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Joseph Aoun, L'agression israélienne, lecture du discours, les réfugiés, Liban
Nasser Kandil
Le discours de prestation de serment du président Joseph Aoun pourrait être le premier discours présidentiel à se fonder sur une description de la mission du président de la République conforme à l’esprit de l’accord de Taëf. Les aspirations des présidents qui se sont succédé après Taëf, qu’il s’agisse de ceux dont la personnalité, les circonstances de leur accès à la présidence et le nombre de soutiens internes et externes dont ils bénéficient, les qualifient pour aspirer à imiter le rôle du président de la République avant Taëf, ou de ceux qui n’ont pas ce qu’il faut pour l’imiter, ont été très différentes de celles des autres présidents. La théorie d’un président fort est restée une obsession pour ceux qui ont succédé à la présidence, afin de faire face à un environnement populiste alimenté par le sectarisme qui suggère que ce président rendra à la présidence dans la pratique ce qu’elle a perdu dans les textes, en tant que symbole de la présence politique des chrétiens, puisqu’elle représente la plus haute position de l’État et est réservée à la communauté chrétienne. Le discours de prestation de serment est cette fois-ci spécifique et précis dans la description du rôle du président en tant qu’arbitre équitable entre les institutions, à savoir les autorités constitutionnelles législatives, exécutives et judiciaires, dont il s’engage à favoriser la coopération et l’indépendance, et à travailler avec le prochain gouvernement pour préparer un projet de loi visant à garantir l’indépendance du pouvoir judiciaire en tant que l’une des faces du triangle des autorités indépendantes, comme le stipule l’accord de Taëf, sans que ce texte ne devienne une réalité juridique.
Le discours de prestation de serment est modeste en termes d’engagements, car l’engagement personnel du président devient une affirmation du droit de l’État à un lieu, et affirmer un droit est différent de s’engager à le transformer en politique, et la politique mentionnée était accompagnée de l’expression « travailler avec le gouvernement » ou « inviter à une discussion ». Le discours est une affirmation du droit de l’État à monopoliser les armes. Dans le discours, il y a un engagement en faveur de l’indépendance du pouvoir judiciaire, mais par le biais d’une collaboration avec le gouvernement en vue de l’adoption d’un projet de loi à cet effet. Le discours fait état d’une croyance dans la restructuration de l’administration publique, mais en la liant au pacte avec le parlement et le gouvernement. Le discours contient une vision visant à réguler les relations avec la Syrie et à donner la priorité à la question du retour des personnes déplacées, mais en la liant immédiatement à l’équation consistant à rechercher avec le prochain gouvernement et le prochain parlement un mécanisme clair et immédiatement applicable pour le retour des personnes déplacées dans leur pays d’origine.
Le discours de prestation de serment contient des aspirations réalistes et réfléchies en matière de réforme qui tiennent compte de l’ouverture à de nouveaux plafonds, mais laisse les détails au dialogue national et au rôle du gouvernement et du parlement, et n’a donc pas négligé la nécessité de « développer les lois électorales de manière à améliorer les possibilités de circulation du pouvoir, de représentation correcte, de transparence et de responsabilité » et de « travailler à l’approbation du projet de loi sur la décentralisation administrative élargie ». Cependant, il n’a pas élaboré et adopté une vision spécifique sur les questions de la loi électorale et de la décentralisation, telles que la rotation dans les emplois de première catégorie, en tant que traduction de l’article 95 de la Constitution en termes de non-attribution d’un poste à une secte, ainsi que l’attention portée à la sécurité sociale, aux écoles publiques et à l’Université libanaise.
Dans les affaires nationales, divisées en dossiers sensibles qu’il a traités avec soin, l’occupation israélienne et l’agression israélienne, le dossier des camps palestiniens et le dossier du déplacement syrien, il a évité d’adopter un discours qui réponde aux attentes des groupes internes et externes opposés, comme sur la question de l’occupation et des armes de résistance, ce n’est pas le discours de la résistance, mais ce n’est pas non plus le discours des ennemis de la résistance et de ceux qui s’y intéressent. Sur la question des camps palestiniens, il adopte l’extension de l’autorité de l’État, mais il s’engage à protéger la dignité humaine des réfugiés palestiniens et le droit au retour, et sur la question des déplacements, il appelle à des plans urgents pour assurer leur retour, mais sans esprit raciste.
Sur la question la plus sensible de la libération et de la confrontation avec l’agression israélienne et les armes de la résistance, le discours a réussi à s’éloigner des moules tout faits, en adoptant une méthodologie prônée par le défunt président Salim al-Hoss, basée sur la définition de la question et la caractérisation du problème sur la base du fait qu’il ne faut pas abandonner la question sous prétexte de chercher à la résoudre, parce que toute poursuite d’une question aboutit à un ou plusieurs problèmes. Ce qui importe, c’est que nous nous attaquions aux problèmes sans nuire à la cause, et sans que notre croyance en la cause et notre adhésion à celle-ci ne nous conduisent à ignorer les problèmes qui en découlent. En l’occurrence, la cause est la protection du Liban, la libération de son territoire et la lutte contre les atteintes à sa souveraineté. La question est de compromettre le droit de l’État à monopoliser les armes, étant donné que la résistance est chargée de la libération et de la lutte contre les attaques, de sorte que le discours est basé sur l’équation selon laquelle l’État porte la responsabilité de la libération, de la lutte contre les guerres et de la lutte contre les attaques, et à cette fin, il appelle à investir dans l’armée et, parallèlement, à discuter d’une stratégie de sécurité nationale, y compris d’une politique de défense, et découvrons de manière réaliste comment tout cela fonctionne En réalité, nous découvrons comment nous parvenons à maîtriser la question, à compartimenter les solutions et à élaborer des plans échelonnés pour les atteindre, sans perdre la question. La question reste que nous libérons la terre et affrontons les agressions tout en affirmant le droit de l’État à monopoliser les armes, et entre-temps nous investissons dans l’armée et trouvons des solutions souveraines pour utiliser chaque arme, jusqu’à ce que nous atteignions un stade où il n’y a plus besoin d’une autre arme.