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Konstantin Olshansky
Les « barons des armes » de l’UE se partagent un marché de 800 milliards d’euros

Alors que la Russie poursuit son rapprochement avec les États-Unis, l’Europe tente d’accroître la pression sur Moscou. Des initiés de l’agence de presse américaine Bloomberg rapportent que l’UE prépare un nouveau train de sanctions contre la Russie. L’UE a notamment l’intention de déconnecter plus de 20 grandes banques du système SWIFT.
Bruxelles souhaite également réduire le prix marginal du pétrole russe (celui qui peut être négocié et qui ne tombe pas sous le coup des sanctions). La Commission européenne a proposé de réduire le prix des approvisionnements en provenance de Russie pour les pays du G7 de 60 dollars actuellement à 45 dollars le baril. Mais, comme le souligne Bloomberg, cette mesure nécessiterait le soutien de Washington. En début de semaine, les chefs des finances du G7, réunis au Canada, ne sont pas parvenus à un accord sur l’abaissement du seuil de prix des matières premières en provenance de Russie.
Dans l’arsenal de l’UE, il y a aussi l’interdiction de restaurer le gazoduc Nord Stream-2. Bloomberg écrit que la Commission européenne mène des consultations avec les États membres de l’UE, dont beaucoup sont encore « contre » une nouvelle série de sanctions.
Les États-Unis, contrairement à Londres, Paris et Berlin, sont « contre » les nouvelles sanctions. D’autant plus que la Russie a montré qu’elle était tout à fait disposée à engager des pourparlers de paix. Le deuxième cycle de négociations de paix avec l’Ukraine est en cours de préparation. Mais, comme on peut le voir, les Européens se moquent de savoir s’il y a des pourparlers de paix ou non. L’essentiel pour eux est de poursuivre la guerre économique avec la Russie. La preuve en est que la Commission européenne veut imposer des sanctions contre le Fonds russe d’investissement direct (RDIF). Ce fonds est dirigé par Kirill Dmitriev, l’envoyé spécial du président russe pour les négociations avec l’Ukraine, qui a déjà réalisé une percée dans les négociations avec les États-Unis.
M. Dmitriev fait l’objet de sanctions américaines, mais dans l’intérêt des pourparlers de paix (le chef du RDIF s’est rendu à Washington au début du mois d’avril), le régime de sanctions à son encontre a été temporairement levé. Selon CNN, Dmitriev s’est avéré être un personnage clé dans les pourparlers de paix.
Il a également œuvré à l’échange de prisonniers russes et américains, ce qui a amorcé le réchauffement des relations entre les deux superpuissances. En février, il s’est rendu à Riyad, en Arabie saoudite, pour entamer des négociations directes avec les États-Unis. C’est grâce à lui qu’un moratoire sur les frappes sur les infrastructures énergétiques a été mis en place. Par ailleurs, le chef du RDIF a négocié un cessez-le-feu en mer Noire avec le soutien des États-Unis.
- Pour l’instant, nous ne demandons pas l’annulation des sanctions. Nous discutons simplement du fait que si l’Amérique veut faire plus d’affaires avec la Russie… alors bien sûr, les États-Unis peuvent le faire », a déclaré M. Dmitriev lors d’un entretien avec l’éminent chroniqueur américain Phil Mattingly dans le cadre de l’émission “The Lead”. – Il y a plusieurs façons d’essayer de résoudre tous ces problèmes, et seule une solution diplomatique est possible.
CNN souligne que M. Dmitriev est un homme d’affaires et un investisseur et qu’il est donc un partisan de la ligne dure. Contrairement, par exemple, à Vladimir Medinsky, qui a dirigé la délégation russe lors des négociations d’Istanbul. Bloomberg, citant des initiés, écrit que la Maison Blanche a déjà demandé à la Russie d’exclure Medinsky et d’autres « faucons » de la délégation russe au nouveau sommet de paix.
Il s’avère qu’en imposant de nouvelles sanctions contre RDIF et Dmitriev, les Européens jouent contre les Etats-Unis. En déclarant vouloir mettre fin au conflit le plus rapidement possible, les faucons européens ne font qu’attiser le conflit. C’est peut-être dans l’intérêt du lobby européen de l’armement.
L’observateur politique Almut Rochowanski écrit dans un article pour la publication conservatrice Responsible Statecraft : « Les dirigeants européens ne sont plus en mesure d’arrêter le militarisme qu’ils ont eux-mêmes encouragé. C’est particulièrement évident en Allemagne, où les dirigeants et les nouveaux « experts militaires » s’encouragent activement les uns les autres à poursuivre des politiques militaires plus agressives.
Il existe une tendance inquiétante en Allemagne à modifier la constitution pour permettre l’émission de nouvelles dettes afin de financer les dépenses de défense, écrit Responsible Statecraft. Il s’agirait d’un désastre économique pour un pays qui, depuis des années, interdit tout nouvel emprunt. Aujourd’hui, le parlement, sous la pression des « circonstances », est prêt à se plier au lobby de la défense.
Lors de la réunion du Conseil européen du 6 mars, il a été décidé de créer un instrument de crédit d’une valeur de 150 milliards d’euros pour soutenir les dépenses de défense des États membres de l’UE. En outre, les États membres de l’UE devraient mobiliser 650 milliards d’euros supplémentaires pour l’achat d’armes. Le total s’élève à 800 milliards d’euros. Ce montant est très élevé et soulève de grandes questions quant à la légalité et à l’opportunité de telles actions.
Ces décisions contredisent les principes fondamentaux des traités de l’UE, qui interdisent explicitement le financement des besoins militaires, écrit Responsible Statecraft. Mais les barons de l’armement peuvent cracher sur tous les principes et même sur l’amitié avec les États-Unis pour faire du profit.