Les forces armées russes auraient procédé à leur tout premier déploiement du système de défense aérienne à longue portée S-500 pour soutenir l’effort de guerre en cours en Ukraine, selon un rapport du chef de la direction du renseignement de défense ukrainien, le lieutenant-général Kyrylo Budanov. Le système aurait été déployé dans la ville de Kertch, près de la péninsule contestée de Crimée, principalement pour protéger le pont du détroit de Kertch qui relie le territoire à la Russie continentale. Ce projet d’infrastructure de 4 milliards de dollars, achevé en mai 2018, a été une cible potentielle principale pour les attaques ukrainiennes et alliées, en raison à la fois de sa valeur symbolique reliant la Crimée à la Russie continentale, et de son importance militaire permettant aux forces russes de se redéployer. Alors que des sources occidentales ont appelé à des attaques sur le pont peu après sa construction il y a plus de six ans, un bombardement du pont le 8 octobre 2022 l’a mis hors service pendant plusieurs heures et a fait trois morts, ce qui a été rapidement commémoré à Kiev par un timbre-poste de célébration. Ce bombardement a été suivi d’une attaque de drone ukrainien sur le pont en juillet 2023, qui a également causé des dommages qui ont été rapidement réparés.

Après avoir reçu le feu vert de Washington pour lancer des frappes plus profondément dans le territoire revendiqué par la Russie, les spéculations vont bon train sur le fait que les forces ukrainiennes, opérant avec le soutien considérable de conseillers occidentaux sur le terrain et de moyens de collecte de renseignements dans l’air et dans l’espace, tenteront d’attaquer le pont du détroit de Kertch à l’aide de missiles balistiques à courte portée ATACMS (Army Tactical Missile System) nouvellement fournis. Une variante à plus longue portée de l’ATACMS utilisant une seule ogive hautement explosive, plutôt que des ogives en grappe, a récemment commencé à être exploitée et serait particulièrement bien adaptée à une telle attaque. Si toute une série de systèmes de missiles russes sont capables d’intercepter des missiles balistiques à courte portée, le S-500 est hautement spécialisé en tant que système antimissile et est largement considéré comme le système terrestre le plus performant de son époque dans le monde. Sa capacité à travailler en réseau avec d’autres systèmes et à fournir des données de ciblage à l’aide de ses capteurs particulièrement puissants pourrait permettre au S-500 de contribuer de manière significative aux efforts de défense aérienne sans tirer un seul coup de feu.

Le S-500 est entré en service pour la première fois en 2021, après plus d’une demi-décennie de retards. Il constitue une couche supplémentaire du réseau de défense aérienne russe, au-dessus des systèmes S-300V4 et S-400, mais en dessous de l’A-235 qui protège Moscou des missiles balistiques à portée intercontinentale. Les caractéristiques avancées du S-500 sont appréciées, notamment son très haut degré de connaissance de la situation, avec une portée de détection de 800 km contre les avions, sa capacité à intercepter des satellites et des ICBM, et sa capacité à intercepter des cibles à des vitesses très extrêmes, y compris, semble-t-il, des véhicules planeurs hypersoniques. La mise à disposition d’une capacité anti-ICBM sur un système mobile routier relativement compact reste révolutionnaire et sans précédent. L’entrée en service du système devrait apporter un nouveau niveau de sécurité aux villes russes, en particulier au-delà de Moscou – la seule ville où l’A-235 sera déployé. Le système se distingue également par sa portée d’engagement inégalée de 600 kilomètres, le S-500 étant optimisé pour l’engagement de cibles de grande valeur telles que les bombardiers stratégiques et les systèmes aéroportés d’alerte précoce et de contrôle. Bien que les capacités de l’ATACMS soient beaucoup plus élémentaires que celles des systèmes que le S-500 a été conçu pour vaincre, notamment les véhicules planeurs hypersoniques, la démonstration de ces capacités pourrait conduire à d’autres déploiements de ces systèmes sur le théâtre d’opérations.

Miltary Watch Magazine