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par Ulrike Reisner

Journal de l’Empire des Habsbourg : Un scandale diplomatique d’un genre particulier s’est produit mardi dans l’est de la Libye, lorsqu’une délégation dirigée par le commissaire autrichien Magnus Brunner a été expulsée du pays. On pourrait s’en amuser, mais cette histoire montre que l’UE est dirigée par des personnes incompétentes qui ignorent les règles élémentaires de la diplomatie. Elles refusent de comprendre qu’un monde multipolaire ne s’aligne pas sur Bruxelles et la politique qui y est menée.Et elles refusent d’accepter que l’argent ne puisse pas tout régler.

Le Premier ministre du gouvernement parallèle libyen dans la région orientale, Osama Hammad, a demandé aux ministres de l’Intérieur italien, grec et maltais, ainsi qu’au commissaire européen chargé des migrations, Magnus Brunner, de quitter la Libye après leur arrivée mardi à l’aéroport Benina de Benghazi depuis la capitale Tripoli. Dans sa déclaration, M. Hammad a accusé la délégation européenne de « violations flagrantes des normes diplomatiques et des conventions internationales » et a déclaré que ses actions témoignaient d’un manque de respect pour la souveraineté nationale de la Libye et violaient les lois libyennes, en particulier les règles relatives à l’entrée, à la liberté de circulation et de séjour des diplomates étrangers, qui avaient été fixées dans une circulaire du gouvernement quelques jours auparavant. Magnus Brunner n’a pas commenté l’événement en détail, mais a simplement déclaré que les réunions prévues à Benghazi n’avaient pas pu avoir lieu.
Mission délicate
Hammad est à la tête du gouvernement de stabilité nationale à Benghazi, qui rivalise avec le gouvernement d’union nationale internationalement reconnu, qui contrôle Tripoli et l’ouest du pays. À Tripoli, M. Brunner s’est entretenu avec le Premier ministre Dbeibeh et plusieurs ministres libyens sur les questions de migration et de lutte contre le trafic de migrants. Depuis 2015, l’UE a accordé une aide financière d’environ 700 millions d’euros à la Libye afin d’inciter les autorités à prendre des mesures plus strictes contre les traversées illégales de migrants. La visite du commissaire autrichien chargé des questions migratoires fait suite à une initiative d’Ursula von der Leyen visant à réduire les départs de l’est de la Libye vers l’UE, en particulier vers la Grèce. Amnesty International avait auparavant qualifié la coopération entre l’UE et la Libye de « moralement bancale », car elle équivaudrait à une complicité dans les violations des droits humains.
En tant qu’Autrichienne, je porte un regard particulier sur le commissaire Magnus Brunner : ce politicien conservateur a été ministre des Finances dans le gouvernement dirigé par Karl Nehammer de 2021 à 2024 et, pendant cette période, a contribué de manière significative, par sa simple incompétence, à la détérioration des finances publiques du pays. C’est pourquoi, ironiquement également mardi, les ministres des Finances de l’UE ont officiellement décidé, lors de leur réunion à Bruxelles, d’ouvrir une procédure de déficit excessif à l’encontre de l’Autriche.
Magnus Brunner est vivement critiqué en Autriche, principalement parce qu’il a caché au public le déficit budgétaire pendant des mois. La raison en était les élections législatives de fin septembre 2024, lors desquelles le Parti populaire conservateur a obtenu un résultat catastrophique, avec une baisse de plus de 11 %. Magnus Brunner a alors été rapidement expédié à Bruxelles en tant que commissaire européen chargé des migrations afin de le mettre hors de portée des critiques politiques.
Ignorance politique
La première réaction à ce scandale diplomatique dans l’est de la Libye pourrait donc être la joie malveillante. Mais en y regardant de plus près, il apparaît clairement que nous sommes ici confrontés à un symptôme de l’appareil européen profondément corrompu et délabré : des politiciens sont envoyés à Bruxelles comme des gouverneurs, suivant la logique des partis et des lobbies des différents États membres, indépendamment de leurs qualifications pour cette tâche. Ces politiciens se comportent souvent comme des colons dans les pays non-membres de l’UE, car ils estiment qu’avec les promesses de financement de Bruxelles en poche, ils devraient être accueillis partout à bras ouverts. Nous pouvons actuellement observer un exemple négatif de cette évolution en Bosnie-Herzégovine. Mais ce que ces messieurs ignorent, c’est que nous vivons dans un monde multipolaire et qu’ils ne sont plus les bienvenus partout. Surtout lorsqu’ils ignorent la réalité politique locale et les règles du jeu qui y sont associées.
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