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Emmanuelle Wargon, la nouvelle secrétaire d’Etat à l’Écologie, a d’abord côtoyé Edouard Philippe, puis un intime d’Emmanuel Macron, avant d’atterrir chez Danone pour faire du lobbying. Comme son père, elle a travaillé pour la gauche et pour la droite. Un profil rêvé en Macronie !
Sa nomination au gouvernement est passée inaperçue. Il est vrai que son nom était resté jusqu’à présent surtout cantonné aux pages saumon du Figaro. Emmanuelle Wargon, nouvelle secrétaire d’Etat à la Transition écologique, a pourtant un CV qui attire l’attention, particulièrement sa ligne la plus récente : depuis 2015, cette énarque de 47 ans est directrice générale des affaires publiques et de la communication de Danone. Vous avez bien compris : moins de deux mois après la démission de Nicolas Hulot pour protester contre l’emprise des lobbies, Emmanuel Macron a nommé la lobbyiste en chef d’un groupe du CAC 40 dans le même ministère. Osé.
Depuis le début du quinquennat, Emmanuelle Wargon s’est démenée pour influencer de nombreuses lois. Pas moins de 11 sur les six derniers mois de 2017, à en croire la déclaration d’intérêts remplie par Danone auprès de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP). Elle a notamment démarché le ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation – alors Stéphane Travert –, et son cabinet, « dans un objectif de conviction ». Il est vrai que les objectifs de Danone sont la plupart du temps en phase avec le ministère de l’Ecologie. Mais pas toujours. En 2016, les journalistes Karl Laske et Elsa Catalegno ont, dans leur ouvrage les Cartels du lait, montré comment Danone approuvait, au sein de l’Association nationale des industries alimentaires (Ania), le lobby des géants de l’agroalimentaire, une stratégie d’empêchement de certaines réformes.
Parmi elles, l’interdiction de la publicité pour les produits gras et sucrés, envisagée par Nicolas Hulot… et finalement abandonnée. Selon la HATVP, Danone a consacré entre 200 000 € et 300 000 € au lobbying auprès des décideurs publics sur les six derniers mois de 2017, soit environ 40 000 € par mois. Le parcours d’Emmanuelle Wargon la prédisposait à exercer de grandes responsabilités sous ce quinquennat. Camarade de promotion du Premier ministre, Edouard Philippe, à l’ENA entre 1994 et 1996, ils ont fini dans la « botte » : lui au Conseil d’Etat, elle à la Cour des comptes. La haut fonctionnaire a ensuite croisé le chemin du directeur de l’Institut Montaigne, Laurent Bigorgne, ami et compagnon de longue date d’Emmanuel Macron, qu’il a aidé à fonder En marche.
Lui préside l’association Le choix de l’école, qui propose à des jeunes diplômés de grandes écoles d’enseigner dans une banlieue difficile. Elle en est la vice-présidente et la trésorière. Difficile de la situer politiquement : la fille de Lionel Stoléru, secrétaire d’Etat de Valéry Giscard d’Estaing puis de François Mitterrand, a travaillé en cabinet ministériel aussi bien sous Jospin (avec Bernard Kouchner), que sous Sarkozy (avec Martin Hirsch).
Elle renforcera le petit bataillon d’ex-lobbyistes au gouvernement. Le Premier ministre Edouard Philippe a lui même embrassé cette profession à Areva entre 2007 et 2010, comme le porte-parole du gouvernement Benjamin Griveaux pour le géant de l’immobilier Unibail Rodamco (2014-2016).
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