Étiquettes

Le Courrier des Stratèges n’aurait même pas prêté attention à la vidéo, devenue virale, de la « chamaillerie », comme l’a désignée un membre de l’entourage du Président selon le Monde. A vrai dire les relations entre un président et son épouse ne nous paraissent d’aucun intérêt en République; mais (1) le service de communication de l’Elysée s’est pris les pieds dans le tapis, donnant à la vidéo une audience démesurée; (2) Il n’est pas interdit de sourire. (3) C’est l’occasion de soulever cette anomalie : l’existence, qui n’a rien à voir avec la Constitution, d’un rôle de « Première Dame » qui doit moins à la monarchie française qu’à l’imitation servile des Etats-Unis qui caractérise notre classe dirigeante depuis le départ du Général de Gaulle.
Alors, gifle ou pas gifle? Nous nous apprêtions à nous rendormir, la tête posée sur le « mol oreiller du doute » (Montaigne) lorsque l’Elysée s’est pris les pieds dans le tapis: d’abord il s’est agi d’une vidéo générée par de l’intelligence artificielle; puis d’une désinformation russe. Mais Associated Press a confirmé l’authenticité de sa vidéo! Alors, à l’Elysée, on a vu surgir la thèse de la « chamaillerie » ou, plus désopilante, celle de « l’instant de détente » avant le démarrage de la visite officielle.
En tout cas, le président Macron longtemps obsédé par la Guerre d’Algérie peut désormais dire qu’il a aussi sa Guerre d’Indochine.
Faut-il rire? Faut-il pleurer?
La rumeur a voulu que les épouses de Valéry Giscard d’Estaing ou Jacques Chirac aient supporté avec dignité le fait que leurs époux respectifs aient cru que pour être à la place des rois de France, il fallût s’illustrer en « Vert Galant ». (jeu de mots de style « Canard » assumé). Certains auront préféré les révélations tardives de François Mitterrand sur sa fille longtemps cachée, Mazarine; avant de hocher la tête lorsque Nicolas Sarkozy et François Hollande nous imposèrent les ruptures de leurs couples successifs. Au fait, qu’est-ce qui a fait le plus de mal à François Hollande: la photo sur le scooter ou la vengeance de Madame Trierweiler prenant la plume pour raconter que son présidentiel ex-concubin parlait des gens du peuple comme des « sans-dents »?
Avec Emmanuel Macron et Brigitte, nous avons eu la continuation de la people-isation du couple présidentiel. Il y eut les reportages de campagne présidentielle sur l’histoire émouvante d’un amour indestructible; puis le couple mystérieux à la biographie pleine de blancs; et aujourd’hui, voilà la scène de ménage devant le monde entier. Avouons que jamais John et Jackie Kennedy ni Charles et Diana ne nous avait donné un match de catch en public!
Le dévoiement américanolâtre de la République
Peut-on imaginer que le vaudeville permanent auquel ont donné lieu les derniers mandats présidentiels s’éteigne avec le mandat de l’actuel président?
Nous vivons en république et nous n’élisons pas un couple mais un homme ou une femme, et seulement eux. Et surtout que l’on ne croie pas que nous assistons à la survivance de moeurs monarchiques. La succession des rois de France était exclusivement masculine. les reines n’assumaient de rôle que comme régentes. Jusqu’à nouvel ordre, les Français élisent à la présidence de la République des individus majeurs, qui n’ont pas besoin de l’assistance de leur mère….
Non, le modèle est américain: c’est celui de la « Première Dame ». On ne s’interrogera pas, ici, sur cette aberration dans la « première démocratie du monde ». Juste pour indiquer qu’elle est due, essentiellement, à la hantise puritaine: il faut s’assurer qu’on n’a pas élu un président sans morale; sa femme et ses éventuels enfants doivent être visibles.
Nos élites sont tellement américanisées qu’elles ont dû devoir copier : depuis Giscard, les présidents tiennent à mettre en valeur leur épouse (Seule Danièle Mitterrand a refusé ce rôle); elles ont droit à un bureau à l’Elysée, un budget etc….
J’ai demandé un récapitulatif au moteur d’intelligence artificielle Grok:
- Introduction d’un bureau dédié :
- Années 1960-1970 : Sous Charles de Gaulle (1959-1969), Yvonne de Gaulle avait un rôle discret et ne disposait pas d’un bureau formalisé à l’Élysée. Le rôle protocolaire des Premières dames s’est accru sous Georges Pompidou (1969-1974) avec Claude Pompidou, qui disposait d’un espace de travail informel pour ses activités caritatives, mais sans budget spécifique identifié.
- Années 1970-1980 : Avec Anne-Aymone Giscard d’Estaing (1974-1981), le rôle de la Première dame devient plus visible. Elle disposait d’un bureau à l’Élysée, mais les dépenses étaient intégrées au budget global de la présidence, sans ligne spécifique.
- Années 1990 : Bernadette Chirac, épouse de Jacques Chirac (1995-2007), marque un tournant. Elle disposait d’un bureau dédié (initialement donnant sur le Faubourg-Saint-Honoré, puis le Salon bleu sous Cécilia Sarkozy) et d’un cabinet important, avec jusqu’à 21 collaborateurs, un record à l’époque. Cela indique une structuration plus formelle du rôle, avec des moyens humains significatifs, bien que toujours financés par le budget général de l’Élysée.
- Années 2000-2010 : Cécilia Sarkozy (2007) et Carla Bruni-Sarkozy (2008-2012) ont également eu un bureau à l’Élysée (Salon bleu). Valérie Trierweiler (2012-2014), compagne de François Hollande, disposait d’un bureau et d’un cabinet de cinq collaborateurs, marquant une continuité dans l’attribution de ressources
- 2017 : Formalisation sous Emmanuel Macron : Avec Brigitte Macron, une charte de transparence publiée le 21 août 2017 clarifie le rôle et les moyens alloués à la Première dame. Elle dispose de six bureaux dans « l’aile Madame » de l’Hôtel d’Évreux, d’une équipe de quatre collaborateurs (directeur de cabinet, chef de cabinet, deux secrétaires), et de services comme une coiffeuse-maquilleuse, sans budget propre distinct. Les dépenses sont intégrées au budget de la présidence.
- Introduction d’un budget spécifique :
- Historiquement, il n’existe pas de budget propre exclusivement dédié aux conjointes des présidents, mais plutôt des moyens humains et matériels puisés dans le budget global de la présidence. La Cour des comptes a commencé à détailler les dépenses liées à la Première dame à partir des années 2010, notamment sous François Hollande et Emmanuel Macron, pour répondre à des exigences de transparence.
- 2017-2018 : Le rapport de la Cour des comptes de 2018 est le premier à chiffrer explicitement les dépenses liées à l’activité de la Première dame (Brigitte Macron), estimées à 279 144 € en 2018 pour les frais de personnel (quatre collaborateurs) et d’autres coûts associés, comme la gestion du courrier (19 500 lettres en 2018, nécessitant sept agents). Cependant, ce montant ne couvre pas l’ensemble des dépenses, car certaines (déplacements, sécurité) sont intégrées à d’autres budgets. Christophe Castaner, en 2017, estimait un coût total de 440 000 € pour les moyens mis à disposition de Brigitte Macron, incluant des frais non détaillés dans le rapport.
Montant des budgets dans la durée
- Avant 2000 :
- Les dépenses des Premières dames étaient peu documentées et intégrées au budget global de l’Élysée, sans distinction claire. Par exemple :
- En 1957, le budget total de l’Élysée était d’environ 1,3 million d’euros (valeur 2018), mais aucune part spécifique n’était attribuée à la Première dame.
- Sous Bernadette Chirac (1995-2007), les coûts augmentent avec un cabinet de 21 collaborateurs, mais aucun montant précis n’est isolé. Les dépenses incluaient personnel, rénovations (150 000 € pour les appartements privés en 1995), et activités caritatives.
- 2007-2012 (Sarkozy) :
- Le budget global de l’Élysée passe de 113 à 111 millions d’euros sous Nicolas Sarkozy, mais aucune ligne spécifique pour Cécilia Sarkozy ou Carla Bruni-Sarkozy n’est détaillée. Carla Bruni disposait d’une quinzaine de collaborateurs, partiellement financés par sa fondation.
- Une polémique autour d’une carte bancaire débitée sur le Trésor public pour Cécilia Sarkozy a été rapportée, sans montant précis.
- 2012-2017 (Hollande) :
- Valérie Trierweiler disposait de cinq collaborateurs (deux contractuels, trois fonctionnaires). Les coûts exacts ne sont pas publics, mais intégrés au budget de l’Élysée, qui était d’environ 100-103 millions d’euros par an.
- François Hollande a réduit le budget global de l’Élysée de 8 % sur cinq ans, ce qui a limité les moyens alloués à la Première dame.
- 2017-2025 (Macron) :
- 2017-2018 : Budget spécifique pour Brigitte Macron : 279 144 € en 2018, incluant quatre collaborateurs, six bureaux, et la gestion du courrier. Estimation plus large de 440 000 € par an (incluant sécurité, déplacements).
- 2023 : Budget total de l’Élysée de 124,2 millions d’euros, avec une hausse due aux déplacements et réceptions, mais sans détail précis sur la part de la Première dame.
- 2024 : Budget estimé à 126,3 millions d’euros, avec des coûts pour la Première dame toujours intégrés, sans budget distinct.
- 2025 : Budget prévu à 125,7 millions d’euros, sans augmentation après polémique, mais sans détail spécifique pour Brigitte Macron.
Visiblement, le Parlement n’a jamais pris au sérieux son rôle….