Étiquettes

,

Irresponsables, égoïstes, ignares… tous les qualificatifs sont bons pour dénigrer les citoyens opposés à l’extension du passe sanitaire. Pourtant, au-delà des amalgames, beaucoup émettent des critiques légitimes vis-à-vis du modèle de société qui semble se dessiner.

Passe sanitaire : « l’ennemi est bête…»

Francine GIROND, Editrice

Alors que la mobilisation des citoyens français revendiquant la défense de nos libertés individuelles et s’opposant clairement à la généralisation du passe sanitaire comme au licenciement des salariés récalcitrant — en particulier des « soignants », espèce en voie de disparition tant applaudie lors de notre seul rendez-vous social de pauvres confinés — ne cesse de croître à longueur d’émissions sur les chaînes d’info, les élus, les journalistes, les médecins et les malins qui ont compris qu’ils pouvaient occuper le terrain médiatique pendant les vacances, tous pro-passe, se livrent à une double manipulation :

● Confondre sciemment « anti-passe » et « anti-vaccin », alors que la moitié des manifestants est majeure et vaccinée.

● Rétorquer de manière perverse et insidieuse, l’argument qui n’est pas présenté comme tel : « il faut faire de la pé-da-go-gie… »

Parce qu’ils sont forcément dans le camp du Bien, le camp qui se prépare d’ailleurs à une réélection ; le camp qui sait, le camp qui dit ; le camp qui méprise et qui ventile ; le camp dont la superbe ne s’abaisse pas au débat. Parce que ceux (et pas « celles et ceux », par respect pour la langue française…) qui manifestent contre le passe, qui refusent à titre personnel les vaccins actuellement accessibles, qui ne refuseront peut-être pas le vaccin de Sanofi, qui rêvent peut-être de recevoir le même que Poutine, qui s’insurgent contre une obligation qui ne dit pas son nom et qui pose des problèmes éthiques, sont forcément ignares… en plus d’être « égoïstes », comme l’affirme le président Macron, joliment agrémenté ces temps-ci de fleurs d’hibiscus.

Celui qui conteste est donc bête, puisque « nous le convaincrons en faisant de la pédagogie ». Nous amènerons cet enfant — donc irresponsable, sauf quand il faut le vacciner — là où nous avons décidé qu’il faudra qu’il soit, quoi qu’il en coûte, pour sa santé physique et mentale, pour son avenir, pour l’avenir de ce qui est profondément constitutif de notre société. En refermant ainsi la discussion en une posture supérieure et infantilisante, on évite non seulement le débat, mais aussi la remise en question et la responsabilité a posteriori.

Mais toutes ces personnes bardées de certitudes ou de projets électoraux ont-elles réalisé que nombre d’opposants n’avaient pas besoin de cette généreuse pédagogie ? Qu’aide-soignants, infirmiers, médecins, fonctionnaires, entrepreneurs et même éditeurs s’opposaient peut-être en conscience ? Avec des doutes, des informations, des raisonnements, des expériences, des corrélations, des échanges pertinents ?

Le député Joachim Son-Forget (ex-LREM) et le sénateur Houpert (LR), tous deux radiologues, qui se sont opposés à ce projet de loi par des arguments de fond à l’Assemblée nationale comme à la chambre haute, n’ont pas besoin de pédagogie. Il n’est même pas certain que le professeur Jean-Michel Claverie, co-fondateur de la Société française de virologie, qui a évoqué un « mensonge  d’État » sur BFM (!), démonstration à l’appui, soit vraiment dans une grande attente de pédagogie… Méditons sur les mots de Pierre Desproges : « L’ennemi est bête : il croit que c’est nous l’ennemi alors que c’est lui ! »… un peu d’humilité ne nuira à personne, même à ceux qui savent tout !

Front Populaire