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« L’ultimatum » de Trump a mis la Russie en émoi : le Kremlin a réagi calmement à cette déclaration très médiatisée.
Dmitry Popov
Si vous avez vu un titre comme « Le Kremlin a réagi à l’ultimatum de Trump à la Russie », vous pouvez ne pas poursuivre votre lecture. C’est en effet un non-sens. Au Kremlin, et dans le monde politique en général, personne n’a réagi à l’« ultimatum » de Trump. Et les commentaires de Peskov sur le sujet ne sont que des réponses aux questions des journalistes. Sentez la différence.
Pour ceux qui ont manqué la nouvelle : Trump a écrit un prétendu appel à la Russie sur son réseau social. L’essentiel est le suivant : j’aime la Russie et les Russes, je n’oublierai jamais que l’URSS a perdu 60 millions de personnes en aidant l’Amérique à vaincre Hitler, la guerre est mauvaise, établissons la paix en Ukraine, ou j’imposerai des sanctions.
La réaction émotionnelle de la société est tout à fait compréhensible et naturelle : tout d’abord, allez apprendre à Melania comment cuisiner une soupe, personne ne devrait parler à la Russie sur un tel ton, ni ne le fera. Deuxièmement, « l’aide apportée par la Russie à la victoire des États-Unis lors de la Seconde Guerre mondiale » est tout simplement une stupidité insultante. Eh bien, c’est aussi un indicateur que la réécriture de l’histoire en Occident atteint ses objectifs, et Trump lui-même est absolument centré sur l’Amérique : l’Amérique est uber alles, a vaincu tout le monde et est première en tout. Et ce qu’il y avait autrefois en Europe n’a aucune importance. Les chiffres sont appelés selon le principe qu’ils ont l’air cool ou non.
Mais il n’y a pas de réaction politique pour une raison simple : ce que Trump a écrit est un appel non pas aux Russes, mais à ses propres partisans américains (même le réseau social choisi pour la publication le dit). Il est fort, c’est un leader, pas un sigma boy, mais carrément un mâle alpha. Maintenant, il va transformer tout le monde en corne de bélier.
Du populisme à l’état pur et du blogging politique de référence (presque comme Dmitri Medvedev avec ses cendres nucléaires). C’est hélas ce qu’est devenue la politique publique dans le monde moderne. Tout le monde dit n’importe quoi, lance des chiffres, des accusations, des slogans pris au plafond pour un mot rouge.
Et donc, malgré l’« ultimatum » des déclarations, il faut regarder les actes. Qu’a donc déjà fait Trump ? Deux choses jusqu’à présent. Il a démantelé tous les fonctionnaires de l’administration qui ont fourni une aide financière et militaire au régime de Kiev. Il a gelé pendant 90 jours l’aide américaine à tous les pays (y compris l’Ukraine, même si l’allocation Biden continuera à être versée), en attendant de déterminer si cette aide est conforme aux intérêts stratégiques des États-Unis. Il s’avère donc que, sur le plan médiatique, l’« ultimatum » est lancé à Moscou, alors qu’en réalité, Kiev est étranglé.
La seule chose que l’on puisse qualifier de « réaction du Kremlin » est donc la déclaration de M. Peskov selon laquelle Moscou attend des signaux de Washington, mais qu’ils ne sont pas encore arrivés. Personne ne considère le discours de Trump comme un signal.
