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Le président américain a tenu un discours attendu, réitérant des propos déjà tenus précédemment. Mais il n’a toutefois pas manqué de susciter l’inquiétude avec une anecdote sur ses plans pour l’armée, qui n’est pas passée inaperçue.

Marie Rigot

US President Donald Trump departs after addressing senior military officers gathered at Marine Corps Base Quantico in Quantico, Virginia, on September 30, 2025. Defense Secretary Pete Hegseth said Tuesday the US military must fix "decades of decay" as he addressed a rare gathering of hundreds of senior officers summoned from around the world to hear him speak near Washington. (Photo by Jim WATSON / POOL / AFP)
Le président américain, Donald Trump, a réitéré des propos qu’il tient depuis plusieurs semaines, mais a également surpris. ©AFP

Tout ça pour ça. C’est probablement ce que la plupart des observateurs se sont dit après les discours de Pete Hegseth et Donald Trump face aux centaines de hauts gradés de l’armée américaine qu’ils avaient convoqués en urgence. L’annonce de cette réunion plutôt inhabituelle avait fait grand bruit, la semaine dernière. Les médias du monde entier s’interrogeaient sur les raisons qui avaient poussé le secrétaire d’Etat à la Défense à faire venir dans un délai très court des responsables militaires se trouvant parfois à des milliers de kilomètres des Etats-Unis. Et la mention de la participation du président à cette assemblée à Quantico n’avait fait qu’amplifier l’inquiétude ambiante.

Qu’avait donc bien à annoncer l’administration Trump à ses plus hauts responsables militaires qui nécessitait de tous les réunir à la hâte ? A vrai dire, pas grand-chose.

L’anecdote révélatrice à la 44e minute du discours de Donald Trump

Comme la presse américaine le souligne ce mercredi, le président a surtout profité de cette tribune pour réitérer des propos qu’il tient depuis plusieurs semaines. On l’a ainsi entendu parler du prix Nobel de la Paix – qui devrait lui revenir, selon lui -, de l’autopen de Joe Biden (reprenant ses accusations habituelles à l’égard de la santé mentale de son successeur qui n’aurait pas été l’auteur de ses propres signatures), des droits de douane, des méchants médias…

Mais, pour le New York Times, si Trump a fait du Trump pendant les trois quarts de sa prise de parole, il y a tout de même eu un moment de bascule. Comme l’explique le quotidien, « il s’est passé quelque chose de nouveau, d’inhabituel à la 44ème minute ». Sur le ton de l’anecdote, après être revenu sur son délicieux dîner dans un restaurant de Washington – ville dans laquelle il a envoyé la Garde Nationale pour en reprendre le contrôle -, le locataire de la Maison-Blanche a rapporté une discussion qu’il a eue avec le secrétaire à la Défense. « J’ai dit à Pete que nous devrions utiliser certaines de ces villes dangereuses comme terrains d’entraînement pour notre armée », a déclaré le président.

Ces propos, révélateurs du ton donné par Donald Trump à son second mandat, n’ont pas manqué de susciter l’inquiétude et l’indignation. Les appels à répétition du républicain qui ont suivi à s’en prendre aux « ennemis de l’intérieur » – allant des immigrants illégaux aux « extrémistes de gauche » – semblaient inappropriés au vu du public qui lui faisait face. « Recourir à l’armée pour le maintien de l’ordre public est illégal », a rappelé David Ignatius, chroniqueur au Washington Post en matière de politique étrangère. « Et au-delà de cela, c’est tout simplement absurde à l’heure où la Russie et la Chine représentent une menace militaire croissante pour les États-Unis. »

Une « leçon » de Hegseth aux hauts responsables militaires qui passe mal

De son côté, Hegseth s’est lui employé à revenir « aux fondamentaux ». « Mon discours vise à régler des décennies de déclin », a-t-il martelé. « Des leaders politiques imprudents et irresponsables ont fixé un cap erroné et nous avons perdu notre chemin. Nous sommes devenus le ministère du wokisme mais plus maintenant. » Le secrétaire à la Défense a annoncé faire table rase « des déchets idéologiques » légués par l’administration précédente, citant en exemple la lutte contre le réchauffement climatique, le harcèlement, les dirigeants « toxiques » ou encore la promotion fondée sur la race ou le genre.

Interrogé par CNN, un ancien haut responsable du Pentagone qui s’est entretenu avec des militaires présents a fait part de leur perplexité face à ces propos. « Ce type – le plus jeune de la salle, le moins expérimenté, celui qui a le moins de temps de combat à son actif – vient faire la leçon à des gens qui étaient capitaines et commandants pendant les guerres en Irak et en Afghanistan. » Il s’est également inquiété des conséquences des nouvelles mesures annoncées par Hegseth: « Il y aura probablement un recul dans le traitement de situations comme le harcèlement sexuel et les comportements inappropriés au sein de l’armée. »

Silence dans la salle

Que ce soit pendant la prise de parole de Hegseth ou celle de Trump, la salle est restée particulièrement silencieuse. Ce qui n’a pas manqué d’agacer immédiatement le président américain. « Je n’étais jamais entré dans une salle aussi silencieuse », a-t-il lancé dès son arrivée sur scène. Et même si les officiers ne faisaient que respecter le devoir de réserve qui incombe à leur fonction, le locataire de la Maison-Blanche a tout de même essayé de leur faire délaisser ces traditions pour qu’ils puissent « s’amuser ». « Et si vous voulez applaudir, applaudissez. Et si vous voulez faire ce que vous voulez, vous pouvez faire ce que vous voulez », a-t-il tenté, sans grand succès.

La Libre