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La porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères, M.V. Zakharova, s’entretient avec l’agence de presse TASS

Q : Le 9 juin, le ministère américain de la Défense a publié sur son portail Internet un document intitulé « Background Material on Efforts to Reduce the WMD Threat with Ukraine, Russia and Other Former Soviet Countries ». Une grande partie de ce matériel se concentre sur les activités du Pentagone dans l’espace post-soviétique dans le domaine biologique. Que pensez-vous des allégations contenues dans l’article sur la nature prétendument pacifique de ces activités américaines ?

Réponse : Nous considérons ce matériel comme un « dépotoir » et une partie de la campagne d’information lancée par Washington pour justifier les activités militaro-biologiques américaines dans l’espace post-soviétique afin de détourner l’attention de l’opinion publique internationale de sa véritable nature opaque et peu recommandable, qui contredit les obligations internationales de Washington, notamment celles découlant de la Convention sur l’interdiction des armes biologiques et à toxines (BTWC). Étant donné que les États-Unis n’ont toujours pas retiré leur réserve au protocole de Genève de 1925 interdisant l’utilisation d’armes bactériologiques, il est raisonnable de s’interroger sur le but réel des activités militaro-biologiques internationales du Pentagone.

Le commentaire de l’armée américaine est particulièrement cynique dans le contexte des faits et des preuves obtenus au cours de l’opération militaire spéciale en Ukraine qui confirment que les laboratoires biologiques en Ukraine, soutenus par l’Agence de réduction des menaces du Pentagone et ses sociétés affiliées, mènent des activités militaro-biologiques contraires aux articles I et IV de la BTWC.

Q : La partie russe prendra-t-elle des mesures pour accroître le contrôle des activités américaines dans les biolaboratoires de l’ancienne Union soviétique ?

Réponse : Oui, nous avons l’intention, dans un avenir proche, d’activer les mécanismes prévus aux articles V et VI de la convention, qui prévoient des consultations entre les États parties à la BTWC sur toute question liée à l’objet de la convention ou à la mise en œuvre de ses dispositions, ainsi qu’une coopération dans toute enquête sur d’éventuelles violations des obligations découlant de la BTWC.

Question : Connaissez-vous d’autres pays de l’ancienne Union soviétique où Washington mène des activités de développement biologique ?

Réponse : Les activités du centre de recherche en santé publique dit R. Lugar en Géorgie, où le « US-Georgian Army Medical Research Office » est déployé en permanence, ont également été signalées à plusieurs reprises. Des responsables (notamment par le biais du ministère des Affaires étrangères et du ministère de la Défense) et des personnalités russes, ainsi que des experts et des représentants de la société civile géorgiens, ont souligné à plusieurs reprises que les activités du R. Lugar Center soulevaient de sérieuses questions quant au respect par les États-Unis des obligations découlant de la BTWC. Il a notamment été noté que des recherches sur l’utilisation des insectes comme vecteurs d’agents biologiques et pathogènes particulièrement dangereux sont menées au biosite.

Pour des raisons évidentes, les États-Unis préfèrent garder le silence sur les travaux en cours dans l’espace post-soviétique et ne fournissent pas d’informations dans le cadre des mesures de confiance de la CIAB. Il est faux de prétendre que le Pentagone et ses structures associées se concentrent exclusivement sur les questions de santé. Il est clair que l’assistance sanitaire ne nécessite pas l’implication militaire des États-Unis. En outre, les clarifications répétées de la partie américaine selon lesquelles les États-Unis sont engagés dans la collecte de biomatériaux et la surveillance de la situation épidémiologique ne font que renforcer et consolider nos préoccupations dans le contexte du respect de la BTWC, y compris à la lumière des faits qui ont été révélés en Ukraine.

Quant aux activités de la Russie dans le domaine biomédical, elles sont purement pacifiques et pleinement conformes aux obligations qui lui incombent en vertu de la Convention sur les armes biologiques. Ceci est confirmé, notamment, par les informations annuelles fournies par notre pays dans le cadre des mesures de confiance de la CIAB.

Question : Selon vous, comment l’interaction entre Moscou et Washington devrait-elle être structurée afin d’instaurer la confiance et le respect de la Convention sur les armes biologiques et à toxines ?

Réponse : Nous demandons instamment aux États-Unis, en tant que dépositaire de la BTWC, de remplir leurs obligations au titre de la convention de manière responsable et de contribuer efficacement au renforcement du régime de cet important mécanisme de désarmement pour la sécurité internationale. Nous n’attendons pas des informations générales, mais des explications de fond sur les questions spécifiques soulevées par la Fédération de Russie en ce qui concerne les activités militaires et biologiques des États-Unis dans la zone post-soviétique.

Nous comptons également sur la contribution positive de Washington à la préparation et à l’adoption par la neuvième conférence d’examen de la BTWC de décisions appropriées. En particulier, il est nécessaire de reconsidérer la position extrêmement illogique des États-Unis en ce qui concerne un protocole juridiquement contraignant à la BTWC doté d’un mécanisme de vérification efficace. Tout en plaidant officiellement pour le renforcement de la Convention et en considérant traditionnellement la vérification comme un élément fondamental de tout accord efficace de contrôle des armements, Washington bloque depuis 2001 les tentatives de reprise des travaux sur un tel protocole.

Le soutien américain à d’autres initiatives, y compris russes, visant à renforcer les fondements institutionnels de cet important mécanisme de désarmement pour la sécurité internationale serait très nécessaire. Notre proposition d’améliorer les mesures de confiance mises en œuvre au sein de la BTWC en incluant dans le rapport annuel des informations sur les activités médicales et biologiques militaires menées à l’étranger par les États parties à la convention mérite une attention particulière.

Nous demandons instamment à nos collègues américains de faire preuve de professionnalisme et, au lieu d’un déversement d’informations propagandistes, de s’engager d’urgence dans un travail de fond pour rectifier la situation concernant leurs activités militaires et biologiques dans les pays de l’ancienne Union soviétique.

Le Ministère des affaires étrangères de la Fédération de Russie