Un cours étrange à Science po

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Maxime TANDONNET

C’est le Point qui le révèle: en 2020, Science po ouvre un nouveau cours intitulé « Macron », dont l’objectif est un enseignement en anglais autour de la personnalité du président de la République. Le lien figurant dans l’article de l’hebdomadaire présente ce cours: ce n’est donc pas une fausse nouvelle, ni un canular.

Les défenseurs de cette initiative voient dans le parcours du chef de l’Etat un objet d’étude justifié pour étudiants en sciences politiques.

Cependant, consacrer tout un enseignement, de 25 heures, à la personne d’un dirigeant actuellement au pouvoir, semble être sans précédent en France. Alors que Science po, comme tout établissement universitaire, a vocation à développer un esprit critique, une capacité de distanciation et de recul par rapport aux passions de l’actualité, dans un esprit d’impartialité et d’objectivité maximale, cet enseignement, quelle que soit la bonne volonté de ses promoteurs, donne prise au risque de glissement dans la propagande et le culte de la personnalité. En d’autres temps, sous d’autre cieux, et d’autres établissements, un autre régime, on imagine parfaitement des cours consacrés au culte du chef…

Science po constitue la principale pépinière des « élites » médiatiques, économiques, administratives et judiciaires française, avec ses vastes promotions de 2500 sortants chaque année (soit 15 fois plus que l’X et 25 fois plus que l’Ena). L’introduction d’un cours consacré au premier dirigeant en place se présente comme le fidèle reflet d’un certain état d’esprit de plus en plus prégnant dans la sphère dirigeante et influente de la nation, porté vers un conformisme croissant.

Jadis, sous la IIIe République, sous le nom d’Ecole Libre des Sciences politiques, avec des effectifs infiniment plus réduits qu’aujourd’hui, cette école a contribué à forger l’esprit d’indépendance et de liberté de penser  de plusieurs générations de hauts cadres et intellectuels de la nation. A l’image de son directeur-adjoint, Roger Seydoux, plusieurs de ses cadres et enseignants ont pris une part active dans la Résistance.

Il ne faudrait pas que Science po, tournant le dos à son histoire et sa tradition d’indépendance, s’impose désormais comme le principal outil de formatage des cerveaux et pire, une école d’obséquiosité.

https://maximetandonnet.wordpress.com/

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