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Photo AFP / Tessa BURROWS

Photo AFP / Tessa BURROWS

L’imam qui dirigeait la prière dans une mosquée de Christchurch quand un homme armé y a fait un carnage vendredi a affirmé samedi que cette attaque ne changerait rien à l’amour que portent les fidèles pour la Nouvelle-Zélande.

« Nous aimons toujours ce pays », a déclaré Ibrahim Abdul Halim, imam de la mosquée de Linwood, en promettant que les extrémistes ne parviendraient « jamais à entamer notre confiance ».

M. Halim a fait un récit glaçant du moment où la sérénité de la prière a été brisée par les coups de feu. « Tout le monde s’est allongé au sol, et des femmes ont commencé à crier. Certains sont morts immédiatement », a-t-il dit.

Mais, a-t-il assuré, les musulmans néo-zélandais se sentent toujours chez eux dans l’archipel du Pacifique Sud. « Mes enfants vivent ici », a-t-il dit. « Nous sommes heureux. »

Une majorité de Néo-Zélandais « ressentent le besoin de nous témoigner leur soutien, de nous dire leur totale solidarité », a-t-il poursuivi, en racontant les accolades échangées samedi avec des inconnus. « Ils me donnent l’accolade, me disent leur solidarité et c’est quelque chose de très important. » Au total, 49 personnes ont péri dans l’attaque de deux mosquées de Christchurch par un Australien de 28 ans se présentant comme un « fasciste ».

L’extrémiste australien qui a tué vendredi 49 personnes dans deux mosquées de Christchurch dans un carnage retransmis en direct sur les réseaux sociaux a été inculpé samedi par un tribunal de la ville néo-zélandaise, où il a fait de la main le signe des suprémacistes blancs.

Brenton Tarrant, 28 ans, est apparu menotté et vêtu de la tenue blanche des prisonniers pour une brève audience à laquelle seule la presse pouvait assister, pour raisons de sécurité.

L’ancien instructeur de fitness et « fasciste » autoproclamé est resté impassible lorsque son inculpation lui a été signifiée.

Debout, flanqué par deux policiers, il a fait de la main droite le signe « OK » en joignant le pouce et l’index, symbole utilisé à travers le monde par les adeptes du suprémacisme blanc. Il demeurera en détention jusqu’à une prochaine audience fixée au 5 avril.

Non loin du tribunal, 39 personnes sont toujours hospitalisées pour des blessures reçues lors du carnage. Parmi les blessés figurent un garçon de deux ans et une fillette de quatre ans, évacuée dans un état critique vers un plus grand établissement.

Les médecins de l’Hôpital de Christchurch ont dit avoir travaillé toute la nuit de vendredi à samedi dans 12 salles d’opération pour venir en aide aux survivants.Pour nombre d’entre eux, la convalescence sera longue après de nombreuses interventions chirurgicales. Sans parler du traumatisme psychique.

L’attentat, qui a soulevé une vague de condamnations à travers le monde, apparaît comme le plus meurtrier de l’époque contemporaine contre des musulmans dans un pays occidental.

Les victimes venaient des quatre coins du monde musulman, a souligné lors d’une conférence de presse Mme Ardern, en indiquant que la Turquie, le Bangladesh, l’Indonésie ou encore la Malaisie avaient proposé l’aide consulaire à leurs ressortissants.Un Saoudien et deux Jordaniens figurent parmi les victimes. Cinq Pakistanais sont portés disparus.

Coiffée d’un foulard noir, Mme Ardern est allée rencontrer samedi des rescapés de la tuerie et des familles dans une université où a été installé un centre d’information pour les victimes.

Sahra Ahmed, une Néo-Zélandaise d’origine somalienne, s’est dite émue par le geste de la Première ministre. « Ça me touche beaucoup, c’est une façon de dire: je suis avec vous », a-t-elle souligné.

Bien que nombre de commerces soient demeurés fermés samedi, et que beaucoup d’habitants de Christchurch aient choisi de rester chez eux, des bouquets s’empilaient près d’un mémorial improvisé proche de la mosquée al-Nour. »Je suis désolé que vous ne soyez pas en sécurité ici. Nos coeurs sont brisés par vos pertes », pouvait-on lire sur un mot déposé près des fleurs.

Mme Ardern a précisé lors d’une conférence de presse que le tireur avait amassé un petit arsenal et disposait d’un permis de port d’armes obtenu en novembre 2017, promettant des réformes. « Je peux vous garantir que nos lois sur les armes vont changer ».

Au moins deux armes semi-automatiques, vraisemblablement des AR-15, et deux fusils ont été utilisés par le tireur. Certaines armes avaient été modifiées pour les rendre plus efficaces, selon Mme Ardern.

Avant de passer à l’action, l’homme, qui se présente comme un blanc de la classe ouvrière aux bas revenus, a publié sur Twitter un « manifeste » raciste de 74 pages. Il est intitulé « Le grand remplacement », en référence à une théorie complotiste populaire dans les milieux d’extrême droite selon laquelle les « peuples européens » seraient « remplacés » par des populations non-européennes immigrées.

Le document détaille deux années de radicalisation et de préparatifs. Il affirme que les facteurs déterminants dans sa radicalisation ont été la défaite à la présidentielle française de 2017 de la dirigeante d’extrême droite Marine Le Pen et la mort de la petite Ebba Åkerlund à 11 ans dans l’attaque au camion-bélier de 2017 à Stockholm.

Il y rend aussi hommage au président américain Donald Trump, lequel, interrogé vendredi soir à Washington, a estimé que l’idéologie de la suprématie blanche n’était « pas vraiment » une menace répandue.

Trente-six minutes après les premiers appels à la police, Tarrant était appréhendé, dans des conditions qui demeurent floues.Le commissaire Mike Bush a salué « la bravoure absolue » des policiers et citoyens ordinaires « qui se sont mis en danger » pour stopper le tireur. « Leur intervention pourrait bien avoir sauvé des vies ».

Deux autres hommes sont en garde à vue mais leur lien avec l’attaque n’a pas été clairement établi. L’un des deux, Daniel Burrough, 18 ans, a été inculpé pour incitation à la haine.

Mme Ardern a indiqué de son côté que Tarrant « n’avait pas été repéré pour son extrémisme par les renseignements ou la police ».

« J’ai demandé à nos agences ce matin (samedi) de travailler rapidement pour déterminer s’il y a une activité quelconque sur les médias sociaux or autre qui aurait dû provoquer une réaction », a-t-elle dit en précisant que ces questions seraient l’objet d’une réunion du gouvernement lundi matin.

La police australienne a annoncé de son côté s’être rendue dans la maison d’enfance de Tarrant dans la ville de Grafton, au nord de Sydney, où des membres de sa famille ont été interrogés.