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Des manifestants se sont rassemblés à Paris, jeudi 5 août, en réaction à la décision du Conseil constitutionnel de valider l’extension du passe sanitaire ainsi que la vaccination obligatoire pour les soignants.

Le Monde avec AFP

Plusieurs appels ont déjà été lancés pour manifester de nouveau samedi à travers la France contre le passe sanitaire.
Plusieurs appels ont déjà été lancés pour manifester de nouveau samedi à travers la France contre le passe sanitaire. STEPHANE DE SAKUTIN / AFP

Plusieurs centaines de manifestants se sont rassemblés, jeudi 5 août en début de soirée, devant le Conseil d’Etat à Paris, à proximité du Conseil constitutionnel, en réaction à la décision de ce dernier de valider l’extension du passe sanitaire aux cafés-restaurants et à certains centres commerciaux, ainsi que la vaccination obligatoire pour les soignants.

Ils scandaient, face aux policiers des CRS présents, les slogans « Liberté, liberté ! » ou « Macron, ton passe on n’en veut pas ! », a constaté un journaliste de l’Agence France-Presse (AFP). Parmi eux se trouvaient de nombreux « gilets jaunes », tel Jérôme Rodrigues, figure du mouvement, éborgné par un tir de grenade lors d’une manifestation en 2019.

« Tout ça porte atteinte aux libertés fondamentales et à la liberté d’aller et venir. La liberté, c’est d’abord le choix de se faire vacciner ou non. On est en train de basculer dans un Etat autoritaire », a estimé Marie José Libeiro, une manifestante de 48 ans. « S’il faut présenter un papier pour être libre… je considère que ce n’est pas ça, la liberté », a-t-elle ajouté.

« Je suis dépitée. On a le droit de choisir ce qui est bon pour notre santé : c’est notre corps ! Pour moi, on est rentrés en dictature. Faut pas croire que ça va s’arrêter aux soignants », a lancé une manifestante, Nathalie, 48 ans, agente administrative hospitalière.

Une centaine de manifestants avaient attendu toute la journée la décision des juges devant le Conseil constitutionnel, au Palais-Royal à Paris, et avaient accueilli par des huées la validation de l’essentiel de la loi sur le passe sanitaire. Puis leur nombre a grossi quand un cortège les a rejoints avant d’aller devant le Conseil d’Etat.

Plusieurs appels ont déjà été lancés pour manifester de nouveau samedi à travers la France. Le week-end dernier, la protestation contre le passe sanitaire avait réuni plus de 200 000 personnes, selon les chiffres du ministère de l’intérieur.

Mesure emblématique et controversée du projet de loi visant à contrer l’épidémie de Covid-19, le passe sanitaire (vaccination totale, test Covid-19 négatif ou certificat de rétablissement) va être étendu, a priori dès lundi, aux cafés, restaurants, avions, trains et autocars pour les longs trajets, ainsi qu’aux foires, séminaires et salons professionnels.

« Manque de courage »

Le Conseil constitutionnel a aussi censuré les dispositions du texte prévoyant qu’un CDD ou un contrat d’intérim puisse être rompu « avant son terme » par l’employeur faute de passe sanitaire. En revanche, l’institution a validé la procédure de suspension du contrat de travail sans rémunération pour les salariés en CDI.

Dans un communiqué, la Confédération générale du travail (CGT) dénonce « le manque de courage » des juges constitutionnels qui octroient « de nouveaux pouvoirs disciplinaires aux employeurs et autorise[nt] dorénavant la discrimination sur la base de l’état de santé des salariés »« En ne censurant que la partie relative à la rupture anticipée de certains contrats de travail, plus particulièrement les contrats à durée déterminée et les contrats d’intérim, [ils] portent un nouveau coup aux droits des salariés », estime la centrale syndicale.

Avec cette procédure de suspension sans rémunération pour les salariés en CDI, ces derniers « se retrouveront sine die sans revenus, sans droits sociaux et sans possibilité de trouver un emploi ailleurs », poursuit la CGT, pointant « une sanction totalement inédite et disproportionnée ».

Le syndicat Force ouvrière note pour sa part que le Conseil constitutionnel « met en avant l’impératif de santé publique pour valider globalement la loi instaurant la vaccination obligatoire pour certaines catégories de salariés et le passe sanitaire ». Si le syndicat estime que la protection « de la santé de la population, des salariés en particulier » passe aujourd’hui par la vaccination, il juge la méthode retenue par le gouvernement « contestable ».

Une décision « très décevante »

De son côté, le premier ministre Jean Castex s’est félicité dans un communiqué des décisions du Conseil constitutionnel. Cela « permettra le plein déploiement de la stratégie de lutte contre la Covid-19 », selon lui. Le chef du gouvernement a par ailleurs déclaré « prendre acte » de l’annulation par les juges constitutionnels de la disposition prévoyant une obligation d’isolement pour les personnes ayant fait l’objet d’un diagnostic positif.

Dans une vidéo tournée à Brégançon, Emmanuel Macron a défendu le passe sanitaire contre ceux qui y voient une atteinte à leur liberté, faisant une comparaison avec l’alcool au volant. « On l’a bien accepté quand il s’agissait de boire et de conduire. En société, la liberté ne se conjugue pas au singulier. Notre liberté à chacun n’existe que si on protège les autres et si on respecte la liberté des autres », a-t-il insisté. Le passe sanitaire, « c’est la liberté responsable ».

Le ministre de la santé Olivier Véran a quant à lui assuré que « personne ne sera[it] privé de soins en fonction du passe sanitaire ». « Jamais nous n’arrêterons de soigner qui que ce soit », a-t-il déclaré. Le Conseil constitutionnel a également validé l’obligation du passe sanitaire pour les visiteurs et les patients non urgents dans les établissements de santé et maisons de retraite tant que ce dernier ne fait pas « obstacle à l’accès aux soins ».

Cette décision a déclenché une salve de critiques de la part des opposants, en particulier à l’extrême droite et à l’extrême gauche, sur fond de nouvelles manifestations prévues samedi.