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Régis de Castelnau

Le rachat par Elon Musk pour 44 milliards de dollars du réseau social Twitter agit sur le système médiatique français comme un étonnant révélateur. Panique à tous les étages du bloc élitaire qui voit l’arrivée du magnat à la tête de ce qui constituait un des supports privilégiés de son intervention dans le débat public.

La liberté d’expression et réseaux

On connaît les péripéties de cette acquisition qui a vu le multimilliardaire changer plusieurs fois d’avis, mais rester constant dans sa volonté de mettre fin, s’il en prenait la direction, à la censure qui régnait sur ce réseau. On connaît les accointances du fondateur Jack Dorsey avec la partie wokiste du pouvoir démocrate dont il était un fidèle soutien.

Toute l’organisation de Twitter était fondée sur cette volonté de maîtriser l’expression dans cette nouvelle agora, en y interdisant l’accès aux idées allant à l’encontre de ses choix. Les deux arguments majeurs des manieurs de ciseaux pour justifier le fait de fouler aux pieds la liberté d’expression, pourtant garantie aux États-Unis comme en France, était d’abord la nécessité de lutter contre la haine et le fait que Twitter était une société commerciale : « Je suis propriétaire, donc je fais ce que je veux ».

Outre son obscénité et alors que ce réseau est devenu un outil d’expression publique majeure, l’argument se heurtait à l’existence de la fameuse « section 230 » de la loi américaine qui pose comme principe légal que les hébergeurs ne sont pas responsables de ce qui est publié par des individus grâce à leurs outils. C’est ce cadre réglementaire qui a permis l’essor des réseaux sociaux dans le monde, pouvant offrir à des centaines de millions de personnes la possibilité de publier des messages en ligne, en évitant que les hébergeurs soient juridiquement responsables des problèmes potentiels liés à ces messages comme le sont les organes de presse. Cette protection pour les plates-formes du Net n’est cependant pas absolue.

Pour en bénéficier, de tels fournisseurs de services de publication doivent aussi supprimer, dans un délai raisonnable, les contenus illégaux qui leur sont signalés. Et c’est l’invocation de cette nécessité qui a permis la mise en place par les GAFA de dispositifs de censure en amont absolument massifs. La lutte contre la haine a bon dos, comme on a pu le voir avec les tentatives françaises de Laetitia Avia ou les dispositifs européens vantés par Thierry Breton.

Le sommet a été atteint lorsque Twitter a d’autorité et brutalement supprimé le compte de Donald Trump pourtant suivi par 80 millions de personnes ! Que ce soit en France avec l’article 11 de la Déclaration des droits de l’Homme ou aux États-Unis avec le premier amendement de la Constitution, la liberté d’expression est absolue sauf exceptions nécessaires prévues par la loi dont la violation doit être constatée a posteriori par un juge.

L’information est une liberté

La passion pour la censure très caractéristique du massif courant wokiste aux États-Unis et de la gauche sociétale en France a trouvé un moyen d’assouvissement avec cette perversion dans le fonctionnement des réseaux sociaux. Que la censure soit le fruit de la volonté des propriétaires aux USA ou bien par la mise en place de réglementations liberticides dans l’Union européenne, elle constitue une régression considérable.

Ces réseaux, sortes d’agoras modernes, sont devenus les espaces essentiels du débat public. Charriant bien sûr le pire et le meilleur, ils constituent cependant, qu’on le veuille ou non, des outils de ré-information indispensable en ces temps de concentration des systèmes médiatiques entre les mains des oligarques à qui les pouvoirs politiques n’ont rien à refuser. On ne prendra que l’exemple du délire propagandiste qui a saisi le système français depuis l’invasion russe en Ukraine. On comprend que les tenants minoritaires du bloc élitaire tiennent à ce point au monopole de leur parole. Et souhaitent conserver ce système de censure a priori de ceux qui ne pensent pas comme eux. Anne-Sophie Chazaud a très bien expliqué ça dans son livre dont la lecture reste indispensable.

Aussi que l’arrivée tonitruante d’Elon Musk à la tête de Twitter ait fait souffler un vent de panique sur le mainstream ne saurait constituer une surprise. Car il ne s’est pas contenté, en effet, d’annoncer depuis déjà un moment qu’il entendait restaurer la liberté d’expression dans le fonctionnement du réseau, mais il en a profité pour mettre dehors tous les organisateurs de la censure. Même si on ne va pas les plaindre et même parfois s’en réjouir, on va reconnaître que la véritable joie mauvaise nous a été fournie au spectacle de la panique et des lamentations des petits marquis, des professeurs de morale et de maintien, des antifascistes en carton, et autres profiteurs du système.

La lecture des déplorations qui remplissent les colonnes démontrent qu’au fond, le pire pour eux est la perte de leur monopole. Alors la diabolisation d’Elon Musk va bon train, et désormais la bien-pensance le décrit sous les traits de Belzébuth. Pensez donc, il a appelé à voter pour les républicains aux élections des «mid-terms », le parti de Donald Trump. Pour les ignorants de ce que sont les États-Unis, ça relève quasiment du crime contre l’humanité. Beaucoup appellent maintenant à l’exil et à rejoindre un autre réseau appelé Mastodon ou ils se retrouveraient entre eux, bien au chaud. Les quolibets qu’ils reçoivent en retour démontrent que les réseaux sont souvent un lieu de création humoristique réjouissant.

Alors bien sûr, passé ces petits plaisirs, on ne va pas se faire d’illusion et rester vigilant. Elon Musk est un de ces magnats capricieux à la richesse vertigineuse et artificielle. On verra bien ce qu’il fait de son nouveau jouet. En attendant, les manieurs de ciseaux nous rappellent que pour eux et l’ordre qu’ils défendent, la liberté d’expression constitue un danger. On a entendu Madame Jacinda Ardern, terrifiante Premier ministre de Nouvelle-Zélande nous dire à l’Assemblée générale de l’ONU que « la liberté d’expression était le masque de la désinformation » !

En permettant sans entrave l’expression des deux camps, le réseau social Telegram, où cette liberté est totale, a joué un rôle d’information important dans la guerre en Ukraine.. Laetitia Avia, spécialiste de projets de loi liberticides et députée battue, ne s’y est pas trompée. Ne disposant plus de la tribune de l’Assemblée, elle vient de publier un article dans le Monde en réclamant sa mise au pas urgente.

Il faut être bien conscient que le combat pour la liberté d’expression reste plus que jamais d’actualité.

Vu du Droit