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Allemagne, extrême droite, le virus brun, manifestation anti-corona, néonazis, Reichstag
Rassemblés pour contester les mesures de prévention de la pandémie de COVID-19, des manifestants berlinois affiliés à l’extrême droite ont tenté de s’introduire dans l’édifice où siègent les députés allemands. Photo : Reuters / Christian Mang
Agence France-PressePublié
Plusieurs dirigeants allemands ont dénoncé dimanche une « atteinte à la démocratie » après une tentative de prise d’assaut du parlement national lors d’une manifestation « anti-corona » qui a marqué une nouvelle étape dans la radicalisation du mouvement.
Les images samedi soir montrant plusieurs centaines de protestataires forcer un barrage de police pour monter sur les marches du Reichstag à Berlin, où siègent les députés, et tenter d’y pénétrer, ont créé une onde de choc en Allemagne.
Cet incident a été le point d’orgue d’une manifestation d’anti-masques
qui a rassemblé près de 40 000 personnes protestant contre les restrictions liées à la pandémie de COVID-19 et s’est soldée par environ 300 interpellations lors d’échauffourées avec la police.
Le président allemand Frank-Walter Steinmeier s’est élevé contre une attaque insupportable visant le cœur de notre démocratie
. Il a dénoncé les outrances d’extrême droite
ainsi que les drapeaux du Reich
allemand aux couleurs noire, blanche et rouge brandis par les manifestants, en souvenir de l’Empire ayant disparu en 1919 après la Première Guerre mondiale.
Nous n’accepterons jamais cela
, a ajouté M. Steinmeier, considéré comme la caution morale du pays.
Environ 300 personnes ont été interpellées lors d’affrontements avec les forces de l’ordre.Photo : Reuters / Christian Mang
La ministre de la Justice, Christina Lambrecht, a appelé elle à se défendre contre ces ennemis de notre démocratie
, alors qu’un débat est lancé sur l’opportunité de continuer à autoriser ce type de manifestations.
L’image insupportable de néonazis devant le Reichstag […] ne peut pas se répéter
, a-t-elle dit au groupe de presse régionale Funke, tandis que son collègue de l’Intérieur Horst Seehofer a parlé d’un dérapage inacceptable
visant le centre symbolique de notre démocratie
.
Les manifestants ont été empêchés de justesse, samedi soir, de pénétrer dans l’enceinte du bâtiment par les forces de l’ordre, qui ont utilisé du poivre pour disperser la foule et interpellé plusieurs personnes.
La police a paru un moment débordée, avec seulement une poignée d’agents tentant de bloquer la foule.
Elle a à nouveau mobilisé un important dispositif dimanche, car environ 2000 protestataires se sont à nouveau rassemblés non loin du Reichstag, d’abord près de la Colonne de la Victoire, un grand carrefour du centre-ville, puis Porte de Brandebourg, à deux pas du parlement.
Ils en ont été rapidement délogés par la police, qui a indiqué avoir procédé à plusieurs contrôles d’identité
.
Des groupes de manifestants hétéroclites
Le Reichstag, où se réunissent les députés allemands en session plénière, a une forte charge symbolique en Allemagne.
Le bâtiment et sa célèbre coupole avaient été incendiés en 1933 par les nazis, dans un acte perçu comme destiné à mettre à genoux ce qui restait de la démocratie allemande de l’entre-deux-guerres.
La municipalité de Berlin avait tenté d’interdire le rassemblement de samedi, en arguant de l’impossibilité de faire respecter les distances de sécurité et gestes barrière, vu le nombre de personnes annoncées et leur détermination. Mais la justice, saisie par les organisateurs, a finalement autorisé la manifestation.
Les personnes interpellées l’ont été devant le Reichstag, mais aussi l’ambassade de Russie, non loin de là en plein centre-ville, où les protestataires ont jeté bouteilles et pierres sur les forces de l’ordre.
La radicalisation en Allemagne du mouvement « anti-masques » face à la pandémie de Covid-19 inquiète les autorités.Photo : Reuters / Christian Mang
Les protestataires s’étaient réunis pour dénoncer les mesures imposées en raison de la pandémie de nouveau coronavirus, comme le port du masque ou les distances de sécurité à respecter, qu’ils perçoivent comme une atteinte à leurs libertés.
Plusieurs autres rassemblements similaires, mais moins importants, ont eu lieu en Europe, en Grande-Bretagne, en France ou en Autriche.
Celui de Berlin est intervenu deux jours après l’annonce par le gouvernement d’Angela Merkel de nouvelles restrictions face à la recrudescence observée des infections.
La foule était comme souvent dans ce type de rassemblements hétéroclite composée de militants anti-vaccin, de complotistes, de citoyens authentiquement préoccupés par les restrictions liées à la pandémie, mais aussi, et de plus en plus selon les autorités, de sympathisants d’extrême droite.
Malgré les tentatives de la municipalité de Berlin d’interdire le rassemblement, la justice a finalement autorisé la manifestation.Photo : Reuters / Christian Mang
Il faut stopper le virus brun!
, titre dimanche Bild, journal le plus lu d’Allemagne.
Voir des drapeaux de l’Empire devant le Parlement est une honte
, a tweeté le ministre des Affaires étrangères, Heiko Maas.
Si le droit de manifester doit être défendu, personne ne devrait aller jusqu’à défiler derrière les extrémistes de droite
, a-t-il ajouté.