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Philippe Bilger
Non, Didier Deschamps (DD) n’a pas été et n’est pas un entraîneur « génial » (CNews).
Non, ce n’est pas l’offenser que d’avoir pu envisager son départ et même de l’avoir souhaité.
Oui, on a le droit de le critiquer, voire de s’étonner de sa reconduction quasi automatique à la tête de l’équipe de France jusqu’au mois de juillet 2026.
La Fédération française de football et Noël Le Graët (NLG) ont validé cette prolongation avec le faux suspense de la prétendue hésitation du principal intéressé. On sait que le couple NLG et DD, depuis quelques années, est dans une totale complicité. À tel point qu’il était convenu entre eux que le but serait déjà atteint avec la France en demi-finale.
Après l’échec au championnat d’Europe (avec DD cependant maintenu à son poste), pourquoi NLG n’a-t-il pas poussé le maximalisme jusqu’à prescrire au moins l’obligation de la finale à la Coupe du monde et, pourquoi pas, de la victoire ? Cette exigence relative ne faisait pas peser la moindre pression sur DD qui était quasiment assuré de remplir son contrat.
Il suffisait d’observer la triste mine de Mbappé après la défaite et même sur le balcon du Crillon place de la Concorde pour mesurer à quel point ce compétiteur n’aspirant qu’à fêter la victoire se trouvait gêné devant cette multitude de personnes applaudissant une défaite.
D’emblée je me suis senti mal à l’aise avec cette politique de la rhubarbe et du séné entre NLG et DD qui se soutenaient réciproquement et semblaient ne tenir aucun compte d’autres considérations que celles confortant à la fois le président et le sélectionneur. Se congratulant, ils bloquaient tout débat.
J’étais d’autant plus réservé face à cette entreprise – très longtemps à l’avance, on nous a annoncé que DD serait probablement prolongé et qu’il aurait carte blanche ! – que NLG avait accumulé des griefs, des polémiques, des maladresses, des vulgarités et des indélicatesses qui pouvaient faire douter de sa fiabilité en tant que président de la FFF et du processus concernant DD qu’il avait fait valider par le comité exécutif.
Sa toute dernière saillie à l’encontre de Zidane pressenti comme sélectionneur au Brésil constituant un sommet de mépris et de vulgarité : « …j’en ai rien à secouer, il peut aller où il veut (…) je l’aurais même pas pris au téléphone »…
Réaction immédiate et justifiée de Kylian Mbappé reprochant à NLG d’avoir manqué de respect à « une légende ».
À nouveau, NLG a dû s’excuser pour sa « maladresse » et faire acte de repentance. Il téléphonera même à Zidane. NLG passe son temps à réparer ses bévues de toutes sortes mais que ne ferait-on pas pour conserver une position aussi juteuse !
Le footballeur Christophe Dugarry (protégé par Zidane), malgré quelques exploits notamment bordelais, ne m’avait jamais ébloui mais l’analyste qu’il est devenu ensuite – une sorte de parler-vrai à la Ménès mais sans la grossièreté trop fréquente de ce dernier – a vu souvent juste et en particulier lorsqu’il a souligné, après la Coupe du monde et la finale manquée malgré l’étincelant Mbappé, qu’il serait normal voire souhaitable d’envisager la possible succession immédiate de DD par Zidane. On a crié au lèse-Deschamps alors que c’était tout simplement un propos de bon sens.
NLG, âgé de 81 ans, s’accroche à sa fonction de président, a encore des ambitions mais, à considérer ces derniers mois, n’a-t-il pas perdu toute légitimité, y compris pour son opération programmée en faveur de DD, quand Zidane piaffe et apporterait du nouveau à cette équipe de France ? En dépit de l’excellent bilan de son sélectionneur et entraîneur actuels, elle serait sublimée par son successeur.
Hugo Lloris a annoncé sa retraite internationale. Pas le genre de NLG mais ce dernier pourra-t-il rester jusqu’en 2024 ? La ministre des Sports ne le « lâche » pas et il paraît que le président est lui aussi mécontent. La presse espagnole est indignée. Le « papy » en prend plein la tête !
Rien n’est plus agaçant que ce sentiment d’avoir été mis devant le Deschamps accompli!
Celui-ci va-t-il rester jusqu’en 2026 alors que maintenant il est clair que DD va être « fragilisé par les écarts de son président » (Le Parisien) et que, comme l’affirme Frank Leboeuf, « NLG rend DD complice de ses bêtises sur Zizou »… ?
La machine trop bien et trop vite programmée est en en train de se dérégler.
Le 11 janvier à 11 heures le Comex va se réunir avec Noël Le Graet et je ne sais quelle sera son issue en ce qui concerne ce dernier attaqué de toutes part même pour des faits allégués très anciens (2014!). La seule bonne nouvelle est qu’on envisage de réexaminer les conditions dans lesquelles la prolongation de DD a été effectuée, la durée de son contrat et son salaire.
En même temps, à un niveau modeste, j’ai conscience d’ajouter à une hypertrophie somme toute dérisoire par rapport à ce dont la France est réellement préoccupée et qui va en jeter une part dans la rue !
De cette effervescence enflée, quel gain pour le foot ? Quel gain pour DD ? Quel désastre pour NLG!
Et Zidane attendra…