Étiquettes
On ne peut pas aimer François Bayrou. Dans la série des sept nains, il pourrait jouer, au choix, Prof ou Grincheux. Mais il faut lui reconnaître une persévérance qui en fait l’égal des politiciens de la IIIè République. Après quarante ans de vie politique, cet homme à la fois besogneux et rusé, parfois populaire et le plus souvent insaisissable, atteint un poste convoité. Surtout, si l’on se souvient que c’est lui qui a fait décoller Macron en février 2017, la question se pose de savoir s’il est capable de faire atterrir le président, de le ramener à la réalité.
Je n’aime pas François Bayrou. Mais qui peut aimer cet homme donneur de leçons et colérique? Et pourtant, force est de constater qu’à force d’obstination, il devient Premier ministre.
Un dialogue avec François Bayrou en 2011
Je me souviens d’un dialogue avec Bayrou, en 2011, lors d’un dîner: un des derniers grands journalistes parisiens organisait des échanges avec des personnalités politiques jugées présidentiables. On était à un an de la fin du mandat de Nicolas Sarkozy. Le ton était libre et la discussion souvent spontanée et dense. Sauf avec Bayrou, le seul de nos hôtes qui avait réussi à se mettre la plus grande partie de l’auditoire à dos.
Je retranscris le dialogue que j’avais eu, quelques dizaines de seconde, avec lui:
– Monsieur le Ministre, vous avez fait un très bon score à l’élection présidentielle de 2007; mais, depuis lors, je ne comprends plus votre stratégie. Vous venez de l’UDF, votre intérêt n’était-il pas de sortir du « ni droite ni gauche » et de vous ancrer au centre-droit? Vous auriez perdu quelques électeurs dans un premier temps; mais, aujourd’hui vous verriez tous les déçus du sarkozysme venir à vous.
– Je ne comprends pas ce que vous dites. C’est trop intelligent pour moi.
– Monsieur le Ministre, permettez-moi de sourire. Vous savez mieux que moi que, pour être élu, il faut choisir soit la gauche soit la droite. Ensuite, on peut gouverner au centre.
– Mais je ne suis pas de droite!
– François Mitterrand n’était pas de gauche. Et pourtant il s’est fait élire à gauche. Ensuite il a gouverné au centre. Vous pourriez faire de même en vous faisant élire à droite.
– Je ne suis pas de droite. Je déteste l’argent….
Ce jour-là, François Bayrou nous indiquait qu’il renonçait à tout destin présidentiel. Effectivement, en 2012, François Bayrou fit la moitié de son score de 2007: 9% au lieu de 18%. Et en 2017, il renonça à être candidat pour soutenir Emmanuel Macron.
L’homme par qui le Macron arrive…..
Personne ne doute que le soutien de Bayrou fut décisif pour faire franchir à Emmanuel Macron la barre du premier tour en 2017. Je déteste François Bayrou précisément pour cela: il a fait venir Macron au pouvoir. Et le maire de Pau ne s’est jamais caché d’aimer son rôle de conseiller officieux d’Emmanuel Macron.
Ira-t-on jusqu’à dire que sans Bayrou, Macron ne pourrait plus tenir, aujourd’hui? Qu’il est le dernier recours? Bayrou a fait Macron? Pourrait-il le défaire? Soit en échouant et en laissant le Président sans Premier ministre avant l’échéance de son second mandat? Soit, tout simplement, en le faisant atterrir après l’avoir fait décoller?
En tout cas, il devient de plus en plus évident que la Vè République est devenue une IVè République dotée d’une présidence envahissante et autoritaire mais sans légitimité. François Bayrou, ce notable républicain par excellence, aura largement contribué à la dérive de nos institutions.
Groupe Gaulliste Sceaux 