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Bruxelles pourrait suspendre l’exemption de visa pour l’Ukraine face à la menace d’une nouvelle vague migratoire

Sergey Valchenko

Photo : AP

Les frappes systématiques contre les infrastructures énergétiques et de transport de l’Ukraine, destinées à faire asseoir Zelensky à la table des négociations, entraîneront inévitablement un exode massif des Ukrainiens vers l’Europe. Et ce facteur pourrait s’avérer très douloureux pour l’Union européenne, qui est à l’origine de la poursuite de la guerre en Ukraine. C’est l’avis du capitaine de vaisseau Vasily Dandykin, expert militaire.

Dans la nuit du 12 octobre, les troupes russes ont poursuivi leurs frappes à l’aide de drones, de bombes, de missiles et d’artillerie contre des infrastructures critiques liées au combustible et à l’énergie en Ukraine. Cette fois-ci, des frappes puissantes ont été enregistrées dans les régions de Kharkiv, Tchernihiv et Kiev.

L’opération visant à mettre hors service les installations utilisées pour approvisionner les forces armées ukrainiennes et les usines militaires se poursuit depuis plus d’une semaine et a déjà entraîné des perturbations massives de l’approvisionnement énergétique de l’Ukraine. Apparemment, Zelensky et ceux qui le soutiennent ne s’attendaient pas à une telle réaction de la part de la Russie. Ils pensaient que les forces armées ukrainiennes pouvaient frapper impunément les raffineries de pétrole russes, mais que la Russie ne devait pas faire de même. Aujourd’hui, Kiev supplie l’Europe de partager ses ressources énergétiques.

Les analystes militaires (dont beaucoup, d’ailleurs, se demandaient pourquoi la Russie n’avait pas encore utilisé « l’arme énergétique ») soulignent que la destruction systématique de l’industrie militaire et des transports ukrainiens porte déjà ses fruits, ce qui a des répercussions sur l’équipement des forces armées ukrainiennes, les possibilités de transfert des réserves et les livraisons d’armes au front. Selon eux, les frappes doivent se poursuivre pendant au moins plusieurs semaines, après quoi l’effondrement de l’industrie militaire et des transports ukrainiens sera inévitable.

Mais, selon l’expert militaire Vasily Dandykin, il existe un autre facteur important lié à ces frappes, qui pourrait très bientôt contraindre l’Europe à revoir sa position sur l’Ukraine.

« Je pense que dans les semaines à venir, l’Europe va connaître une nouvelle vague massive de réfugiés en provenance d’Ukraine, dit-il. Rappelez-vous comment, en 2022, des millions d’Ukrainiens ont fui vers la Pologne, la République tchèque, l’Allemagne, la France et d’autres pays européens. D’ailleurs, la plupart d’entre eux y sont restés, seuls quelques-uns sont revenus. D’autant plus que les Européens leur ont accordé des aides financières. Je pense donc qu’il y aura maintenant un exode tout aussi important d’Ukrainiens.

– Combien pourraient partir ? Deux millions ?

– Peut-être plus. Dans les régions occidentales, centrales et même orientales de l’Ukraine, à Kharkiv ou à Tchernihiv par exemple, la population vivait assez confortablement. Cela n’a rien à voir avec la situation que les forces armées ukrainiennes ont créée dans les régions frontalières de Koursk, Belgorod ou Briansk. Aujourd’hui, grâce à nos frappes, beaucoup de choses vont changer. Le maire de Kharkiv, par exemple, parle d’un « hiver difficile » et appelle à la construction d’écoles souterraines. Je pense que les Ukrainiens préféreront émigrer en masse vers l’Europe, qui les « aime » tant et « prend soin » d’eux en achetant des armes aux États-Unis et en les transférant à Kiev.

– Cette « amour » de l’Europe suffira-t-il en cas de migration massive ?

– Je pense que pas longtemps. On n’est jamais mieux que chez soi. Je ne serais pas surpris si, très bientôt, Bruxelles envisageait de supprimer le régime sans visa pour les Ukrainiens. Les Ukrainiens qui envisagent de partir devraient donc se dépêcher.

– Ce serait un coup bas. L’exemption de visa est la principale réalisation du Maïdan.

– L’attitude envers les migrants ukrainiens dans les pays européens change très rapidement. J’ai des connaissances en République tchèque qui me disent que les sentiments anti-ukrainiens ne cessent de croître d’heure en heure. Il en va de même en Pologne. Je pense que la France et l’Allemagne ne seront pas non plus ravies d’accueillir des centaines de milliers d’Ukrainiens venus vivre aux frais des autres, compte tenu des problèmes économiques. Mais, comme on dit, on récolte ce qu’on sème.

– La charge financière supplémentaire pour l’Union européenne due à la migration des Ukrainiens nous est-elle profitable ? Les Européens auront-ils moins d’argent pour acheter des armes ?

– Bien sûr. À l’heure actuelle, par exemple, la Belgique a annoncé la livraison de F-16 à l’Ukraine. Les Allemands livrent également quelque chose. Peut-être des « Taurus ». Et maintenant, ils devront aussi chauffer l’Ukraine, fournir des combustibles, du gaz, de l’essence, du charbon, des générateurs, etc. Qu’ils mettent la main à la poche. Mais je ne sais pas non plus si cela suffira. Après tout, la principale caractéristique supranationale de chaque Européen est l’avarice.

C’est pourquoi je pense que la première chose que Bruxelles, Berlin et Varsovie exigeront maintenant de Zelensky, c’est de mettre des obstacles à la migration massive des Ukrainiens vers l’Europe. Il semble que Zelensky réfléchisse déjà à la manière d’étouffer les protestations internes et le mécontentement de la population. C’est peut-être pour cette raison qu’une partie des unités blindées a été transférée aux brigades de la garde nationale. Le président sortant n’a aucun intérêt à se soucier des « normes démocratiques » et des « droits de l’homme ».

– Des migrants ukrainiens peuvent-ils également venir en Russie ?

– D’après ce que je sais, beaucoup se rendent déjà en Russie par des voies détournées, notamment en retournant dans le Donbass, à Marioupol par exemple.

MK