Étiquettes

, , , , ,

Le rejet par le Parlement britannique du plan initial d’accord sur le Brexit force les pays voisins à s’adapter sur les aspects économique, sécuritaire et même environnemental.
Photo: Adrian Dennis Agence France-Presse Le rejet par le Parlement britannique du plan initial d’accord sur le Brexit force les pays voisins à s’adapter sur les aspects économique, sécuritaire et même environnemental.

 

Le rejet mardi de l’accord de retrait par le Parlement britannique, qui a avivé les craintes d’un Brexit sans accord, a poussé plusieurs États membres à accélérer leurs préparatifs aux changements provoqués par le départ du Royaume-Uni prévu le 29 mars.

La Commission européenne, qui presse en outre les États membres à prendre leurs propres mesures au niveau national, a déjà publié 88 notes sectorielles afin de préparer l’Union à un scénario sans accord.

Elles concernent notamment les droits des citoyens, les marchés financiers, le trafic aérien, les douanes ou encore le marché du carbone, qui permet de réglementer les émissions de CO2.

L’exécutif européen a annoncé après le vote britannique qu’il allait envoyer une équipe dans les 27 capitales européennes pour coordonner ses travaux et ceux des États membres. « On ne laisse rien au hasard », a assuré un porte-parole de la Commission.

Irlande

Le voisin du Royaume-Uni, avec qui il partage une frontière terrestre, est le plus exposé. L’Irlande a lancé l’embauche de 1000 employés pour les contrôles douaniers et sanitaires.

Dans son budget pour 2019, Dublin a mis 1,5 milliard d’euros de côté pour amortir toute onde de choc liée au divorce avec le Royaume-Uni.

Une loi spéciale pour contrer les effets d’un « no deal » doit passer devant le Parlement irlandais en mars. Elle se concentrera sur « la protection des citoyens et le soutien à l’économie, aux entreprises et à l’emploi ».

Les ports et aéroports font l’objet de mesures spéciales. Ainsi, le port de Dublin a déjà entamé des travaux pour ajouter des quais réservés aux inspections, des places de stationnement pour les camions et des postes de contrôle pour le bétail.

France

La France a déclenché jeudi son plan « lié à un Brexit sans accord », qui comprend une série de mesures législatives et juridiques. Il s’agit notamment de réglementer le statut des 200 000 Britanniques vivant en France, qui auront 12 mois pour régulariser leur situation, « sous réserve de réciprocité » de la part du Royaume-Uni.

Une autre ordonnance permettra la réalisation « en urgence » d’infrastructures nécessaires pour assurer les contrôles aux frontières dès le 29 mars.

Paris a également souligné qu’il travaillait activement avec la Commission européenne pour trouver un accord sur la pêche afin de pouvoir rassurer les pêcheurs qui jettent leurs filets dans les eaux britanniques, très poissonneuses.

Pays-Bas

Les Pays-Bas sont très exposés en cas de Brexit sans accord, notamment par leurs liens commerciaux via Rotterdam, le plus grand port d’Europe. La Haye a déjà mis 100 millions d’euros de côté pour ses préparatifs, y compris le recrutement de 900 nouveaux douaniers.

Le gouvernement néerlandais a annoncé que les quelque 45 000 citoyens britanniques et leurs familles vivant actuellement dans le pays conserveraient leur droit d’y vivre et d’y travailler, y compris en cas de no deal, bénéficiant d’une période de 15 mois pour demander un permis de séjour.

Belgique

Quelques heures après le vote du Parlement britannique, le premier ministre belge, Charles Michel, assurait que son gouvernement était prêt à soumettre « les textes nécessaires » au Conseil des ministres.

La Belgique, très exposée — elle estime qu’un scénario no deal coûterait annuellement 2,2 milliards d’euros en taxes supplémentaires et plus de 40 000 emplois au pays —, accorde une attention particulière à ses douanes et à ses entreprises. Le pays prévoit par ailleurs de solliciter des fonds européens pour soutenir les entreprises et les régions les plus vulnérables en cas de Brexit dur.

Espagne

Le gouvernement espagnol prévoit d’adopter en février un plan de mesures destinées à faire face aux conséquences d’une absence d’accord, centré sur « les droits des citoyens, les relations commerciales et les secteurs économiques particulièrement sensibles ».

Madrid a évoqué un renforcement des effectifs en matière de contrôles douaniers et l’idée d’un « chèque Brexit » afin d’aider les entreprises.

Le pays continue ses préparatifs pour sécuriser le statut des 20 000 à 30 000 Britanniques vivant au pays.

Les discussions entre May et l’opposition coincent avant d’avoir commencé

Les tractations souhaitées par la première ministre Theresa May avec l’opposition pour parvenir à un consensus sur un accord de Brexit ont abouti jeudi à une impasse, la dirigeante britannique jugeant « impossible » de remplir une condition posée par le Labour.

Le chef du parti travailliste, Jeremy Corbyn, a exigé de la chef du gouvernement conservateur qu’elle écarte clairement l’éventualité d’une sortie sans accord de l’Union européenne le 29 mars, avant d’entamer toute discussion.

« Impossible », a répondu Theresa May dans un courrier, ceci « n’est pas dans les pouvoirs du gouvernement ». Elle estime qu’il n’existe que « deux manières d’éviter un no deal » : le vote d’un accord au Parlement ou l’« annulation des résultats du référendum » de 2016. Jugeant « injuste » cette dernière option, elle ajoute que seul le Parlement peut empêcher un divorce sans accord. La dirigeante assure néanmoins que sa porte « reste ouverte à une rencontre sans préconditions ».

La première ministre doit présenter lundi une solution de rechange. Signe de l’enjeu, elle a annulé sa participation au forum économique mondial de Davos, qui s’ouvre lundi. Les députés britanniques auront la possibilité d’amender ce « plan B ». Leurs modifications seront présentées au vote le mardi 29 janvier, à deux mois tout juste de la date prévue du Brexit.

À mesure que l’échéance se rapproche, l’hypothèse d’un report du divorce est de plus en plus discutée à Bruxelles, pour éviter le chaos d’une sortie sans accord. Elle a reçu jeudi le soutien du comité parlementaire britannique chargé du Brexit. Mais c’est au gouvernement de Theresa May qu’il revient d’en faire la demande aux 27.

« S’ils nous disent que c’est pour organiser de nouvelles élections ou un nouveau référendum, cela ferait partie des motifs acceptables », a estimé un diplomate européen. « Mais il faut que ce soit court, pas plus de quelques semaines. »