Le forcing de Macron à New York pour une rencontre Trump-Rohani

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Mardi, 18h00 locales, dans la Mission française auprès des Nations-Unies. Les journalistes attendent Emmanuel Macron pour son point de presse final après ses deux jours à New York.

Depuis deux jours, le chef de l’Etat fait des allers-retours entre les présidents iranien et américain pour les convaincre de se rencontrer pendant leur séjour commun à New York à l’occasion de l’Assemblée générale des Nations-Unies, afin d’apaiser les tensions dans le Golfe.

Pour l’instant, en vain.

Dimanche soir, dans son avion vers New York, le président français était pourtant optimiste. « Quelque chose peut se passer à New York », affirmait-il à des journalistes invités à bord.

« Quelque chose », autrement dit une rencontre entre Donald Trump et Hassan Rohani, que le Français rêve d’organiser. Ce serait la première rencontre à ce niveau depuis la révolution islamique de 1979 entre deux pays sans relations diplomatiques.

Il espère concrétiser à New York les accords de principe arrachés aux deux dirigeants lors du G7 de Biarritz. Mais son pari semble très compromis depuis l’attaque du 14 septembre contre les installations pétrolières en Arabie saoudite, que Trump a aussitôt attribuée à l’Iran.

Dès son atterrissage, l’incertitude plane sur son programme. Il rencontrera « très probablement » Donald Trump et Hassan Rohani, assurent ses conseillers. Mais aucun créneau n’est calé.

Ce n’est que lundi midi que ses rencontres se confirment, avec Rohani lundi soir et Donald Trump mardi. En fait, Emmanuel Macron a déjà eu un bref échange sur l’Iran avec l’Américain dans la matinée.

Lundi après-midi, lors d’une rencontre avec Angela Merkel et Boris Johnson, coup de théâtre : jusqu’ici très prudent, Emmanuel Macron choisit une ligne dure en annonçant que tous trois jugent l’Iran « responsable » des attaques contre l’Arabie.

Il se rallie ainsi à la position américaine, au risque de braquer Téhéran qui dénonce aussitôt des accusations « ridicules ».

Une demi-heure plus tard, visiblement encouragé par la prise de position européenne, Donald Trump déclare qu' »à ce stade » il n’a pas prévu de rencontrer le dirigeant iranien mais qu’il « n’exclut rien ».

Vers 19h00, la délégation française arrive à l’hôtel Millennium où séjourne Hassan Rohani, sous haute sécurité. Le président français, le ministre des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian, le ministre de l’Economie Bruno Le Maire, ses conseillers, tous entrent dans le salon où l’attendent les Iraniens. La réunion s’éternise.

Emmanuel Macron en ressort 1h40 plus tard, le visage fermé. Avant de quitter Rohani, il se permet juste trait d’humour : « bon, on reprend tout depuis le début? » Pour détendre des pourparlers compliqués?

« On a vu qu’il y avait un petite ouverture. Et parfois le président a fait rire Rohani, en filant des métaphores », glisse un conseiller de M. Macron.

Pourtant le lendemain matin, son optimisme semble revenu. Devant son hôtel, il déclare qu’il « espère avancer dans les prochaines heures », relançant l’hypothèse d’une rencontre surprise irano-américaine avant la fin de la journée.

Dans son discours à la tribune de l’ONU, il appelle encore les deux parties à négocier, pour éviter un « risque d’embrasement » et file ensuite pour sa rencontre bilatérale avec Donald Trump, qui ne dure que dix minutes.

Il va partir dans la soirée, un retournement de situation semble improbable. Ni l’Iranien ni l’Américain n’acceptent de faire le premier pas, l’un pour lever ses sanctions économiques, l’autre pour s’engager à s’abstenir d’attaques militaires dans la région et se doter de la bombe atomique.

« Sauter dans la piscine en même temps »

D’où la surprise quand l’Elysée annonce mardi soir à la presse que le point de presse est retardé car Emmanuel Macron est retourné voir Hassan Rohani dans son hôtel.

Plus surprenant encore, une vidéo montre la rencontre fortuite des deux hommes quelques instants plus tard avec Boris Johnson, qui lui aussi attend le président iranien.

On y voit le Français qui tente encore en dernière minute de convaincre Rohani de rencontrer Trump.

« S’il quitte le pays sans rencontrer le président Trump, honnêtement ce sera une occasion perdue car il ne reviendra pas avant plusieurs mois », lui dit-il en anglais.

« Je suis d’accord avec Emmanuel », renchérit le Premier ministre britannique, avec cette comparaison improbable. « Vous devez vous mettre sur le bord de la piscine et sauter en même temps »!

Soudain, les collaborateurs de l’Elysée font installer un pupitre officiel. La conférence pourra être filmée. Le chef de l’Etat veut donc faire une annonce. Mais qui ne sera pas celle de la rencontre espérée.

« Nous avons créé les conditions d’une reprise rapide des négociations », assure-t-il. « J’ai fait ce que j’avais à faire » et une rencontre « ne dépend que d’eux ».

Il ne restera pas sur place pour s’en assurer. « La tâche est lourde aussi qui m’attend à Paris, je ne peux pas caler mon agenda sur celui de la présence iranienne à New York ». Et de repartir vers l’aéroport. Mission accomplie? Seuls les jours qui viennent permettront d’en juger.

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