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© Tolga AKMEN / AFP

Disraeli Scanner

Londres,

Mon cher ami,

Une élection partielle perdue: la défaite salutaire

Il est exceptionnel qu’à cette période de l’année je ne sois pas à Hughenden. Mais vous avouerez qu’il vaut la peine d’être à Londres en ce moment. Boris a été dès le départ pleinement dans le rôle et il l’incarne à la perfection. Et puis, jeudi dernier une élection partielle est venue rappeler le parti conservateur au principe de réalité. Le siège de Brecon and Radnorshire, au Pays de Galles, a été perdu à quelques points. Il faut dire que le parti conservateur avait maintenu un candidat controversé tandis que certains partis, comme les Verts, n’avaient pas présenté de candidat, pour ne pas disperser les voix des Remainers. Résultat, le candidat Remainer a obtenu 43% des voix, devançant un candidat conservateur à 39%.

Plusieurs enseignements intéressants peuvent en être tirés. D’abord, le Labour s’est effondré. Il est passé de 17% à 5% des voix. La ligne Corbyn sur le Brexit est bien catastrophique aux yeux des électeurs. Ensuite, le Brexit Party, à 10%, à les moyens de faire perdre les Conservateurs (qui ont perdu 12% des suffrages par rapport à 2017). Néanmoins, le Brexit Party était arrivé en tête aux élections européennes.  L’effet Boris a donc joué.  Suffisamment pour montrer la voie.  Pas assez cependant pour endormir la vigilance du gouvernement. Le Premier ministre joue une partie serrée.

Depuis le résultat, les Remainers ne se cachent plus. Ils manœuvrent à ciel ouvert. Le comité militant pour un nouveau référendum annonce avoir repéré 100 circonscriptions où il agira en faveur d’un vote utile, afin qu’un candidat Remainer soit sûr de l’ emporter. Les Remainers sont certains, en effet, qu’ils gagneront un vote de défiance envers le Premier ministre à la rentrée parlementaire de septembre et provoqueront des élections. Le chef du SNP écossais a invité les partis d’opposition à Westminster à unir leurs forces pour renverser le gouvernement.

Le scénario de la rentrée

Admettons que l’opposition y arrive. Le Premier ministre est maître du calendrier. Il a 15 jours pour reposer au Parlement la question de la confiance.  Puis il propose à la Reine la date de la nouvelle élection générale. Il faut prévoir cinq semaines de campagne. L’élection aura donc lieu après le 31 octobre. Et le gouvernement aura pu mettre en place le Brexit à la date prévue. Il gagnera donc l’élection largement selon toute vraisemblance. Les petites manœuvres des uns et des autres ne joueront plus grand rôle.

A vrai dire, je pense plutôt que le Parlement laissera faire. Un tournant important est en train de se produire dans les sondages d’opinion britanniques. Les instituts de sondage ont commencé à poser la question du jugement à porter sur l’attitude de Bruxelles face à la demande de notre gouvernement de renoncer au backstop. Et une majorité de Britanniques pense que l’attitude de l’Union Européenne est déraisonnable.

La tranquille détermination du peuple britannique et l’aveuglement continental

Angela Merkel, Emmanuel Macron, ces individus sans passé et sans culture, ne savent pas ce qu’est la tranquille détermination de notre peuple quand il est convaincu de son bon droit. C’est comme une équipe de rugby bien soudée et qui avance de manière irrésistible vers les 22 mètres adverses. Nous avons désormais un demi de mêlée à la hauteur de son poste à Downing Street. Et l’équipe de Bruxelles pourra botter en touche aussi souvent qu’elle le souhaite. Nous récupérerons inlassablement les ballons avant que nos deux ailiers, Steve Barclay et Dominic Raab, aillent marquer l’essai.

Je suis frappé par le changement d’état d’esprit dans la communauté des affaires. Le Brexit apparaît désormais comme un fait. Certains sont résignés, d’autres enthousiastes. Mais tout le monde avance. Alors, oui, nous avons droit à tous les scénarios catastrophe! Les prophètes d’apocalypse essaient de faire revivre le Project Fear. La réalité est ailleurs. Comme le montre un scénario dressé par un institut économique allemand, le No Deal fera perdre au maximum 12 000 emplois à l’économie britannique; mais plus de 400 000 à l’Union européenne, dont 50 000 à la France et presque 100 000 à l’Allemagne. Tel est le vrai rapport de force.

Les continentaux s’obstineront-ils à ne pas vouloir négocier? A Bruxelles on campe sur ses positions. Et je suis quasiment sûr que rien ne bougera en septembre, dans l’espoir vain que Boris Johnson soit mis en difficulté. Mais c’est oublier que les États-unis de Trump veillent au grain. Le président américain a confiance dans Boris Johnson. Il interviendra au bon moment pour soutenir l’effort de Londres.

Mon cher ami, je me réjouis de votre visite à Hughenden en septembre. Nous aurons une actualité passionnante à commenter.

Bien fidèlement à vous

Benjamin Disraëli

Source: Atlantico