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 Selon beaucoup de commentateurs, le G7 de Biarritz a été une victoire pour Emmanuel Macron. Est-ce si sûr?, s’interroge Arnaud Benedetti.


Arnaud Benedetti est professeur associé à l’Université Paris-Sorbonne. Il est rédacteur en chef de la revue politique et parlementaire. Il a publié Le coup de com’ permanent (éd. du Cerf) dans lequel il détaille les stratégies de communication d’Emmanuel Macron.


Le chœur des commentateurs le dit: Macron a réussi son G7. Forcément puisque tout avait été orchestré pour eux. Ce n’est pas aux Français qu’était destinée l’enveloppe communicante de l’exercice, mais à ces nouveaux interprètes des cieux que sont les éditorialistes et autres observateurs de l’immédiat. La com’ ne joue pas sur la distance mais exclusivement sur l’instant. Elle est un instrument de gestion de l’émotion, du préjugé et du prêt-à-penser. Elle endolorit l’esprit critique et autorise toutes les paresses intellectuelles. Et au demeurant elle empêche de «penser l’événement» pour reprendre le titre de l’ouvrage du grand historien Pierre Laborie. Alors que rien ne permet à ce stade de dire quelles seront les conséquences de cette réunion de puissants, si même effets il y aura, la lecture qui en résulte est celle d’un succès à porter au crédit du Président Macron. Du point de vue de la com’ destinée à son public de première ligne, les «happy few» des médias, l’hôte de l’Élysée a manifestement atteint sa cible, celle de ses intermédiaires qu’il avait tenus en retrait dans les premiers pas élyséens du début de mandat.

Le G7 avait besoin de s’incarner de manière quasi incandescente dans un champion.

Le G7 sous Macron et de Macron avait besoin d’un intense teasing. Depuis des mois la bande-annonce défilait sur tous les écrans. Il avait besoin de s’incarner de manière quasi incandescente dans un champion. Le Président par son investissement personnel fut celui-ci. Il fut tout à la fois «Monsieur Loyal», chef d’orchestre, grand ordonnateur, «Président-Soleil» autour duquel – médias français en priorité – le moment se construisit. Car ce n’était qu’un moment dont il fallait charger le moteur en énergie spectaculaire. On rythma de la sorte le tout: en images, en points presse, en suspens, en déclarations triomphantes, en «coups de théâtre» (la venue inattendue à Biarritz du Ministre iranien des Affaires étrangères) et en Happy end où tout le monde au faîte du récit trouva motif à congratulations unanimes. C’est le propre du théâtre que de créer une illusion, de sursouligner des caractères et de produire un épilogue en forme d’assomption moralisante. Le G7 a été ainsi un espace théâtral pour le public initié des commentateurs. Il leur a fourni la nourriture propre à alimenter leur besoin d’admiration. Il avait, il est vrai, un puissant MacGuffin, objet prétexte au développement de tout bon scénario hitchcokien: les éruptions intempestives de Trump. Le Président américain n’ayant pas «dérapé», le sommet est un succès! Le show est terminé, l’histoire peut reprendre ses droits…

Figaro Vox