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De nouveaux documents révèlent que si Twitter a bloqué les campagnes de propagande de gouvernements étrangers, la plateforme a collaboré avec le Pentagone pour mettre en avant ses messages

Twitter a activement contribué à amplifier la propagande sur les activités de l’armée américaine au Moyen-Orient, selon une nouvelle enquête (AFP)

Twitter a secrètement collaboré avec l’armée américaine pour amplifier sa propagande à travers le Moyen-Orient, malgré sa promesse de mettre fin aux opérations d’influence menées par des États, selon une enquête basée sur des documents internes de l’entreprise.

Les fichiers, initialement révélés par The Intercept, indiquent que des responsables de Twitter ont contribué à donner une plus grande visibilité à un réseau de comptes gérés par le Commandement central américain qui visait à façonner l’opinion au Yémen, en Irak, en Syrie, au Koweït et dans d’autres pays.

Dans cette optique, des comptes ont été mis sur « liste blanche » à la demande du gouvernement américain, ce qui leur a permis d’échapper aux filtres anti-spam et d’accroître leur portée. 

Au cours d’un échange avec un employé de Twitter, un responsable de l’armée américaine a avancé sur le ton de la plaisanterie qu’il était « difficile d’opérer sur le web sans pouvoir tweeter ».

Au cours de cette même conversation, le responsable militaire a énuméré six comptes, demandant que certains soient certifiés avec un « badge bleu » et que d’autres soient mis sur « liste blanche », de manière à pouvoir « amplifier certains messages ».

Au total, les responsables ont demandé un statut spécial pour au moins 52 comptes. 

Selon les informations relayées, un compte Twitter intitulé @yemencurrent décrivait les frappes de drones américaines comme étant « précises », une allégation qui a été réfutée. Le compte est aujourd’hui supprimé.

On estime que les États-Unis ont tué au moins 1 000 personnes dans des frappes de drones sur une période de deux décennies. 

Selon des sources interrogées par The Intercept, Twitter a secrètement introduit en 2017 une nouvelle fonctionnalité répondant spécifiquement aux besoins de l’armée américaine. 

Celle-ci permettait à un compte sans badge bleu officiel de bénéficier tout de même des avantages d’un compte certifié sans que cela soit visible publiquement.

Selon The Intercept, Twitter n’a pas répondu à la demande de commentaires qui lui a été adressée.

L’exceptionnalisme américain

Cet été, le gouvernement américain a été accusé d’avoir commandité une campagne numérique sur Facebook, Instagram, Twitter et d’autres réseaux sociaux visant l’Asie centrale et le Moyen-Orient pour promouvoir les discours pro-occidentaux. 

En juillet-août, Twitter et Facebook ont suspendu des dizaines de comptes pour infraction à leurs politiques en matière de « manipulation de la plateforme et de spam » et pour avoir eu un « comportement coordonné non authentique ».

Ces comptes se focalisaient sur l’Iran, l’Afghanistan et le Moyen-Orient arabophone et comprenaient des sous-groupes irakiens et saoudiens.

Ces dernières révélations invitent cependant à croire qu’en coulisses, Twitter se coordonnait avec les autorités américaines pour protéger leurs comptes tout en luttant contre d’autres pays menant des activités similaires en ligne. 

En 2020, Twitter a annoncé que 7 340 comptes liés à la Turquie avaient été suspendus dans le cadre d’une opération de répression des « opérations d’information liées à des États », outre des opérations similaires contre des comptes liés à la Russie et à la Chine.

À la suite de ces révélations, Twitter a déclaré publiquement que le gouvernement turc était à l’origine des comptes suspendus.

À l’époque, le gouvernement turc avait reproché à Twitter d’être une « machine de propagande ayant certains penchants politiques et idéologiques ».

Les nouveaux documents montrent que les règles que Twitter appliquait aux autres pays menant des « opérations d’information » n’étaient apparemment pas imposées au gouvernement américain. 

Ces révélations sont les dernières en date d’une série d’articles de presse basés sur les « Twitter Files », qu’Elon Musk a mis à la disposition des journalistes.

Il s’agit cependant des premières informations qui abordent l’alignement de l’entreprise sur les objectifs américains en matière de politique étrangère.

Traduit de l’anglais (original) par VECTranslation.