuse. »
Il a également affirmé que le Canada était au courant de la « nature » de ces arrestations. « Le procureur général saoudien s’est entretenu avec l’ambassadeur du Canada et lui a expliqué que ce n’était pas une question de droits de la personne, mais de « sécurité nationale ». « Ces individus sont accusés d’espionnage et d’avoir touché de l’argent de gouvernements étrangers hostiles, a-t-il assuré. Certains ont été relâchés, d’autres seront jugés en cour et les preuves seront alors présentées. »
Le ministre saoudien a ensuite affirmé que son pays n’est pas un « ballon politique ». « Trouvez-vous une autre balle pour jouer, mais pas l’Arabie saoudite, a-t-il dit, justifiant la réaction « forte » de Riyad.
Mais la crise pourrait être « facilement réglée », selon lui. « Ils n’ont qu’à présenter des excuses, et dire qu’ils ont commis une erreur. »
Depuis le début des tensions en août, l’Arabie saoudite a ordonné à des milliers d’étudiants saoudiens fréquentant des universités canadiennes de se réinstaller dans d’autres pays. Les vols saoudiens vers le Canada ont été suspendus et Riyad a ordonné aux courtiers et banquiers d’interrompre leurs transactions avec des entités canadiennes.
Le royaume avait également expulsé l’ambassadeur canadien, lui intimant l’ordre de quitter le sol saoudien dans les 48 heures. L’ambassadeur canadien n’est toujours pas retourné en sol saoudien.