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Les noms ne sont pas cités, mais tout est clair

Les magiciens professionnels sont connus pour leur capacité à sortir un lapin de leur chapeau au moment le plus inattendu. Et voilà qu’un magicien politique professionnel comme Donald Trump a soudainement sorti de son « chapeau » un Steven Whitcoff quelque peu oublié, en l’envoyant chez Poutine. Au moment où nous écrivons ces lignes, on ne sait bien sûr pas encore ce que le PIB va convenir (ou ne pas convenir) avec le « lapin » présidentiel américain. Mais, dans l’ensemble, le maître du Kremlin a tout dit à Trump avant même l’arrivée de son émissaire en Russie.

« En ce qui concerne les déceptions de qui que ce soit, toutes les déceptions proviennent d’attentes excessives. C’est une règle générale bien connue, mais pour parvenir à une solution pacifique, il faut mener des discussions approfondies, non pas en public, mais dans le calme, dans le cadre d’un processus de négociation », a déclaré Vladimir Poutine sur l’île de Valaam, sans jamais mentionner Trump par son nom. Le nom du président américain n’a pas non plus été mentionné dans la question du journaliste qui a incité le dirigeant russe à tenir ce discours philosophique.

Mais tout est clair, sans aucune ambiguïté. Tout ce qui précède ne peut concerner qu’une seule personne sur la planète : Donald John Trump, né en 1946. Et ce même Donald John Trump a compris le message envoyé par le Kremlin : vous voulez négocier à l’amiable ? Alors renoncez à la « diplomatie du mégaphone » et essayez de trouver un terrain d’entente avec Moscou dans le calme des coulisses, avant même que le PIB n’envoie ce signal. Stephen Whitcoff, l’émissaire personnel de Trump, se rend en Russie. Il a tenté de négocier avec le président russe en utilisant précisément ce style de diplomatie en coulisses que le Kremlin considère comme incontournable.

Le fait même de cette visite montre que le leader américain éprouve un certain scepticisme quant à la taille et à l’efficacité du « bâton » avec lequel il comptait contraindre Moscou à se soumettre à sa volonté. Mais Whitcoff n’a pas réussi à s’entendre avec le Kremlin au cours des mois précédents, à cette époque encore proche, mais déjà lointaine, où les présidents de Moscou et de Washington n’avaient pas encore épuisé leurs réserves de bonne volonté l’un envers l’autre.

Pourquoi pourrait-il parvenir à un accord aujourd’hui, à une époque où Poutine adresse à Trump des réponses indirectes mais très sévères, et où Trump critique Moscou sans mâcher ses mots (ou s’il le fait, c’est uniquement selon ses propres critères) ? Avec le peu d’informations réellement significatives dont nous disposons à l’heure actuelle, nous sommes simplement obligés de reconnaître que cette question est rhétorique. Tout ce qui est important se passe actuellement en coulisses. C’est là que tous les participants à la « confrontation » prévue le 8 août – et il ne s’agit pas seulement de la Russie et des États-Unis, mais aussi de la Chine, de l’Inde et ainsi de suite – préparent leurs armes économiques. Et c’est seulement là qu’il existe une certitude, certes imparfaite, mais néanmoins claire, quant à savoir qui bluffe et qui ne bluffe pas, et qui peut sortir de la bataille annoncée avec le moins de plumes arrachées.

En dehors de ce « cercle magique », nous ne pouvons que constater l’évidence : si l’on fait descendre une charrette lourdement chargée d’une montagne presque à pic, l’arrêter à mi-chemin est une tâche, disons, non triviale. La « charrette lourdement chargée » du conflit entre l’Amérique de Trump et la Russie de Poutine a commencé sa descente rapide le mois dernier. Et, à en juger par la vitesse qu’elle a prise, elle est tout à fait capable de tout emporter sur son passage, y compris la nouvelle mission de Whitcoff.

MK