Étiquettes

, ,

par Edouard Husson

« Nous reconstruirons tout »: le patriarche latin de Jérusalem a célébré Noël à Gaza dimanche 22 décembre

Le Cardinal Pizzaballa, patriarche latin de Jérusalem, a pu célébrer la messe à la paroisse catholique de la Sainte Famille à Gaza pour le quatrième dimanche de l’Avent, le 22 décembre: il y a célébré la messe de Noël par anticipation. « Nous reconstruirons tout! » a-t-il promis dans un message plein d’espérance, ajoutant à l’adresse des chrétiens de Gaza: « Vous êtes la lumière de l’Eglise! ». La veille, 21 décembre, le pape François avait fait part de son mécontentement devant les obstacles mis par l’armée israélienne, qui ne voulait pas laisser entrer le Cardinal. Depuis octobre 2023, le Pape et le Patriarche gardent un contact permanent avec le curé de l’église de la Sainte Famille, à Gaza. Nous mettons à disposition de nos lecteurs la vidéo de l’événement et le texte du sermon prononcé par le Patriarche.

Le Cardinal Pizzaballa a célébré la messe. Il a aussi permis à des enfants de faire leur confirmation (le sacrement de l’Eglise qui confère au croyant la plénitude de l’Esprit Saint) et leur première communion. Le Cardinal n’a pu se rendre que deux fois à Gaza depuis octobre 2023. Il fallait donc profiter de l’occasion pour que les enfants aient l’accès aux sacrements.

L’église de la Sainte Famille a été construite au lieu où, selon la tradition, l’Enfant Jésus s’est arrêté avec ses parents au retour de leur séjour en Egypte. La Sainte Famille avait dû fuir les persécutions du Netanyahou de l’époque, Hérode le Grand, qui voulait faire assassiner Jésus, de sang royal, puisque le Christ est de la lignée du roi David. Lorsque la Sainte Famille revint d’Egypte, où elle est restée, selon la Tradition de l’Eglise, environ quatre ans, elle attendit à Gaza, ne sachant pas où l’Enfant Jésus était en sûreté. L’Evangile (saint Matthieu, chapitre 2) nous dit que saint Joseph reçut en songe l’instruction de se rendre à Nazareth plutôt qu’à Bethléem où le Christ aurait été à la merci d’Archélaüs, fils d’Hérode.

On remarquera la présence de Sœurs de la Charité de Sainte Teresa de Calcutta (en habit blanc au liseré bleu) et de Sœurs du Verbe Incarné (en habit gris et bleu).

Frappant est le bruit de fond des drones de surveillance israéliens.

Regardez aussi, à la fin de la vidéo les émouvantes images, filmées depuis la Paroisse qui donnent à voir les dévastations de Gaza.

Grâce aux dons de fidèles du monde entier, le patriarcat latin de Jérusalem a fait parvenir jusqu’à maintenant dix millions d’euros d’aide alimentaire et sanitaire aux catholiques de Gaza. Cette aide a été précieuse non seulement pour les quelques centaines de chrétiens mais pour leurs frères et soeurs musulmans vivant encore dans le nord. Le Patriarche a promis une nouvelle aide.

Le texte du sermon du Cardinal Pizzaballa

Tout d’abord je veux vous dire combien je suis heureux de pouvoir une nouvelle fois être parmi vous tous. Je suis venu vous présenter mes vœux mais pas seulement les miens, ceux aussi de tous les fidèles de notre Église.

Tout le monde m’a demandé de vous témoigner de leur affection, solidarité, prière, et de l’amour qu’ils ont pour vous tous. Tous auraient voulu pouvoir venir et vous apporter tout ce que nous pourrions apporter. Vous êtes devenus en quelque sorte la lumière de notre Eglise.

A Noël, nous célébrons la lumière et nous nous demandons où est la lumière ?… La lumière est aussi ici.

Tout d’abord, la vraie lumière c’est Jésus le Christ. Il est la source de notre lumière, si nous en rayonnons c’est seulement grâce à lui

Actuellement, ce que nous demandons à Jésus pour Noël c’est d’apporter cette lumière dont nous avons besoin. Nous vivons des temps difficiles, je n’ai pas besoin de vous expliquer ce que cela signifie. Précisément à ce moment nous devons regarder vers Jésus. Il n’y a que de lui que nous pouvons prendre la force pour vivre la situation actuelle.

Cette année, nous avons expérimenté que nous ne pouvons pas toujours faire confiance aux êtres humains. Combien de promesses ont failli. Combien de violences à cause de la haine entre tous les êtres humains.

Si nous voulons pouvoir garder espoir, nous devons nous enraciner dans l’espoir. Si vous êtes enracinés dans le Christ, vous êtes capables de vous regarder vous-mêmes d’une autre façon.

Je ne sais pas quand et comment cette guerre va finir. À chaque fois que nous nous approchons de la conclusion [d’un accord], nous devons recommencer encore… Mais elle finira. Tôt ou tard. Nous ne devons pas perdre espoir

Quand la guerre sera finie, nous bâtirons et reconstruirons tout : nos écoles, nos hôpitaux, nos maisons.

Nous devons tenir bon et rester forts. Je vous le répète, je l’ai déjà dit et je vous le redis à vous, nous ne vous abandonnerons jamais, nous ferons tout notre possible pour vous venir en aide.

Mais il y a un autre chose qui est importante : ne pas laisser la haine polluer nos cœurs. Si vous voulez être lumière, et nous sommes lumières, nous devons garder nos cœurs libres pour Jésus.

Cette année, il m’arrive de penser que notre foi – et je pense spécialement à vous – est mise à l’épreuve. Nous nous demandons : mais jusqu’à quand Jésus ?

Maintenant nous sommes ici pour dire que nous voulons que cela finisse bientôt mais aussi pour affirmer que nous restons avec toi Jésus. Et Jésus aujourd’hui nous dit :  « Je suis Emmanuel, je suis Dieu avec vous. »

Alors nous devons rester forts dans notre foi, prier jusqu’à la fin de cette guerre et en même temps croire qu’avec lui rien ne peut nous submerger.

L’année dernière j’ai été témoin de beaucoup de violences mais aussi de beaucoup de miracles. Dans cette noirceur, dans cette destruction j’ai vu beaucoup d’entraide de la part des gens, de soutien, j’ai vu des gens recréer des relations, et ne pas se laisser submerger.

Ce que nous avons fait pour vous venir en aide, nous avons pu le faire parce que des gens à travers le monde nous aide. Tout le monde, et pas seulement le monde chrétien, est avec vous.

La guerre va finir et nous allons reconstruire

Encore une fois, nous vous aimons. N’ayez pas peur, n’ayez jamais peur, ne lâchez rien !

Ensemble, et nous devons restés unis, nous devons rester, ici à Gaza et dans notre Église et dans le monde entier, la lumière de Jésus.

Nous avons une mission. Vous n’avez pas seulement à recevoir vous avez aussi à donner.  Tout le monde qui vous regarde devrait voir qui vous êtes, à qui vous appartenez. On appartient soit à la lumière soit aux ténèbres, on appartient à Jésus – et Jésus donne toujours la vie – ou à l’autre… Ils devraient voir combien nous sommes différents

Je me souviens, un d’entre vous qui est ici m’a dit une fois : « Nous chrétiens, n’avons de haine et de violence dans notre ADN. »

Nous voulons rester chrétiens, nous voulons témoigner de la lumière ici même.

Et quand tout le monde et tous les gens nous regardent, ils peuvent voir ici un autre monde

Merci pour tout ce que vous faites. Peut-être que vous ne le voyez pas vous-mêmes parce que vous avez des soucis quotidiens, mais tout le monde voit ce que vous faites. Et je dois dire qu’ils sont fiers de vous, pas parce que vous faites je ne sais quoi mais parce que vous restez qui vous êtes : des chrétiens qui consacrent leur vie entière à Jésus et qui regardent vers lui.

Tous les êtres humains sont frère et nos vies sont données pour la vie des autres.

Merci.

Que ce Noël nous apporte à tous la lumière dont nous avons besoin et encore une fois n’ayez pas peur ! Personne ne peut nous enlever la lumière qu’est Jésus. Et continuez à donner le beau témoignage de la foi chrétienne.

Bonne fête.

Le Courrier des Stratèges