
Des partisans de Pékin, à Hong Kong, célèbrent l’adoption de la loi sur la sécurité nationale. Photo : Getty Images / Anthony Kwan
La Chine a adopté mardi une loi controversée sur la sécurité nationale à Hong Kong, perçue par ses détracteurs comme une manière de museler l’opposition dans le territoire autonome. Le président Xi Jinping l’a promulguée quelques heures plus tard.
Ignorant les appels des Occidentaux, le Parlement national a voté à l’unanimité ce texte qui intervient un an après le début des manifestations monstres dans l’ex-colonie britannique contre l’influence du gouvernement central.
Elle entre en vigueur dès mardi, a précisé la cheffe de l’exécutif hongkongais pro-Pékin Carrie Lam.
Échaudé par ces événements, Pékin aura imposé en quelques semaines cette loi qui contourne le conseil législatif local et fait craindre à l’opposition hongkongaise un recul inédit des libertés depuis la rétrocession de Hong Kong à la Chine en 1997.
Pour le gouvernement central, il s’agit avec cette loi d’assurer la stabilité, de mettre fin au vandalisme ayant émaillé les manifestations de 2019 dans la ville de 7,5 millions d’habitants, ainsi que d’y réprimer le courant pro-indépendance.
Cette loi sera un glaive suspendu au-dessus de la tête des membres de la petite minorité qui menace la sécurité nationale.
Pour l’opposition prodémocratie de Hong Kong et pour plusieurs pays occidentaux, dont le Canada et les États-Unis, cette loi constitue une attaque contre l’autonomie et les libertés du territoire.
Difficile pour l’heure de connaître les réelles conséquences du texte : son contenu précis n’a pas encore été publié.
Le fait que les habitants de Hong Kong ne sauront qu’après coup ce que contient réellement cette nouvelle loi est véritablement absurde
, a dénoncé Claudia Mo, une parlementaire locale d’opposition.
L’agence de presse officielle Chine nouvelle en avait toutefois donné en juin les grandes lignes, affirmant que la loi entend réprimer le séparatisme
, le terrorisme
, la subversion
et la collusion avec des forces extérieures et étrangères
.
Un organe de sécurité nationale
, relevant directement du gouvernement central, devrait par ailleurs être institué à Hong Kong, ce qui serait une première. Il serait chargé de collecter des informations et de poursuivre les crimes contre la sécurité nationale.
Grave atteinte
à l’autonomie de Hong Kong
L’idée de confier à un organisme du pouvoir chinois des prérogatives dans le territoire autonome inquiète fortement l’opposition locale, car la séparation des pouvoirs n’existe pas en Chine continentale, dirigée par le PCC.
Cela marque la fin de Hong Kong tel que le monde la connaissait. Avec des pouvoirs étendus et une loi mal définie, la ville se transformera en un « État de police secrète ».
Le parti politique Demosisto, que Joshua Wong a fondé avec d’autres militants en 2014, a annoncé mardi sa dissolution. Cette formation appelait notamment à l’autodétermination du territoire, une position qui pouvait tomber sous le coup de la nouvelle loi.
Depuis sa rétrocession, Hong Kong jouit d’une large autonomie par rapport à la Chine continentale, en vertu du principe un pays, deux systèmes
.
Les Hongkongais bénéficient ainsi de la liberté d’expression, de la liberté de la presse et d’une justice indépendante.
L’Union européenne (UE) a déploré
mardi l’adoption du texte.
Cette loi risque de porter gravement atteinte au degré élevé d’autonomie de Hong Kong et d’avoir un effet préjudiciable sur l’indépendance du pouvoir judiciaire et de l’État de droit.
Les ministres des Affaires étrangères du G7 (Canada, États-Unis, Royaume-Uni, France, Allemagne, Italie et Japon) avaient également appelé Pékin à revenir sur ce projet.
Anticipant le vote, Washington avait annoncé lundi la fin des ventes d’équipement de défense sensible à Hong Kong pour éviter qu’il tombe aux mains
de l’armée chinoise. Pékin a promis mardi des représailles
.
Les États-Unis ont déjà décrété dès la semaine dernière des restrictions de visas pour les responsables chinois accusés de remettre en cause
l’autonomie du territoire. La Chine a répliqué avec une mesure similaire visant les Américains s’étant mal comportés
en critiquant la loi.
Carrie Lam a fustigé les pressions occidentales dans un message vidéo diffusé lors d’une session du Conseil des droits de la personne de l’ONU :
J’exhorte la communauté internationale à respecter le droit de notre pays à garantir la sécurité nationale et les aspirations à la stabilité et à l’harmonie de la population de Hong Kong.
Quelle sera la réaction des Hongkongais après le vote du texte? Des manifestations d’ampleur semblent à première vue difficiles à organiser : les autorités de Hong Kong interdisent toujours les rassemblements de plus de 50 personnes en raison de l’épidémie de COVID-19.