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Guillaume Bigot déplore l’américanisation des élites françaises, qu’elles soient intellectuelle, politique ou médiatique.
Par Guillaume Bigot, directeur général d’une école supérieure de commerce, éditorialiste sur CNews, auteur de La Populophobie, le gouvernement de l’élite, par l’élite et pour l’élite (Plon).
L’américanisation des élites en France est impressionnante.
Lilian Thuram sort un livre intitulé «la pensée blanche.» Le champion de 1998 importe une grille de lecture raciale des États-Unis.
Amélie de Montchalin annonce la création de «voies d’accès» spécifiques pour les candidats issus de zones géographiques défavorisées. La Ministre de la fonction publique importe la discrimination positive des États-Unis.
Lorsque l’on met bout à bout ses innombrables manifestations, l’ampleur de l’américanisation des esprits est impressionnante. Comme Thuram, comme Montchalin, l’immense majorité des célébrités, des élus, des chefs d’entreprises et des journalistes passent leur temps à copier l’Amérique.
On se souvient de la complaisance médiatique à l’égard de la récupération par Assa Traoré de l’assassinat de Georges Floyd. Personne n’a oublié Christophe Castaner envisageant de mettre un genou à terre par solidarité avec «Black Live matter».
Dans son discours sur le séparatisme, Emmanuel Macron a lui-même dénoncé l’importation dans de modes intellectuelles américaines.
Dans son discours sur le séparatisme, Emmanuel Macron a lui-même dénoncé l’importation dans de modes intellectuelles américaines. Dans nos universités, on ouvre des départements de gender studies, de black studies et l’on se forme au décolonialisme. La France d’en haut est mobilisée pour promouvoir les personnes dites racisées, genrées ou non binaires.
Ô preuve que le communautarisme américain a conquis les conseils d’administration, les états-majors du CAC 40 appliquent des politique de quotas. Les entreprises, pardon le monde corporate adopte l’américano-globish comme langue officielle avec leurs chiefs happiness officer, leurs incentives, leurs Kpis et l’empowerment de leurs cadres.
Nos féministes singent l’Amérique avec la même application. Adèle Haenel s’est inspirée des vierges effarouchés d’Hollywood, transformant les Césars en remake des Oscars, Polanski jouant le rôle du vilain Weinstein, l’horrible mâle blanc hétérosexuel. On se souvient aussi de l’indignation de Marlène Schiappa dénonçant le mainsplanning d’un Jean-Claude Van Damne. La Ministre vante le name and shame, le nommer et dénoncer sur les réseaux sociaux. Victime de cette odieuse pratique importée des «States», Benjamin Griveaux devra se retirer de la course à la mairie de Paris. Dommage, il était en train de vendre aux habitants de la capitale son projet de…Central Park!
Traditionnellement en France, on ne parlait pas de la vie privée et encore moins sexuelle des dirigeants. La pression du puritano-exhibitionisme made in USA a fait sauter cette digue.
Dorénavant, nos chefs d’État se promènent en couple chez Mickey ou font du scooter des mers confirmant ainsi qu’ils tendent à devenir des «pipoles» comme les autres. Nos Ministres sont castés à l’américaine, sur leur capacité à incarner l’émotion et à débiter leur story telling. Les idées s’effacent complètement.
L’américanisation de notre vie publique a consacré le gouvernement des juges.
Les partis politiques se vident de leur substance. Des helpers remplacent les militants et assurent la promotion de programmes attrape tout (qui différent aussi peu les uns des autres que Coca de Pepsi). L’objectif de ces machines électorales est d’organiser des primaires comme aux USA. Le nominé, s’il gagne la présidentielle, effectuera un quinquennat comme son «rôle modèle» de la Maison blanche. Sarkozy, l’Américain, avait proposé d’aller au bout de cette logique en supprimant le poste de Premier ministre. En arrivant à l’Élysée, Emmanuel Macron s’est inspiré du spoil system étatsunien, en remplaçant des directeurs d’administration pour placer ses hommes. Il veut imiter le discours sur l’état de l’union en s’adressant chaque année au Congrès à Versailles comme à Washington. Le Conseil constitutionnel se prend pour la Cour suprême. Comme dans les séries américaines, tout le monde menace tout le monde de procès. Les élus tremblent à l’idée d’être mis en examen. L’américanisation de notre vie publique a consacré le gouvernement des juges.
La majeure partie de nos élites pourrait dire avec Jean-Claude Trichet, l’ancien gouverneur de la BCE: «I am not a frenchman.» Notre pays n’est donc pas seulement menacé par un «séparatisme d’en bas», celui de l’islam radical, mais aussi par un «séparatisme d’en haut», de la part de la classe dirigeante. Comme il existe des franchouillards, nos élites sont des américanouillards. Karl Marx a forgé un terme qui éclaire la psychologie de nos dirigeants: l’aliénation. L’aliénation c’est le comportement de l’esclave qui est tellement soumis qu’il a perdu son identité. Il est temps que la France redevienne elle-même.