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Cette nouvelle polémique sur les livraisons d’armes françaises à l’Arabie saoudite et leur potentielle utilisation dans le conflit au Yémen, intervient quinze jours après qu’un cargo saoudien a renoncé à charger des armes au Havre. 

Des conteneurs dans le port de Marseille-Fos, le 20 septembre 2015. 
Des conteneurs dans le port de Marseille-Fos, le 20 septembre 2015.  (MAXPPP)

Cette nouvelle affaire intervient quinze jours après le rocambolesque épisode du cargo saoudien ayant renoncé à charger dans le port du Havre des armes françaises à destination de l’Arabie saoudite. Un nouveau chargement de munitions doit avoir lieu mardi 28 mai, dans le port de Marseille-Fos, affirme le media indépendant Disclose.

« Le gouvernement français n’entend pas renoncer à ses livraisons d’armes en direction de l’Arabie saoudite », écrit le site d’investigation, en affirmant qu’un cargo saoudien, le Bahri Tabuk, doit prendre livraison de munitions pour les canons Caesar français pour les convoyer jusqu’à Jeddah. « J’ai appris ce matin l’arrivée imminente du cargo Bahri Tabuk qui vient a priori chercher des munitions pour l’Arabie saoudite », a pour sa part déclaré à la presse un élu communiste des Bouches-du-Rhône, Pierre Dharréville, qui a réclamé au gouvernement « un moratoire » sur les livraisons d’armes à l’Arabie saoudite.

Des générateurs électriques, selon l’armateur

Interrogé par l’AFP, l’armateur dément ces accusations. La cargaison serait uniquement constituée de générateurs électriques affirme Shipping Agency Service, la société représentant en France l’armateur saoudien Bahri. « Le navire va charger, pour le compte de (l’entreprise allemande) Siemens, des stations mobile d’électricité à usage civil, et cela représente 100% de sa marchandise », a affirmé un porte-parole.

Cette nouvelle livraison, si elle est confirmée, intervient alors que le gouvernement français est accusé par plusieurs ONG de livrer à l’Arabie saoudite, de manière licite mais opaque, des armes susceptibles de tuer des civils au Yémen. Cette « sale guerre », selon la formule même des autorités françaises, a fait depuis 2015 des dizaines de milliers de morts et entraîné l’une des pires crise humanitaires au monde, selon l’ONU.

Selon Disclose, ce cargo saoudien doit prendre livraison de munitions pour les canons Caesar français, à destination de Jeddah, en Arabie saoudite. Une accusation éminemment sensible, ces armes pouvant être utilisées pour tuer des civils au Yémen, selon des ONG.

Cette nouvelle polémique sur les livraisons d’armes françaises à l’Arabie saoudite et leur potentielle utilisation dans le conflit au Yémen a donné lieu à une passe d’armes à l’Assemblée nationale mardi après-midi.

« Nous sommes en train de vérifier », a déclaré la ministre des Armées Florence Parly, interpellée à l’Assemblée sur ces munitions fabriquées par une filiale du groupe Nexter et leur possible départ pour le Golfe: « Et quand bien même ce serait le cas, cela serait-il étonnant ? Non, car nous avons un partenariat avec l’Arabie saoudite » a-t-elle poursuivi dans une ambiance houleuse, interrompue par un « vous mentez ! » de François Ruffin, député de La France Insoumise (gauche radicale).

Dans un communiqué, Amnesty International a appelé la France à bloquer le départ de ce « bateau de la honte » pour l’Arabie saoudite, son chargement pouvant servir pour des « crimes de guerre » commis par les forces armées saoudiennes au Yémen. Dans ce texte, l’ONG affirme que le Bahri Tabuk serait arrivé à Fos-sur-Mer avec des véhicules blindés canadiens à bord. Il y a des « raisons légitimes » de penser que des munitions françaises vont aussi être chargées, poursuit Amnesty.

Cette nouvelle livraison, si elle est confirmée, relance le débat sur les ventes d’armes françaises à l’Arabie saoudite, à la tête d’une coalition qui intervient depuis 2015 au Yémen contre les rebelles houthis soutenus par l’Iran. Cette « sale guerre », selon la formule même des autorités françaises, a fait depuis 2015 des dizaines de milliers de morts et a entraîné l’une des pires crises humanitaires au monde, selon l’ONU.

« Oui c’est une sale guerre, oui il faut l’arrêter, oui il faut que les Saoudiens et les Emiriens arrêtent, oui il faut être extrêmement vigilant sur les ventes d’armes à l’égard de ces pays. C’est ce que nous faisons », a déclaré mardi sur France Inter le ministre des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian. « Nous respectons scrupuleusement » le traité sur le commerce des armes, a-t-il assuré.

Le port de Marseille-Fos « ne servira pas à charger des armes ou des munitions », a pour sa part assuré à l’AFP Laurent Pastor, un responsable syndical des dockers, promettant que le chargement serait « vérifié ». Selon M. Pastor, le chargement du Bahri Tabuk a été présenté comme du « matériel civil pour un projet lié à l’énergie ».

L’ACAT (Action des chrétiens pour l’abolition de la torture) France a indiqué avoir déposé mardi après-midi un référé-liberté contre l’autorisation de charger des armes qui aurait été délivrée au cargo Bahri Tabuk par la Direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI). Cette association avait déjà déposé un recours contre le chargement du Bahri Yanbu au Havre, mais celui-ci avait été rejeté le 10 mai.