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par Julien G.
L’idée d’étendre le passe sanitaire aux entreprises suscite de fortes réticences au sein des organisations patronales et syndicales, mais tétanisé par la peur, ils s’y plieront sans grande résistance. Depuis le début de la crise, l’étrange apathie des syndicats interroge, légitimement, sur la question des financements publics qui leur sont affectés.
Des syndicats sceptiques mais déjà résignés
La ministre du travail, Elisabeth Borne, a réuni syndicats et organisations patronales pour aborder la question. Bilan : les premiers n’y sont réticents et les secondes sont réservées.
Ils sont 2 millions, actuellement, à devoir présenter un passe sanitaire pour travailler. Demain, l’obligation concernera-t-elle l’ensemble des salariés ? C’est le scénario avancé par le ministre de la Santé samedi 18 décembre dernier.
« On n’est pas favorable à l’instauration d’une obligation de passe sanitaire », explique-t-on à la CFDT. Mais la centrale estime que « le vrai sujet est l’obligation vaccinale »
« Il faut convaincre les derniers réfractaires, parmi lesquels ici ou là des salariés », estime Yves Veyrier, de Force ouvrière. Mais « plutôt que de sanctionner, il faut faire du positif », ajoute-t-il, citant l’exemple de l’entreprise Brocéliande, où FO a négocié une prime de vaccination de 200 euros.
Pour l’Union des entreprises de proximité (U2P), «il faut mettre la priorité sur la continuité de l’activité. Donc si ça doit passer par un passe, pourquoi pas. Mais il ne faut pas que ce soit punitif», souligne l’organisation patronale
Pour Bernard Cohen-Hadad, le président de la section francilienne de la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME), les salariés réticents à la vaccination seraient mis «en dehors de l’entreprise» et verraient leurs salaires suspendus. «C’est une perte de compétences, c’est une mauvaise ambiance dans l’entreprise, c’est de l’angoisse, ce n’est pas ce que nous souhaitons mais s’il faut passer par là, nous le ferons. C’est notre devoir de responsabilité», a-t-il estimé au micro de RMC le 20 décembre.
«Est-ce aux chefs d’entreprise d’exercer des pouvoirs de police ?», s’est interrogé de son côté sur France info le président délégué du Medef, Patrick Martin, dont l’organisation réserve sa position et attend l’issue des discussions avec le gouvernement.
Vous l’aurez compris, les syndicats font feint de s’indigner mais obéiront sans sourciller aux injonctions du gouvernement.
Comme en juillet 2021, où plusieurs s’étaient déjà prononcés en faveur de la vaccination obligatoire pour certains salariés, si l’incitation n’était plus suffisante.
Le dimanche 3 juillet, dans une tribune publiée dans le Journal du dimanche, le secrétaire général de la CFDT Laurent Berger et le président du Medef Geoffroy Roux de Bézieux ont appelé ceux “qui ne sont pas protégés du virus à se faire vacciner sans tarder. C’est un acte d’engagement individuel tout autant qu’une démarche de responsabilité. Nous sommes attachés à deux principes : le volontariat et le secret médical. Le premier peut toutefois connaître des exceptions pour les salariés au contact du public au nom de l’indispensable protection des autres”.
La palme revenant à Thierry Amouroux, le porte-parole du Syndicat national des professionnels infirmiers (SNPI), qui estimait qu’un soignant qui refuse de se faire vacciner était une “erreur de casting” et que “se faire vacciner pour protéger les patients les plus faibles est un impératif moral et déontologique”.
Des syndicats sous perfusion des financements publics
L’enjeu est finalement de savoir de qui sont dépendantes les organisationssyndicales : des salariés ? De l’Etat ? Des employeurs ?
A l’instar des médias « main Stream », les grandes confédérations syndicales vivent sous perfusion des financements publics et donc de l’Etat et ne pourraient survivre sans.
En France, le taux de syndicalisation est aujourd’hui le plus faible de son histoire, de l’ordre de 7% des salariés. Au moment du Front populaire et à la Libération, ce taux avoisinait les 50%.
Le poids grandissant des subventions qu’elles proviennent d’organismes publics ou des employeurs eux-mêmes est une cause de l’institutionnalisation dénoncée depuis plusieurs années déjà par Adam.
En s’autonomisant des salariés et en se rendant financièrement dépendantes de l’Etat et des employeurs, les organisations syndicales ont engagé une mutation majeure les conduisant à jouer un rôle d’agence sociale plutôt que celui de contre-pouvoir indépendant qu’ils prétendaient historiquement être.
Les financements alternatifs dont bénéficient les organisations sociales reposent largement sur une logique de saupoudrage qui alimente l’émiettement du syndicalisme français.
La professionnalisation des syndicats et l’importance de la désyndicalisation démontrent la perte effective de leurs capacités à représenter démocratiquement les salariés.
Cette évolution a rencontré un certain acquiescement de la part des dirigeants des ressources humaines ou managers, car mieux vaut des « professionnels » que des « militants », « des élites » que « des cohortes. »
Aujourd’hui, et contrairement à ce que peuvent affirmer les médias « covidistes », une part non négligeable des français n’adhèrent pas à ce totalitarisme croissant. Pourtant, leur voix n’est pas (ou très peu) portée par les confédérations censées les représenter.
Constat qui s’explique sans doutes quant on sait que près de 132 millions d’euros ont été distribués aux organisations syndicales et patronales en 2019, par l’AGFPN.
L’accroissement de la part du subventionnement dans les ressources des organisations syndicales au détriment de la cotisation éloigne le syndicat de ses adhérents et participe finalement de son institutionnalisation.
Insister sur la nécessité de privilégier les cotisations c’est reconnaitre que les organisations syndicales, pour obtenir des moyens, doivent se rendre utiles aux salariés et donc considérer leurs attentes.