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Mathieu Bock-Côté

C’est une langue belle, dit la chanson de notre langue française, et elle a bien raison.

Depuis quelques semaines, nous renouons avec une évidence : elle est en péril au Québec, son dernier bastion nord-américain. C’est sur ce terrain qu’il nous faut nous battre, et partir politiquement et culturellement à la reconquête de la grande région de Montréal, avant qu’elle ne se sépare mentalement du reste du Québec. 

André Belleau disait magnifiquement que nous n’avons pas besoin de parler français, mais du français pour parler. Notre noyau existentiel est intimement connecté à cette langue, à son histoire, aux combats menés pour la défendre et l’affirmer.

Français 

La formule semblera étrange, mais nous devons la voir comme un trésor. Si je m’exaspère contre les anglicismes et plus encore, contre le franglais, je n’ai rien contre le français québécois. 

Comme tout le monde, de ce côté de l’Atlantique, lorsque je rage ou que je peste, je ne dis pas putain ou bordel, mais baptême ou ciboire (ou d’autres mots d’église). Et j’aime certains mots et certaines expressions qui nous appartiennent. Astheure ! Ah ben gadons ! Il me plaît aussi de traiter un vieil imbécile qui me houspille de vieil épais ! 

Une chose nous manque toutefois, je le crains : la passion du mot juste, du terme exact qui parvient à cerner un sentiment, une émotion, une idée, une situation. 

Exactitude

Trop de mots sont remplacés au quotidien par des termes comme patente, chose, machin et ainsi de suite. Non seulement sommes-nous trop hésitants lorsque nous parlons, mais plus encore, nous confondons la recherche du mot exact avec du snobisme fondé sur le culte du mot compliqué. 

Terrible erreur. De là notre nécessaire réconciliation avec les grands classiques de la littérature, qui enchantent l’esprit, et nous permettent de mieux nommer le monde – c’est-à-dire de mieux le comprendre et le goûter. 

JDQ