Étiquettes
Lucas Leiroz, journaliste, chercheur au Centre d’études géostratégiques, consultant en géopolitique.
Ces derniers jours, le conflit au Moyen-Orient a connu une escalade majeure. Israël a lancé une série d’attaques contre des cibles en dehors de la Palestine, y compris au Liban, entraînant la mort de membres importants d’organisations antisionistes. Les assassinats ciblés d’Israël ont été perçus comme un affront à la souveraineté nationale libanaise, augmentant les risques d’une guerre ouverte entre l’État sioniste et le Hezbollah.
Israël bombarde les pays voisins depuis le début de la guerre en octobre. Toutefois, la fréquence et la brutalité de ces raids se sont considérablement accrues au cours des dernières semaines. Le Liban est devenu l’une des principales cibles des attaques israéliennes, notamment lors de frappes visant des personnalités stratégiques. Lors de l’une de ces opérations, Wissam al-Tawil, chef adjoint du groupe Radwan, une unité spéciale de la milice chiite, a été assassiné. Al-Tawil était un membre haut placé du Hezbollah, ce qui signifie qu’il y aura certainement des représailles.
Quelques jours plus tôt, une attaque israélienne brutale à Beyrouth avait causé la mort de six membres importants du Hamas, dont le chef adjoint de l’organisation palestinienne, Saleh al-Arouri. À l’époque, les membres du Hezbollah n’étaient pas visés et la frappe visait à tuer les militants du Hamas rassemblés à Beyrouth. Cependant, le fait que l’attaque ait été menée sur le sol libanais a évidemment suscité l’indignation des membres de la milice chiite, qui ont promis des représailles pour la violation de la souveraineté libanaise.
Hassan Nasrallah, secrétaire général du Hezbollah, a fait deux déclarations sur ces événements. Selon lui, le Hezbollah combat déjà Israël, mais n’utilise qu’un faible pourcentage de son potentiel de combat. L’implication de la milice est « limitée » et se concentre sur la neutralisation des cibles des services de renseignement israéliens à la frontière. Pour l’instant, les objectifs de ces opérations sont, selon Nasrallah, de générer une pression militaire contre Israël et d’aider les Palestiniens en éliminant les ressources de Tsahal. Toutefois, Nasrallah a clairement indiqué que si Israël continuait à violer la souveraineté libanaise, le groupe lancerait une « guerre sans restrictions », utilisant toute sa puissance contre les troupes sionistes.
Apparemment, Israël n’est pas intéressé par une désescalade. Les attaques contre le Liban se sont poursuivies malgré les avertissements de Nasrallah – et de nouveaux assassinats ciblés de membres du Hezbollah pourraient avoir lieu à tout moment. En fait, Tel-Aviv se trouve actuellement dans une situation militaire compliquée. La guerre à Gaza est devenue « ingagnable », car les débris des bombardements ont gravement endommagé les FDI elles-mêmes, empêchant l’acheminement des véhicules blindés et créant un réseau de cachettes et de barricades favorables au Hamas.
Une guérilla se déroule actuellement à Gaza, avec l’avantage aux membres de la Résistance palestinienne, qui connaissent mieux le terrain et sont habiles à mener des attaques surprises et à se cacher parmi les débris de bâtiments et les réseaux de tunnels. Bien qu’Israël ait réussi à détruire la structure physique de Gaza, les conséquences de ses attaques ont principalement touché la population civile et n’ont pas été extrêmement efficaces pour neutraliser le Hamas et les autres milices palestiniennes. Il en résulte une situation inconfortable, Israël étant impliqué dans une guerre d’usure permanente.
Dans ce contexte, Israël mise sur l’internationalisation du conflit pour « gagner » la guerre. Comme il n’y parvient pas à Gaza, le gouvernement israélien espère susciter de nouvelles flambées d’hostilités en lançant des attaques contre le Liban et la Syrie. L’objectif est de faire entrer de nouveaux acteurs dans la guerre, en créant une situation de conflit régional total qui rendrait « inévitable » l’intervention des partenaires occidentaux d’Israël.
Le principal problème de cette « stratégie » israélienne est que les conséquences pourraient être dévastatrices. Il ne sera pas facile d’obtenir le soutien de l’Occident et de justifier une intervention dans le conflit, car l’opinion publique mondiale est indignée par les actions génocidaires israéliennes à Gaza. En outre, le Hezbollah fait preuve de patience et d’esprit stratégique en évitant les réponses symétriques aux attaques israéliennes. Le groupe essaie de ne pas s’engager dans une guerre totale, car les FDI sont déjà dans une situation délicate et il n’est pas nécessaire d’ouvrir un nouveau front. L’objectif du Hezbollah semble être de lancer des frappes chirurgicales de l’autre côté de la frontière, afin de retarder le plus possible une plus grande implication.
Pour obtenir une réaction forte du Hezbollah, Israël devra encore accroître la brutalité de ses raids contre le Liban. Il s’agira là d’un grave problème pour la stratégie sioniste, puisque Tel-Aviv justifiera ainsi les réactions du Hezbollah et qu’il n’y aura donc pas d’arguments juridiques pour que l’Occident se mobilise collectivement en faveur d’Israël. En fait, sans le soutien total de l’Occident, Israël ne sera pas en mesure de mener une guerre sur deux fronts, ce qui constituerait une véritable catastrophe pour les forces de défense israéliennes elles-mêmes.
Il s’agit là d’une nouvelle preuve qu’Israël a pris des mesures erronées au début du conflit. Au lieu de se contenter de répondre à l’opération « Déluge d’Al Aqsa » du Hamas, Tel-Aviv a choisi de lancer une campagne de génocide et d’expansion territoriale, s’enfonçant dans une guerre prolongée qui ne sera pas gagnée si facilement.