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AFP

C’est une première judiciaire concernant la gestion gouvernementale de l’épidémie de Covid-19. L’ex-ministre de la santé Agnès Buzyn a été mise en examen vendredi 10 septembre pour « mise en danger de la vie d’autrui » à l’issue de son audition par des magistrats de la Cour de justice de la République (CJR), qui enquête sur la gestion de l’épidémie de Covid-19, a-t-on appris du parquet général de la CJR.

Première personnalité à être mise en cause dans ce vaste dossier, Mme Buzyn a par ailleurs été placée sous le statut plus favorable de témoin assisté pour « abstention volontaire de combattre un sinistre », a précisé la même source.

La mise en examen de Mme Buzyn est la première dans ce vaste dossier consacré à la manière – critiquée encore aujourd’hui – dont les autorités françaises ont anticipé, puis géré quotidiennement, l’épidémie de Covid-19, qui a fait au moins 115 000 morts dans le pays, selon Santé publique France.

Mais quelques jours après sa défaite électorale, alors que la France se confinait, elle provoquait un tollé en disant dans Le Monde du 17 mars 2020 : « Quand j’ai quitté le ministère, je pleurais parce que je savais que la vague du tsunami était devant nous. » « Depuis le début je ne pensais qu’à une seule chose : au coronavirus. On aurait dû tout arrêter, c’était une mascarade », avait-elle encore dit au Monde, au sujet du processus électoral.

Des propos confirmés en juin 2020 devant la commission d’enquête de l’Assemblée nationale sur la gestion de la crise sanitaire : elle avait expliqué avoir alerté l’Elysée et Matignon en janvier sur le « danger » potentiel du coronavirus.

Depuis, la CJR, seule institution habilitée à juger des ministres en exercice, a reçu de nombreuses plaintes liées au Covid-19, « 14 500 », selon le procureur général près la Cour de cassation, François Molins, mercredi.

Manque d’équipements de protection pour les soignants et pour la population, errements sur la nécessité ou non de porter des masques, etc. Neuf de ces plaintes ont été jugées recevables par la commission des requêtes de la CJR, qui fait office de filtre, et ont permis l’ouverture d’une enquête en juillet 2020.

Depuis, d’autres plaintes ont été jugées recevables et jointes à l’enquête, tandis que des perquisitions ont été menées à la mi-octobre 2020 par les enquêteurs de l’Oclaesp (Office central de lutte contre les atteintes à l’environnement et à la santé publique) et de l’Oclciff (Office central de lutte contre la corruption et les infractions financières et fiscales).

Ces perquisitions ont visé les domiciles et bureaux du ministre de la santé, Olivier Véran, de l’ex-premier ministre Edouard Philippe, de Mme Buzyn et d’une autre ancienne membre du gouvernement, Sibeth Ndiaye, mais aussi du directeur général de la santé, Jérôme Salomon, et de la directrice générale de Santé publique France, Geneviève Chêne.

La commission d’instruction de la CJR a ouvert son enquête sur l’infraction d’« abstention de combattre un sinistre ».

Ce développement majeur pourrait être suivi par d’autres convocations visant des membres actuels ou passés de l’exécutif, parmi lesquels Olivier Véran ou Edouard Philippe, et avoir d’importantes conséquences politiques pour la majorité alors qu’Emmanuel Macron pourrait briguer sa réélection au printemps 2022.