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Alors qu’il est accusé de viol, Gérald Darmanin a été nommé place Beauvau. Une promotion qu’Emmanuel Macron risque de payer cher.
« Je ne comprends pas cette polémique. » Cette petite phrase de Bruno Le Maire, ministre de l’Economie, résume le gouffre qui sépare le pouvoir de toutes celles et tous ceux qui manifestent contre la promotion de l’ex-ministre de l’Action et des Comptes publics à la place Beauvau. Pour comprendre, il faut d’abord écouter.
Certes, Gérald Darmanin est présumé innocent, il n’est même pas mis en examen, et certaines pancartes brandies dans les défilés (« Un violeur à l’Intérieur, un complice à la Justice ») ne respectent ni ce principe ni l’homme qu’elles visent. Mais la présomption d’innocence n’est pas le cœur de l’affaire.
En 2009, Gérald Darmanin a demandé à une femme des rapports sexuels en échange de la promesse d’intervenir auprès du ministère de la Justice pour faire effacer le casier judiciaire de celle-ci. Son avocat ne nie pas ces faits mais la qualification de « viol ». Une information judiciaire a été ouverte, un juge a prononcé un non-lieu, il y a eu appel, l’enquête a été rouverte en juin. A moins que les juges ne s’en chargent eux-mêmes, des policiers peuvent donc être amenés à interroger le ministre… sous les ordres duquel ils sont désormais placés. Une situation pour le moins inhabituelle et qui a choqué la presse internationale.
« Premier flic de France »
L’enquête en cours « n’a pas fait obstacle » à la nomination de Darmanin, dit l’Elysée. Pour ceux qui manifestent, elle aurait dû. Car quel message est envoyé aux femmes victimes d’abus, qui hésitent déjà souvent à se rendre au commissariat, quand le « premier flic de France » fait lui-même l’objet d’une enquête ? Après la vague #Metoo, qui a mis au jour une tolérance aux violences sexuelles indigne de nos sociétés, le pouvoir se doit d’être exemplaire. Emmanuel Macron, qui plaide régulièrement pour l’égalité hommes-femmes, n’a manifestement pas choisi cette voie. D’autant que d’autres signaux envoyés lors du remaniement trahissent une indifférence à la cause de #Metoo. La nomination d’Eric Dupond-Moretti, qui n’est pas le plus grand des féministes, au poste de garde des Sceaux, en fait partie.