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JONATHAN TURLEY

La décision du président Joe Biden de se retirer de la course à l’investiture du parti démocrate a résolu un problème immédiat pour son parti. Joe Biden a dégringolé dans les sondages, la grande majorité des électeurs ayant conclu qu’il était trop diminué par l’âge pour effectuer un nouveau mandat. Cependant, il a créé plusieurs nouveaux problèmes, dont celui, évident, d’un président considéré comme incapable de se présenter à un poste qu’il continue d’occuper.

Le parti démocrate a créé sa propre version politique du 25e amendement en forçant M. Biden à se retirer de la course. Cette décision était aussi volontaire que de quitter un immeuble par la fenêtre du 46e étage. C’est particulièrement le cas lorsque ce sont vos amis les plus proches qui vous jettent par la fenêtre.

L’image inconvenante d’une succession par défenestration sera bientôt blanchie par des médias qui feront l’éloge de Biden après l’avoir déclaré incompétent et affaibli pendant des semaines.

Il reste cependant une question qui subsiste après la chute. Comment Biden peut-il rester en poste alors qu’il est incapable de se présenter aux élections ?

M. Biden reste particulièrement vague quant à la raison de son retrait, après avoir affirmé pendant des jours qu’il serait le candidat du parti. Il se contente de dire que c’est dans l’intérêt du pays.

L’establishment démocrate a deux options aussi peu attrayantes l’une que l’autre.

Tout d’abord, il pourrait affirmer que M. Biden se retire parce qu’il reconnaît qu’il n’est plus politiquement viable. Mais cela revient à se moquer du processus démocratique. Des millions de personnes ont participé aux élections primaires pour le choisir comme candidat. Aujourd’hui, il serait mis de côté et remplacé par un vote de l’establishment du parti, à l’instar d’un changement au sein du politburo russe.

Deuxièmement, elle pourrait admettre que M. Biden était, comme l’ont affirmé pendant des semaines les médias et des personnalités telles que l’avocat spécial Robert Hur, très diminué, tant mentalement que physiquement. Toutefois, cela fait de ce retrait un aveu qui pourrait déclencher une lutte au titre du 25e amendement.

Cette évolution pourrait créer une nouvelle controverse constitutionnelle. Le 25e amendement a été rédigé en tenant compte des handicaps physiques. Si un président est dans le coma, l’incapacité est évidente et l’article 4 permet au vice-président et à une majorité du cabinet de signer une déclaration au Congrès indiquant qu’un président est incapable d’exercer ses fonctions.

Toutefois, Harris tient à éviter l’image de Brutus dans l’expulsion du président. En soutenant une telle déclaration, Biden risquerait de proclamer « Et tu, Kamala ? » à la nation. La clé de la succession par défenestration est de ne pas être considéré comme la main qui pousse le président par la fenêtre. La politique suit les mêmes règles que la mafia pour le capo di tutti i capi : Tuer un don, ne jamais être un don. Bien qu’elle soit parfois honorée par la brèche ouverte dans la mafia, cette voie n’est guère propice à un homme politique.

Il existe cependant une autre possibilité intrigante.

L’article 4 prévoit que l’aptitude d’un président peut être soumise au Congrès lorsque « le vice-président et une majorité des principaux responsables des départements exécutifs ou tout autre organe que le Congrès peut prévoir par la loi ».

Auparavant, les démocrates ont cité cette formulation pour suggérer qu’ils pourraient créer leur propre organe pour forcer l’ancien président Donald Trump à quitter ses fonctions. En effet, la députée Jaime Raskin (D-Md.) a parrainé un projet de loi intitulé « Oversight Commission on Presidential Capacity Act » (loi sur la commission de surveillance de la capacité présidentielle) visant à créer une commission habilitée à examiner la capacité d’un président auprès du Congrès. Cette loi permettrait de contourner la nécessité de demander à Harris d’être la première main à dépêcher un président.

La question est de savoir si le Congrès prendra désormais cette décision pour justifier une enquête ou même un projet de loi de type Raskin.

Cette décision est différente de celle prise par le président Lyndon Johnson le 31 mars 1968 : « Je ne chercherai pas et je n’accepterai pas l’investiture de mon parti pour un nouveau mandat de président ».

C’était avant les primaires. Dans le cas présent, M. Biden a remporté une primaire au cours de laquelle le Parti démocrate a fait obstruction à quiconque voulait le défier et a interdit tout débat.

Des millions de personnes ont voté pour lui et des dizaines de millions de dollars ont été versés à sa campagne. Aujourd’hui, il se retire quelques semaines avant d’accepter l’investiture. Cette décision sans précédent justifierait à elle seule une enquête de la Chambre des représentants sur la capacité de M. Biden à continuer d’occuper un poste qu’il ne pense plus pouvoir briguer après janvier 2025.

Avant cette décision, un avocat spécial avait invoqué l’affaiblissement des facultés du président Biden pour ne pas l’inculper d’avoir illégalement conservé et manipulé des documents classifiés. Aujourd’hui, le président déclare en fait qu’en plus d’être prétendument trop diminué pour être poursuivi, il est trop diminué pour se présenter à la fonction qu’il occupe actuellement.

La question est de savoir si Biden a mis fin à la lutte pour conserver sa nomination uniquement pour déclencher une lutte pour conserver son poste.

Jonathan Turley est professeur de droit d’intérêt public à l’université George Washington. Il est l’auteur de « The Indispensable Right : Free Speech in an Age of Rage » (Simon & Schuster).

Jonathan Turley