Histoire de Paris

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Paris, capitale hors-normes

Oppidum gaulois, modeste cité gallo-romaine, résidence occasionnelle des rois mérovingiens, Paris devient capitale du royaume capétien en l’An Mil. C’est le début d’un destin exceptionnel. Il y a cinq cents ans, François Ier écrivait  à Charles Quint : « Ce n’est pas une ville mais un monde ».

Au tournant du XXe siècle, à la Belle Époque, la ville attirait les artistes du monde entier et l’écrivain Jean Giraudoux pouvait écrire avec raison : « À Paris, j’ai sous les yeux les cinq mille hectares du monde où il a été le plus pensé, le plus parlé, le plus écrit ». Nous n’en sommes plus là. Paris n’est plus à la pointe de la création et n’a plus de prise sur le cours de l’Histoire. Mais les touristes du monde entier ont encore pour elle les yeux de Chimène et ses habitants, en dépit de leurs récriminations, ne se résignent pas à la quitter…

Jean-Pierre Bédéï et André Larané

Le Quai des Orfèvres et le Pont Saint Michel, Camille Corot, 1833, Paris, musée Carnavalet. L'agrandissement présente un tableau de Gaspart Gobaut, Les deux rives de la Seine à la hauteur des Tuileries, 1845, Paris, BnF, Gallica.

Paris : les étrangers sont ceux qui en parlent le mieux

« Imaginez-vous une Ville où les meilleures têtes d’un grand empire sont rassemblées, et, par des relations, des luttes, par l’émulation de chaque jour, s’instruisent et s’élèvent mutuellement ; où tout ce que les règnes de la Nature, ce que l’Art, dans toutes les parties de la terre, peuvent offrir de plus remarquable, est accessible à l’étude ; imaginez-vous cette ville universelle où chaque pas sur un pont, sur une place, rappelle un grand passé ; où, à chaque coin de rue s’est déroulé un fragment d’histoire. Et encore imaginez-vous ce Paris…. dans lequel depuis trois âges d’homme, des êtres comme Molière, Voltaire, Diderot, et leurs pareils ont mis en circulation une abondance d’idées que nulle part ailleurs sur la terre on ne peut trouver réunies !… » (Goethe (1749-1832), cité par G. Lenotre (Paris, 1937).

L’historien G. Lenotre nous propose aussi cette citation du comte russe Fédor Rostopchin (1763-1826) : « J’ai reconnu en cette ville la maîtresse de l’Europe : tant que la bonne compagnie parlera français, que les femmes aimeront les modes, que la bonne chère fera les délices de la vie, Paris influera toujours sur les autres pays. Il est certain qu’aucune autre ville au monde ne possède une aussi grande quantité d’hommes instruits, savants et estimables » et celle-ci du savant allemand Humboldt (1759-1859) : «C’est là seulement que je me sens vivre ! ».

William Parrot, Le quai Conti avec les bouquinistes (6ème arr.), 1846, Paris, musée Carnavalet. L'agrandissement montre un tableau de Vincent Van Gogh, Le Boulevard de Clichy, 1887, Amsterdam, Van Gogh Museum.

Aux origines de Paris

Évoquée par Jules César dans La Guerre des Gaules, Lutèce est la capitale de la tribu gauloise des Parisii. On suppose que l’oppidum gaulois occupait un ensemble d’îlots sur la Seine, dont le principal sera justement appelé Île de la Cité, mais des découvertes archéologiques récentes donnent à penser que le véritable oppidum se situait plutôt au nord-ouest, dans un méandre de la Seine, du côté de Nanterre.

Monnaie gauloise : Statère des Parisii, Paris, musée Carnavalet. 120 pièces d'or ont été découvertes à Puteaux en 1950.La cité est le théâtre en 52 av. J.-C. d’une bataille entre Gaulois et Romains. Ces derniers l’emportent sous le commandement d’un lieutenant de César, Labienus.

César comprend immédiatement l’intérêt stratégique du site, avec un gué sur la Seine et deux ponts qui relient l’île de la Cité aux rives du fleuve, avec des voies en direction de Pontoise, Rouen, Senlis, Soissons, Melun, Sens. C’est l’ébauche de la centralisation monarchique, complétée par les atouts commerciaux que représente le fleuve. Restée malgré tout de taille modeste, la cité change de nom. Lutèce se fait connaître comme la « cité des Parisii » au cours du IIIe siècle de notre ère avant de devenir définitivement « Paris », deux cents plus tard.

L'agrandissement est une vue actuelle de la Tour Clovis, de l'église Saint-Etienne-du-Mont et de la statue de Pascal au centre.

Lorsque l’empire romain périclite à la fin du Ve siècle, Paris fait figure de place forte et le jeune roi des Francs Clovis (481-511) en fait sa résidence préférée. Paris devient ainsi l’une des capitales de ses successeurs, les Mérovingiens, les successeurs de Clovis.

Avec l’avènement des Pippinides (de la famille de Pépin) et de Charlemagne, dans une société devenue essentiellement rurale, centrée sur les seigneuries et les abbayes, la ville s’étiole. Elle s’étiole d’autant plus que le coeur de la chrétienté se déplace vers la Meuse, le Rhin et Aix-la-Chapelle.

Mais les Carolingiens ne sont pas faits pour durer. L’Empire se démembre très vite, sous les coups des intrus, Normands, Sarrasins et autres Hongrois. Grâce à l’énergie du comte de Paris Eudes, élu roi par les barons de la partie occidentale de l’empire, Paris résiste aux Normands qui l’assiègent (885-886).

En 987, les barons de la Francie occidentale mettent pour de bon un terme à la tutelle carolingienne et confèrent le titre royal à l’un des leurs, le comte de Paris Hugues Capet, dont le principal mérite est d’être le petit-neveu et l’héritier du grand Eudes. Ainsi débute en catimini la dynastie capétienne et avec elle l’aventure parisienne. La ville devient définitivement la capitale du royaume et va grandir et prospérer en même temps que le pouvoir royal.

Jean Victor Schnetz, Le comte Eudes défend Paris contre les Normands, 1837, Château de Versailles.

Le centre névralgique de la France

C’est avec Philippe Auguste que Paris se hisse au rang d’une vraie capitale. La ville, forte de 100 000 habitants et enrichie par le commerce fluvial, se dote d’une Université mais aussi s’entoure de murailles pour résister à la menace anglo-normande, toujours présente.

Rixes à Paris entre étudiants et bourgeois, vers 1230, Paris, BnF, Gallica.

Jusqu’à l’époque de Louis XIV, quatre siècles plus tard, la population parisienne sera ainsi enfermée dans un corset de pierre, élargi au fil des siècles. Le corset sera même rétabli à l’initiative du Président du Conseil Adolphe Thiers au XIXe siècle pour n’être ôté qu’après la Première Guerre mondiale. De là vient la forte concentration urbaine et la relative absence de parcs et espaces naturels au centre de la ville.

Le règne de Louis IX (saint Louis), petit-fils de Philippe Auguste, marque l’apogée de la France médiévale… et de sa capitale. Le roi confit en dévotion, a le bonheur de voir en 1245 l’achèvement de la cathédrale Notre-Dame de Paris, dont la reconstruction dans le nouveau style français (art gothique) a débuté en 1163.

Cela ne lui suffisant pas, il achète à prix d’or de précieuses reliques, dont la Couronne d’épines du Christ, et construit pour elles, dans son propre palais, sur l’île de la Cité, en face de la cathédrale, un reliquaire d’exception, la Sainte Chapelle. Celle-ci est consacrée en 1248. Ainsi Paris, selon le voeu du roi, doit-elle devenir une ville sainte faisant jeu égal avec Rome, Antioche, Constantinople et même Jérusalem.

Miniature extraite du manuscrit Passages d’Outremers de Sabastien Mamerot montrant l’Île de la Cité au XVe siècle, Paris, BnF, Gallica.Notons tout de même que les rois capétiens, soucieux de préserver leur pouvoir, se gardent de trop élever l’évêque de Paris. Celui-ci, curieusement, est suffragant (dépendant) de l’archevêque de Sens, modeste cité bourguignonne. C’est seulement en 1622 qu’il obtiendra rang d’archevêque.

À la fin du « beau Moyen Âge » (XIe-XIIIe siècles), avec une superficie d’environ 438 hectares, Paris est la plus grande ville de France. On lui attribue 200 000 habitants en 1300, sous le règne de Philippe le Bel, ce qui en fait aussi, de loin, la plus grande ville de la Chrétienté, devant Florence et Venise (guère plus de 100 000 habitants chacune).

Pendant la guerre de Cent Ans, profitant de l’affaiblissement du pouvoir royal et de la captivité en Angleterre du roi Jean le Bon, la bourgeoisie parisienne joue pour la première fois un rôle politique. Le prévôt des marchands Étienne Marcel mène la révolte contre le fils du roi, le Dauphin (1356-1358). Celui-ci étant devenu le roi Charles V le Sage et les Anglais ayant été une première fois boutés hors du royaume, la ville retrouve la paix. Elle est divisée en 16 quartiers, administrés par un quartenier, élu par 4 cinquanteniers et 16 dizeniers ; les 16 quarteniers élisent le prévôt des marchands, qui devient de ce fait chef de la municipalité.

L'entrée de la reine Isabeau de Bavière à Paris le 22 août 1389, attribué à Philippe de Mazerolles, vers 1470-1472, Londres, British Library. L'agrandissement présente une seconde enluminure de l'entrée d'Isabeau de Bavière à Paris extraite des Chroniques de Jean Froissart, Belgique, fin XVe siècle, Paris, BnF.

Les choses se gâtent à nouveau avec la querelle des Armagnacs et des Bourguignons : les premiers, issus de la « France profonde », soutiennent la monarchie, tandis que les seconds, alliés de l’occupant (anglais), bénéficient du soutien de la bourgeoisie et des magistrats parisiens. N’y voyons aucune allusion à une période plus récente et à un autre occupant…

À l’époque de la Renaissance, Paris est délaissé quelque peu par le pouvoir au profit des châteaux de la Loire. Mais le roi et la Cour y reviennent rapidement après que François Ier eut renoncé à déporter la capitale du royaume à… Romorantin, un modeste bourg au coeur de la forêt et des marais de Sologne !

Le roi y voyait le double avantage de l’éloignement d’avec la frontière septentrionale et de la proximité d’avec ses chères résidences ligériennes (de la Loire). Son vieil ami Léonard de Vinci commença même de travailler sur le projet.

Après cet épisode, Paris devient plus que jamais le cœur du royaume et le centre incontournable de son administration. Elle devient aussi la principale ville d’Europe, la plus grande et la plus prestigieuse. Les cités italiennes sont sur le déclin. Londres ne lui fait pas encore de l’ombre. Madrid et Berlin n’existent pas encore.

Plan de Truschet et Hoyau, extrait de La ville, cité, université de Paris (dit plan de Bâle), 1552, conservé à la bibliothèque universitaire de Bâle

La fureur et la fête

Cette centralité de Paris ne va pas aller sans violence. Le peuple parisien, mal guéri de la première Révolution et de la révolte des Cabochiens, qui l’avaient conduit à prendre le parti de l’occupant anglo-bourguignon contre celui de la monarchie, va jusqu’à nos jours, devenir le moteur de l’Histoire nationale au côté du gouvernement et souvent en conflit avec lui.

Paris, un modèle urbain sans équivalent

Comment Paris est-elle devenue l’une des plus belles villes du monde, sinon la plus belle, à en juger par le nombre de touristes qu’elle attire, à défaut d’attirer encore des artistes et des créateurs ?

Nous verrons que Paris est l’aboutissement d’un effort urbanistique de plusieurs siècles, engagé par la monarchie la plus puissante du continent européen, assise sur un territoire d’une infinie diversité.

Jean-Baptiste-Nicolas Raguenet, L'Hôtel de Ville et la place de Grève, 1751, Paris, musée Carnavalet. L'agrandissement montre la place de l'Hôtel de Ville aujourd'hui.

Un destin encore incertain

L’histoire de Paris est aussi celle d’une continuelle extension sur les bords de la Seine. La Lutèce gallo-romaine déborde de l’île de la Cité et s’étend essentiellement sur la rive gauche du fleuve.

Arènes de Lutèce (Paris 5ème arr.), fouilles 1870, vue d'ensemble, Pierre Emonts, Paris, musée Carnavalet. L'agrandissement est une vue des Arènes de Lutèce aujourd'hui.Elle est composée d’habitats populaires et des quelques monuments propres à tous les cités romaines, thermes, arènes, temples…  avec un plan en damier ordonné suivant le cardo maxiumus (axe Nord-Sud, aujourd’hui la rue Saint-Jacques) et le decumanus (axe Est-Ouest, plus ou moins la rue des Écoles).

À la fin du IIIe siècle, l’empereur Constance Chlore fait édifier le palais des Thermes au pied du mont Leucotetius, l’actuelle montagne Sainte-Geneviève. Il reste de cette première cité quelques vestiges. Ce sont les thermes de Cluny et les arènes de la rue Monge.

Mais cette Lutèce n’est jamais qu’une cité de second rang, avec environ 8 000 habitants sur 80 hectares à son apogée, bien moins que Lyon, Trèves, Reims, Nîmes, Toulouse ou encore Bordeaux. Dans les derniers temps de l’empire, elle prend le nom de ses premiers habitants gaulois et devient la « cité des Parisii », autrement dit Paris.

Vue de la grande salle du Palais des Thermes : le frigidarium,  Achille Poirot, 1845, Paris, musée de Cluny. L'agrandissement montre le frigidarium au sein du musée de Cluny aujourd'hui.

– Presque capitale avec Clovis et les Mérovingiens :

Clovis érige son palais à l’extrémité occidentale de l’île de la Cité. C’est désormais là que résideront tous les souverains jusqu’à Charles V. À la fin du XIVe siècle, celui-ci s’installera à l’hôtel Saint-Pol, dans le Marais, et laissera le palais de la Cité, ses fonctionnaires et ses magistrats, sous la tutelle d’un concierge. C’est aujourd’hui le Palais de Justice et la Conciergerie.

Église Sainte-Geneviève et abbaye Saint-Etienne-du-Mont, actuelle place Sainte-Geneviève, 5ème arrondissement, Angelo Garbizza, entre 1798 et 1808, Paris, musée Carnavalet.Le roi des Francs projette par ailleurs d’être inhumé sur le mont Leucotetius, sur la rive gauche, où son amie sainte Geneviève a établi son ermitage et dans l’église même où elle a été inhumée, l’église des Saints-Apôtres, aujourd’hui église Sainte-Geneviève, à côté du Panthéon. Ses successeurs, toutefois, à compter du roi Dagobert (633-639), préfèrent comme lieu d’inhumation l’abbaye de Saint-Denis, à une vingtaine de kilomètres plus au nord.

Saint-Germain des Prés, Restitution des bâtiments du XVe siècle, Auguste-Jacques Régnier, XIXe siècle, Paris, BnF, Gallica. L'agrandissement montre l'église Saint-Germain des Prés aujourd'hui.Ils comblent aussi de privilèges la puissante abbaye de Saint-Germain-des-Prés et quelques autres comme l’abbaye de Saint-Cloud.   Le Paris des Mérovingiens englobe les deux rives de la Seine. Dès la fin du IXème siècle, les Parisiens commencent à s’installer autour du port, sur la rive droite, près de la Grève, qui deviendra bien plus tard la place de l’Hôtel de Ville.

Sur la rive gauche se dressent surtout des églises, dont l’église Saint-Vincent qui deviendra l’abbaye de Saint-Germain-des-Prés.

Mais avec l’avènement des Pippinides et de leur champion, Charlemagne, Paris retombe dans l’oubli et ses habitants se replient sur l’île de la Cité. Pour faire face aux attaques des Normands (IXe siècle), sont bâties les premières enceintes, autour de la Cité et sur la rive droite. Protégeant les sédentaires contre les attaques des envahisseurs et des routiers, cette technique de fortification sera promise à un bel avenir.

– Une vocation affirmée de capitale avec Hugues Capet :

Moulage du sceau des marchands de l'eau de Paris de 1210, conservé aux Archives nationales. L'agrandissement montre les armoiries de Paris sur la façade de l'ancienne caserne des Petits-Pères, 12 rue de la Banque,à Paris 2e arr. réalisées par Victor Baltard.Hugues Capet et ses successeurs, les premiers rois capétiens, ne sont encore que de modestes souverains, élus par leurs pairs, les grands barons de ce qu’on appelle encore la Francie occidentale, le mot France apparaissant au début du XIe siècle.

Profitant de l’essor économique de la chrétienté amorcé après l’An Mil, Paris asseoit sa prospérité sur le commerce fluvial, sur la Seine et ses principaux affluents, l’Oise et la Marne.

Ce commerce fait la fortune de la « guilde des marchands de l’eau » à laquelle Louis VII accorde en 1170 le monopole de tout le trafic entre Mantes et Corbeil. C’est à cette corporation (dico) que la ville devra ses armoiries, avec une nef en bonne place, et sa devise latine, Fluctuat nec mergitur (« Il est battu par les flots mais ne sombre pas »).

Paris, ville puissance

Les choses sérieuses commencent avec Philippe Auguste (1180-1223)

Paris vu du ciel et ses principaux monuments

Paris compte alors pas loin de cent mille habitants et c’est déjà l’une des plus grandes villes de la chrétienté, en concurrence avec les républiques marchandes italiennes. Elle compte aussi quinze mille étudiants venus de partout et qui étudient dans des écoles privées. La cohabitation n’est pas facile et pour y remédier, le roi fonde le 15 janvier 1200 une Université, l’une des premières de la chrétienté. Concentrée dans le Quartier latin (ainsi nommé car le latin est la langue commune aux étudiants et aux maîtres), autour de l’église Saint-Julien-le-Pauvre, cette Université est essentiellement tournée vers la théologie et l’étude des textes anciens. Elle est à l’origine de la réputation intellectuelle de la capitale.

L'enceinte de Philippe Auguste située rue des Jardins-Saint-Paul à Paris dans le 4ème arr.

Le roi doit aussi protéger sa ville contre ses voisins qui ne sont autres que les Plantagenêts, rois d’Angleterre et ducs de Normandie. Leurs domaines confinent à l’Île-de-France. Dès 1190, il lance donc la construction d’une enceinte fortifiée. Achevée vers 1212, elle enserre les deux rives de la Seine.

Le Louvre médiéval (sous la cour carrée du Louvre), crypte Philippe-Auguste. L'agrandissement montre la tour découverte lors des fouilles préventives menées dans le cadre de la construction d’un auditorium attenant à l’Institut de France (6e arr.)Elle est piquetée de douze portes et trente-trois tours, dont une « grosse tour » à l’endroit où l’enceinte rencontre la Seine, à l’ouest, face aux domaines normands des Plantagenêts. Le nom de cette tour, Louvre, dériverait d’un mot latin désignant les loups (preuve de ce que le lieu était rien moins que sûr). Les fondations de la tour de Philippe Auguste ont été retrouvées dans la Cour carrée, dans les années 1980, lors des travaux du Grand Louvre. Elles sont visibles en souterrain.

Vers 1220, toujours sous le règne de Philippe Auguste, le conseil dirigeant des marchands de l’eau, le « parloir aux bourgeois », commence à faire figure d’assemblée représentative des Parisiens, face au représentant du roi, le prévôt de Paris. Le conseil s’établit d’abord près du Châtelet puis sur la montagne Sainte-Geneviève, enfin en 1357, à l’initiative d’Étienne Marcel, dans la Maison-aux-Piliers de la place de Grève. Plusieurs fois reconstruite et agrandie, c’est l’actuel Hôtel de ville, restitution (en plus grand) de l’édifice de la Renaissance, incendié sous la Commune (1871).

Dans le même temps, sur l’île de la Cité, face au palais royal, les évêques poursuivent la reconstruction de leur cathédrale dans le nouveau style, le style français ou art gothique. Elle est achevée en 1245, sous le règne de saint Louis, petit-fils de Philippe Auguste. Le pieux roi lance en parallèle, à côté de son palais, la construction de la Sainte Chapelle, reliquaire tout de lumière et de légèreté, pour abriter les saintes reliques du Christ.

Vue de l'Ile de la Cité avec le Pont Neuf et la pompe de la Samaritaine, Jean-Baptiste-Nicolas Raguenet, XVIIIe siècle, coll. particulière. L'agrandissement montre le Pont Neuf qui traverse les deux bras (le Grand bras et le Petit bras), permettant de relier la rive droite à la rive gauche en passant par la pointe ouest de l'île.

Surchauffe économique, surpopulation, crise dynastique, guerres, jacqueries et épidémies changent l’humeur de nos aïeux.

À la faveur d’une embellie pendant la guerre de Cent Ans, le roi Charles V le Sage (1364-1380) se montre justement soucieux de protéger sa capitale. Il lance une nouvelle ligne de fortifications au-delà de la précédente. Il fait aussi agrandir le Louvre et érige une puissante forteresse à l’est de sa capitale, dans le faubourg Saint-Antoine, c’est la Bastille. Elle a mission de protéger la ville contre un hypothétique envahisseur mais aussi de surveiller les habitants dont les événements récents ont montré la dangerosité.

Le roi lui-même abandonne le palais de la Cité à ses fonctionnaires et partage son temps entre le donjon de Vincennes, plus haut d’Europe, et sa nouvelle résidence, l’hôtel Saint-Pol, dans le quartier du Marais, où il ne tarde pas à être rejoint par les nobles de la Cour.

En dépit des aléas de l’heure, Paris s’affirme comme la plus grande et plus prestigieuse ville d’Europe, même si elle  n’est encore pour l’essentiel qu’un entrelacs de rues étroites et non pavées – on en compte environ 300 – aux alignements plus que fantaisistes.

La cour carrée du Louvre au début du XVIIe siècle, Féodor Hoffbauer, vers 1890,  Paris, musée Carnavalet. L'agrandissement montre une vue de la cour carrée aujourd'hui.

Paris, ville de l’idéal Renaissance

Les troubles du XVe siècle et la reconstruction du royaume sous Louis XI laissent peu de souvenirs à Paris. François Ier (1515-1547) songe même un temps à déplacer sa capitale à Romorantin, dans le val de Loire qu’il chérit par-dessus tout. Mais il ne tarde pas à se raviser et, à partir de 1530, pétri de l’idéal humaniste de la Renaissance et de l’exemple italien, va insuffler un nouvel élan à la capitale.

Paris, de la « Ville-Lumière » à la ville-musée

À la veille de la Révolution, Paris compte environ 550 000 habitants  dans un royaume qui en compte, lui, 28 millions (ce qui en fait alors, et de loin, le pays le plus peuplé d’Europe).

La colonne de la place Vendôme, ou colonne de la Grande Armée de Napoléon Ier, gravure et vue actuelle, DR

Napoléon Ier reprend l’oeuvre de la monarchie avec l’ambition avouée de faire de Paris « la véritable capitale de l’Europe. » Les coalisés ne lui en laisseront pas le loisir. S’inscrivant dans le « Grand Dessein » monarchique, il érige l’arc de triomphe du Carrousel et entame la construction de l’Arc de triomphe de l’Étoile, qu’achèvera Louis-Philippe.

Il fait ériger la colonne Vendôme ou « colonne de la Grande Armée » sur le modèle de la colonne Trajane de Rome. Il entreprend la construction de la Bourse, fait jeter les ponts d’Austerlitz, de la Cité et d’Iéna, fait percer la rue de Rivoli, le long du Louvre, et la rue Napoléon, actuelle rue de la Paix. Il fait aussi creuser le canal de l’Ourcq et les canaux Saint-Martin et Saint-Denis. Enfin, il débarrasse les anciens ponts de Paris des maisons et échoppes qui occultent la vue sur le fleuve.

Les conditions de vie des classes populaires ne s’améliorent pas pour autant. C’est que, dans la première moitié du XIXe siècle, la capitale voit sa population croître rapidement avec l’amorce de la révolution industrielle. En 1846, à la fin de la monarchie de Juillet, elle atteint le million d’habitants dans l’ancienne enceinte des Fermiers Généraux.

Préfet de la Seine de 1833 à 1848, sous le règne de Louis-Philippe, le comte Claude-Philibert de Rambuteau entame la grande modernisation de la capitale. Accédant à sa fonction après la grande épidémie de choléra de 1832, il écrit au roi : « Dans la mission que Votre Majesté m’a confiée, je n’oublierai jamais que mon premier devoir est de donner aux Parisiens de l’eau, de l’air et de l’ombre. » Ainsi fait-il frapper d’alignement cinq cents maisons et initie un programme remodelant les quartiers anciens de la Cité. Il ouvre en particulier au nord des Halles une première voie de treize mètres de large qui portera plus tard son nom, la rue Rambuteau.

Il lance l’aménagement des Champs-Élysées, anciennement appelé Grand-Cours, entre l’obélisque de la Concorde et l’Arc de Triomphe de l’Étoile, ce nom de l’Étoile venant de ce que la butte était autrefois au croisement de plusieurs allées forestières empruntées par les chasseurs ! Rambuteau fait aussi reconstruire et agrandir l’Hôtel de Ville en respectant son style Renaissance.

Les chevaux de Marly et les Champs-Élysées au XIXe siècle et aujourd'hui (agrandissement), DR

La butte Montmartre

Haut lieu et bas fonds de Paris

Point culminant de la capitale française avec ses 130 mètres d’altitude, Montmartre attire les touristes du monde entier grâce à toutes sortes de séductions.

Ce vaste quartier, qui a été une commune indépendante jusqu’à son absorption par Paris en 1860, a connu au cours de l’histoire des vies bien différentes.

Celle des premiers siècles où il a recueilli les corps des martyrs parisiens, celle du Moyen Âge quand le mont était la propriété des Abbesses alors que les vignes s’étageaient le long de ses flancs et que l’église Saint-Pierre était leur chapelle conventuelle, celle de la Renaissance quand sont venus Ignace de Loyola et Francisco de Javier pour instaurer la Compagnie de Jésus, la chapelle du Martyrium qui les a vus prier existe toujours.

Et l’on peut parler aussi de la Commune de Paris, de la construction de la basilique du Sacré Cœur, de la demeure des peintres, des écrivains et de toutes sortes d’artistes, sans oublier sa grande époque celle des moulins et des cabarets s’étendant de 1860 à 1914.

François-Xavier Lenoir
Rue des Abbesses (Montmartre), Maurice Utrillo, vers 1912, huile sur toile, 46 x 64,5 cm, Kunstmuseum, Berne

Un martyr fondateur

Saint Denis à Montmartre (Paris), photo : François-Xavier LenoirSelon la tradition, Montmartre aurait été dédié à Mercure à l’époque romaine. Dès cette époque, son sous-sol est exploité pour en extraire le gypse et fabriquer le plâtre que l’on retrouve un peu partout à Paris.

Le mont entre dans l’histoire au IIIe siècle lors du martyre de saint Denis, premier évêque de Paris, et de deux de ses acolytes, le prêtre saint Éleuthère et le diacre saint Rustique.

On raconte que le saint évêque, après qu’il a été décapité sur le mont, transporta sa propre tête vers le nord avant de  s’effondrer enfin à l’emplacement de l’actuelle basilique Saint-Denis.

Une femme gallo-romaine du nom de Catulla ensevelit son corps sur le mont, devenu Mont des Martyrs, jusqu’à l’an 500 environ, avant qu’il ne soit transféré à Saint-Denys de la Chapelle puis à l’abbaye de Saint-Denis, ancêtre de la basilique des Rois.

Des Abbesses aux Jésuites

Les premiers occupants de Montmartre furent des moniales. C’est en effet en 1133 qu’une abbaye de Bénédictines est fondée au sommet du mont par Adélaïde de Savoie, épouse du roi Louis VI le Gros et nièce du pape Calixte II.

Église Saint-Pierre (Montmartre, Paris), photo : François-Xavier LenoirLe 21 avril 1147, le pape Eugène III, consacre solennellement l’église Saint-Pierre de Montmartre. À cette occasion, saint Bernard de Clairvaux remplit l’office de diacre et Pierre le Vénérable celui de sous-diacre. Excusez du peu ! Déjà les « people » honorent le lieu…

La colline abrite l’abbaye royale de Montmartre du XIIe siècle à la Révolution. Son rayonnement spirituel atteint son apogée au XVIe siècle. Les plus grands noms y sont attachés : les Bellefond, Rochechouart, la Tour d’Auvergne, Rochefoucauld… avec au total 46 abbesses.

Le roi Henri IV en personne coucha à l’Abbaye dans sa période de reconquête de la capitale (Montmartre était alors à l’extérieur de Paris), et l’on murmure que la mère supérieure, Claude de Beauvilliers, âgée de seulement 17 ans, ne fut pas insensible à ses avances.

Après avoir occupé le haut du mont, les abbesses décident de quitter les bâtiments partiellement brûlés lors d’un incendie en 1559 et tombant en ruine.

Elles construisent un nouveau couvent au pied du mont, à l’emplacement du Martyrium, près de l’endroit où se situe la station de métro qui porte leur nom, tout en conservant l’église Saint-Pierre qui leur sert de chapelle. Elles vont même jusqu’à créer une longue galerie voutée pour aller sans vicissitude d’une partie à l’autre.

La fondation de l'Ordre des Jésuites, tableau anonyme, église Saint-Pierre, Montmartre (Paris), photo : François-Xavier LenoirCe Martyrium est déjà un lieu de pèlerinage célèbre depuis le Haut Moyen Âge. Emplacement supposé du martyre de saint Denis, il a reçu bien des visiteurs illustres : Thomas Becket exilé en France, le jeune roi Charles VI guéri de son premier accès de folie, suivi de la cour entière en procession pieds nus depuis Notre-Dame, ou encore Jeanne d’Arc venue s’y recueillir à la veille du siège de Paris.

Le 15 août 1534, après une retraite de jeûne et de pénitence sur la colline, les futurs saints Ignace de Loyola et François-Xavier accompagnés de cinq autres compagnons se rendent à la chapelle du Martyrium, où ils vont jeter les bases de la Compagnie de Jésus.

Après la célébration d’une messe, ils prononcent au moment de la communion leur triple vœu de pauvreté, de chasteté et de mutuelle consécration au salut des âmes : l’ordre des Jésuites vient de naître.

Arrive la Révolution. L’abbaye est détruite en 1793 et la dernière supérieure, Marie-Louise de Montmorency-Laval, est guillotinée le 24 juillet 1794 (5 thermidor an II). Seules subsistent l’église Saint-Pierre du fait de sa vocation paroissiale et la chapelle du Martyrium. La butte Montmartre prend temporairement le nom de Mont-Marat !

La Conciergerie

Demeure royale et prison

La Conciergerie, sur l’île de la Cité, au cœur de Paris, est un lieu méconnu et pourtant le plus ancien lieu de pouvoir en France !

En ce lieu donc, à un endroit où la Seine était guéable, Clovis installe sa demeure royale – on n’ose dire palais – à la fin du Ve siècle. Le roi des Francs est le premier souverain à établir sa capitale à Paris. Il est à l’origine du prodigieux destin de la ville. À l’époque antérieure, dans la Gaule romaine, c’est Lyon qui était la capitale des Gaules, au croisement des trois provinces romaines.

Cinq siècles plus tard, en 987, après les désordres mérovingiens et l’épisode carolingien, le comte de Paris Hugues Capet est élu roi par ses pairs, les grands barons de Francie occidentale (on ne parle pas encore de la France). Naturellement, il se montre fidèle à la ville dont il est le comte et celle-ci va devenir sans discontinuer la capitale du royaume capétien.

Jean-Baptiste Camille Corot, La Conciergerie, 1830, Paris, musée Carnavalet. (Corot a laissé cette peinture inachevée, les journées de juillet l’ayant interrompu dans son travail.) L'agrandissement est une vue de la Conciergerie aujourd'hui.

Au cœur du Paris médiéval

Dans le palais de la Cité hérité de Clovis et de ses successeurs, Hugues Capet établit sa résidence principale et le siège du gouvernement, lequel se réduit à peu de chose.

Il faut attendre deux siècles et les règnes de Philippe Auguste et surtout son petit-fils saint Louis (Louis IX) pour que le palais devienne le haut lieu du pouvoir royal, à deux pas du pouvoir religieux représenté par la cathédrale Notre-Dame de Paris et l’évêché.

Louis IX faisant venir la couronne d'épine et la déposant à la Sainte-Chapelle. Miniature du Livre des faiz Monseigneur saint Loys jadis roy de France par Maître du Cardinal de Bourbon, vers 1480, Paris, BnF. L'agrandissement montre la eprésentation du palais royal dans les Très Riches Heures du duc de Berry, XVe siècle, où l'on aperçoit la façade de la Sainte-Chapelle avec sa rosace d'origine, Chantilly, musée de Condé.Saint Louis lance de grands travaux d’embellissement du palais et édifie en particulier la Sainte Chapelle. Il la destine à contenir les reliques du Christ (la Sainte Couronne…) et ainsi assurer le prestige universel de la ville.

Son petit-fils Philippe le Bel amorce la centralisation du pouvoir royal. Il poursuit l’agrandissement du palais et y établit le Parlement de Paris. Ne nous trompons pas : ce parlement-là n’a normalement aucun rôle politique ou représentatif ; c’est un tribunal qui rend la justice au nom du roi et va servir de tribunal d’appel pour toutes les juridictions du royaume.

Par cette dernière fonction, il va contribuer au fil des siècles à gommer les particularismes locaux et unifier le droit. Mais le Parlement de Paris se voit aussi confier le soin d’enregistrer et diffuse les ordonnances royales.

Les magistrats, dans les périodes d’affaiblissement de la monarchie, vont plus tard se servir de cette prérogative purement administrative, assimilable à un travail de secrétaire, pour s’octroyer un pouvoir politique. Il leur suffira en effet de refuser d’enregistrer une ordonnance pour que celle-ci ne puisse être appliquée. À chaque fois que cela se produira, le roi n’aura d’autre ressource que de tenir un « lit de justice », autrement dit de siéger solennellement en présence de tous les magistrats pour leur imposer l’enregistrement de l’ordonnance contentieuse.

De l’époque de Philippe le Bel, nous avons gardé une magnifique salle des Gens d’Armes. Construite en 1302, c’est le plus ancien monument civil d’architecture gothique de Paris. Parfaitement restaurée, elle est accessible aujourd’hui depuis le boulevard du Palais. Elle comporte quatre nefs voûtées d’ogives et, à l’origine, était éclairée par plusieurs baies géminées (fenêtres partagées en deux par une colonnette). Elle ouvre aussi sur des cuisines où étaient préparés les repas des personnels du roi. Ces cuisines avaient un accès direct sur la Seine et c’est par le fleuve, en bateau, qu’elles étaient approvisionnées.

Conciergerie. Salle des Gens d'Armes suivie de la salle des Gardes.

La salle des Gens d’Armes est prolongée à l’ouest par une salle des Gardes. C’est l’antichambre par laquelle on montait à la Grand-Chambre, une salle ouverte sur la Seine et aujourd’hui disparue. C’est là que siégeait le Parlement et que le roi tenait ses lits de justice. C’est là aussi que beaucoup plus tard, sous la Révolution, en 1793, s’installera le Tribunal révolutionnaire…

Après les règnes successifs des trois fils de Philippe le Bel (les « Rois maudits »), un cousin monte sur le trône sous le nom de Philippe VI et inaugure la dynastie des Valois, branche cadette des Capétiens directs. C’est aussi le début d’un long conflit avec les Anglais et les Bourguignons, la « guerre de Cent Ans ». Le royaume, qui est déjà le plus puissant de la chrétienté (l’Europe occidentale), bénéficie d’une longue embellie sous le règne de Charles V le Sage, petit-fils de Philippe VI.

Le palais de la Cité en arrive à compter deux mille personnes, soldats de la garde, clercs, officiers (fonctionnaires) et domestiques au service du roi et de ses proches. C’est l’amorce de la cour royale. Mais le roi lui-même commence à s’y sentir à l’étroit. Charles V transfère sa résidence sur la rive droite de la Seine, à l’hôtel Saint-Pol, au coeur du Marais, près de la Bastille.

La Sainte-Chapelle et la Chambre des comptes dans la cour du Palais, Adam Pérelle, vers 1660, Paris, musée Carnavalet. Vue de l'intérieure de la Sainte-Chapelle aujourd'hui lors de l'agrandissement.

Le roi fait ériger aussi dans la forêt de Vincennes, près de l’ancien manoir de saint Louis, un superbe donjon, le plus haut d’Europe, où il dispose de tout le confort de l’époque (très relatif), avec une bibliothèque, une salle du Trésor etc. Il réside aussi dans le donjon du Louvre, à un jet de pierre du palais de la Cité. Cette forteresse a été construite par son lointain aïeul Philippe Auguste pour défendre Paris contre les Plantagenêts.

Les magistrats du Parlement de Paris demeurent toutefois au palais de la Cité, ainsi que la cour des Comptes et la chancellerie. Le palais est placé sous la tutelle d’un intendant ou « Concierge », d’où le nom de Conciergerie désormais donné à ce lieu. Le Concierge, doté de pouvoirs de justice, administre le palais et la prison attenante.

La prison avait un bourreau, habituellement surnommé « Monsieur de Paris », et une salle de torture. Celle-ci était située à l’ouest de l’île, sur la Seine, à l’étage inférieur de la Tournelle, une tour qui doit son nom à un tribunal criminel où les magistrats siégeaient à tour de rôle. Elle est aussi connue sous le nom de tour Bonbec. D’aucuns y voient une allusion à ce que les prévenus, quand ils étaient torturés, parlaient d’abondance. Ils avaient « bon bec » !

Deux vues de l'entrée intérieure de la prison de la Conciergerie vers 1830, Lithographies par Alphonse Urruty d'après des dessins de Collard, Criminocorpus, premier musée numérique dédié à l’histoire de la justice, des crimes et des peines.

Une prison de sulfureuse réputation

En 1776, sous le règne de Louis XVI, un incendie ravage la Cité, en épargnant heureusement la salle des Gens d’Armes et surtout la Sainte Chapelle, joyau de l’art gothique. L’ensemble est reconstruit en style néo-classique avec, sur le boulevard du Palais qui traverse l’île de la Cité, une somptueuse grille en fer forgé qui ouvre sur la cour et la façade à colonnades du palais de Justice, laissant à sa droite la partie médiévale, la Conciergerie proprement dite.

L'intérieur d'une cellule de la prison de la Conciergerie vers 1830. L'agrandissement pntre une vue du préau des hommes, Lithographies par Alphonse Urruty d'après des dessins de Collard, Criminocorpus, premier musée numérique dédié à l’histoire de la justice, des crimes et des peines. Arrive la Révolution ! Le parlement de Paris est supprimé tout comme les parlements provinciaux. Le palais de la Cité passe sous l’autorité de la Mairie de Paris mais conserve les instances judiciaires et une prison. Et l’on a vu qu’en 1793, le nouveau Tribunal révolutionnaire s’installe dans la salle de l’ancien Parlement.

La prison de la Conciergerie est pour sa part aménagée pour accueillir les prévenus en attente de jugement dont le nombre croît soudainement. Une salle conserve les noms des 4 000 personnes qui furent jugées ici par le Tribunal révolutionnaire de 1793 à 1795.

La plus célèbre de ces personnes est une femme, la reine Marie-Antoinette. Elle y séjourna exceptionnellement 76 jours. Étroitement surveillée, avec un garde en permanence dans sa chambre, elle fut changée de cellule suite à la découverte d’un complot visant à la faire évader, le « complot de l’oeillet ». C’est de la Conciergerie qu’elle partit le 17 octobre 1793 pour son dernier voyage vers la guillotine, installée sur la place de la Révolution, aujourd’hui place de la Concorde.

Source: https://www.herodote.net/

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