Les tentes du Hezbollah : La dissuasion israélienne se dégrade sur le front nord

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La réaction du gouvernement israélien aux tentes plantées à l’extérieur des fermes de Chebaa a été hystérique, le commandement politique et militaire ne parvenant pas à prendre une décision décisive.

Le gouvernement israélien est devenu frénétique après que la Résistance libanaise, le Hezbollah, a planté des tentes de reconnaissance dans la ferme de Bistara qui borde les fermes libanaises occupées de Chebaa.

Cette initiative fait suite à l’intensification des hostilités israéliennes sur les territoires libanais, au cours desquelles des bulldozers ont été déployés à la périphérie des collines de Kfashouba pour creuser des tranchées afin de pénétrer plus avant dans les zones libérées du Liban. Il s’agit là d’une nouvelle provocation israélienne à l’encontre de l’intégrité territoriale du Liban, qui porte atteinte aux propriétés et à la vie des habitants du Sud.

Ces provocations incessantes s’inscrivent dans le cadre des tentatives israéliennes visant à renforcer sa présence dans les territoires libanais occupés, qui ont une valeur économique, militaire et stratégique considérable. Cet article souligne l’importance des fermes de Chebaa occupées en tant que forteresse pour les hauteurs du Golan syrien occupé et l’intérieur de la Syrie et de la Palestine.

Histoire des fermes de Chebaa et de Bistara

Les fermes de Chebaa et de Bistara se situent à un point d’intersection entre plusieurs topographies. La Grande-Bretagne et la France ont occupé ces régions après l’effondrement de l’Empire ottoman, créant des entités politiques dans lesquelles elles exerceraient leur domination coloniale le long de lignes arbitrairement tracées. Ces États nouvellement formés ne prenaient en compte que leurs intérêts économiques et militaires, sans tenir compte des racines historiques, des topographies et, surtout, des sociétés qui habitaient ces régions.

Les fermes de Chebaa sont situées à la frontière sud-est des territoires libanais, à l’intersection du plateau du Golan syrien et du Jabal Aamel, une chaîne montagneuse qui s’étend du Liban à la Palestine.

« Shebaa » dans Shebaa Farms correspond au nom du village d’où sont originaires les villageois libanais qui ont participé à un voyage visant à développer la bande de terre à des fins agricoles. En 1967, « Israël » a unilatéralement annexé le plateau du Golan et les fermes de Chebaa, poussant ses habitants vers le village de Bistara. Ces personnes ont suivi leur tradition paysanne et ont développé le village de Bistara pour l’adapter à leurs besoins agricoles. Il est important de noter que l’annexion de ces territoires par Israël n’a été reconnue par aucun pays ou organisation internationale autre que les États-Unis, qui l’ont fait sous l’administration Trump.

Bistara a ensuite été occupée lorsque « Israël » a envahi le Liban en 1982 et a finalement été libérée en 2000. Le Hezbollah a planté les tentes de reconnaissance dans le village de Bsitara en réponse aux travaux d’excavation effectués par des bulldozers israéliens qui ont tenté d’écraser un villageois de la région, en réaction directe apparente.

L’homme en question est Ismail Nasser, un villageois libanais originaire de Shebaa, qui a affronté l’opérateur du bulldozer blindé debout devant la machine, alors qu’il risquait sa vie pour arrêter le véhicule qui avançait.

La volonté de Nasser de sacrifier sa vie pour stopper les plans d’expansion israéliens au Sud-Liban s’inscrit dans l’histoire et la tradition de sacrifice qui ont caractérisé la Résistance dans le Sud.

L’empiétement de l’armée israélienne au-delà de la ligne bleue n’est pas un événement rare. Un habitant du Sud pourrait facilement citer d’innombrables violations commises par les FIO, y compris la saisie de bétail et les violations quotidiennes récurrentes de l’espace aérien libanais par l’armée de l’air israélienne.

Pour être plus précis, la ligne bleue était une ligne de retrait temporaire établie par les Nations unies pour déterminer si « Israël » s’était totalement retiré du Liban ou non. Ni le Liban en tant qu’État ni le gouvernement israélien ne reconnaissent cette ligne sur le plan juridique, mais elle a une valeur substantielle lorsqu’il s’agit d’évaluer la présence des troupes israéliennes, puisqu’elle marque le niveau de retrait de l’armée israélienne en 2000.

Un projet colonial expansif dissuadé

Dans la ville d’Al-Ghajar, occupée par « Israël », les FIO ont construit des fortifications pour encercler la ville, une action qui s’est répétée tout au long de la frontière entre la Palestine et le Liban. Cela se produit alors que le projet colonial expansif, c’est-à-dire « Israël », fait face à une réalité amère que les premiers sionistes n’avaient pas imaginée : la suprématie de la Résistance autochtone sur les colonisateurs parasites.

Les victoires de la Résistance libanaise se sont également traduites à Gaza et en Cisjordanie où les gouvernements israéliens successifs ont choisi de se retirer et de se retrancher dans les territoires occupés en 1948 et 1967 plutôt que d’imposer une occupation directe aux autochtones. De longues tranchées, des bases militaires, des murs de béton et des clôtures ont été construits tout autour de la Cisjordanie, de Gaza et du Sud-Liban pour assurer la sécurité de la société israélienne soi-disant « démocratique ».

La frénésie de cette semaine autour des tentes de la renaissance montre de manière essentielle la fragilité de la société israélienne, en particulier dans les colonies du nord de la Palestine, et met également en lumière les faiblesses de l’armée israélienne. Comme indiqué dans les articles précédents, l’armée israélienne n’est plus en mesure d’imposer un contrôle de facto sur le terrain aux sociétés rebelles qu’elle cherche à dompter. Cela s’est traduit par son incapacité à atteindre les objectifs de sécurité à Jénine le 3 juin, une opération de deux jours s’étant soldée par un retrait qui a coûté à l’armée israélienne au moins un mort confirmé.

« Israël » a menacé, par l’intermédiaire de médiateurs internationaux et de tierces parties, de retirer les deux tentes par la force, intensifiant ses avertissements cette semaine. Cependant, les tentes, qui ont été installées à la périphérie du village, dont « Israël » affirme qu’il fait partie de « son territoire », restent à ce jour à leur place. Cela a ouvert une grande opportunité de faire basculer le rapport de force en faveur de la Résistance, alors qu' »Israël » ne parvient pas à reprendre le contrôle de la zone qu’il occupe. Bien que marginale par rapport au volume restant des territoires occupés, l’incapacité d’Israël à s’occuper des tentes marquera une nouvelle ère dans ses règles d’engagement avec la Résistance.

Le paradis agricole

Au début de la colonisation de la Palestine, après la Première Guerre mondiale, les Juifs européens se sont fait une fausse idée de la région qu’ils finiraient par occuper pour former la première entité politique juive coloniale. Des textes religieux datant de plusieurs milliers d’années décrivaient la Palestine comme faisant partie d’un croissant fertile, une terre qui pouvait facilement être cultivée et rapporter de gros bénéfices à ceux qui s’y installaient. En réalité, le désert d’Al-Naqab s’étend sur environ 60 % des terres palestiniennes, les sources d’eau étant difficiles à trouver.

Al-Jalil, dans le nord de la Palestine, est devenue une zone essentielle pour qu' »Israël » puisse présenter ses entreprises de haute technologie dans le domaine de l’agriculture et de l’alimentation. Cette vallée au sol riche en nutriments et aux ressources en eau suffisantes a suscité un intérêt accru de la part du commandement politique israélien, qui s’est appuyé sur des années de subventions et de réductions d’impôts en faveur de ses secteurs agricoles, alors que le gouvernement cherche à écologiser son occupation des terres arabes en transformant le désert en jardin, un faux prétexte récurrent dans presque tous les récits coloniaux.

L’importance économique de la région se double d’un désavantage militaire, car la vallée facilite l’avancée des troupes libératrices au cœur du projet colonial. Il s’agit également d’une voie d’accès rare dans le secteur nord d’Israël, caractérisé par des régions montagneuses.

Les fermes de Shebaa constituent la porte d’entrée de la vallée car elles sont situées à une altitude plus élevée que la plaine d’Al-Houla qui mène à Al-Jalil. Elles surplombent donc la zone et offrent une vue plus large et plus claire des colonies et des positions israéliennes en contrebas. Cela explique, d’un point de vue militaire, pourquoi l’armée israélienne a interrompu son retrait à cet endroit.

En février 2011, le secrétaire général du Hezbollah, Sayyed Hasan Nasrallah, a averti le commandement israélien que s’il s’engageait dans une nouvelle guerre contre le Liban, le Hezbollah libérerait les territoires occupés dans la région d’Al-Jalil. Depuis lors, la possibilité qu’une telle menace se concrétise s’est accrue au fur et à mesure que le groupe de la résistance libanaise accumulait des compétences, des technologies et des armes au fil des ans. Son expérience en Syrie et la transformation de roquettes en missiles de haute précision, ainsi que le travail effectué dans le domaine des drones de reconnaissance et d’attaque, menacent le commandement et le personnel de l’armée israélienne en difficulté.

Un tel scénario a été envisagé par plusieurs experts israéliens, en particulier après l’incapacité de l’OIF à traiter de manière décisive les tentes de reconnaissance.

Les militaires israéliens se sont montrés extrêmement vigilants et obsessionnels, faisant preuve d’une extrême prudence par crainte d’une bavure. Cela décrit exactement la façon dont le commandement politique et militaire traite les tentes : par la peur.

Plus important encore, ce sentiment a été transféré aux colons qui occupent le nord de la Palestine. Ils ont désormais l’impression que leur armée est incapable de les protéger. Si l’on considère que la sécurité des colons est essentielle à la réussite d’un projet colonial à long terme, les règles d’engagement actuelles établies par la présence continue de tentes de reconnaissance sans qu’aucune action militaire ne soit entreprise à leur encontre ont réduit à néant toutes les garanties de sécurité dont disposaient les colons du nord. Cela remet en question la viabilité d’investissements fructueux ou d’une vie paisible à Al-Jalil.

La dissuasion « israélienne » sur le front nord risque de s’effondrer lorsque de simples fermiers empêchent ses véhicules blindés d’avancer, que des villageois interrompent par la force les travaux d’excavation et que des « loups solitaires » s’infiltrent profondément dans l’intersection de Meggido et y mènent des opérations. L’indécision de son commandement militaire et son incapacité à risquer la confrontation avec le Hezbollah en période de turbulences internes transformeront les règles d’engagement sur le front nord, comme cela a été fait depuis 2000 à Gaza et dans la ville de Jeni en Cisjordanie.

Al Mayadeen

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