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Amin Saikal, Professeur émérite d’études sur le Moyen-Orient, Université nationale australienne ; Université d’Australie occidentale ; Université Victoria

Alors que l’avenir de Gaza est incertain, l’Autorité palestinienne (AP) doit se renouveler si elle veut finalement gouverner la bande de Gaza et jouer un rôle clé dans la mise en œuvre de la solution à deux États.
L’AP ne s’est pas montrée efficace sous Mahmoud Abbas, le dirigeant très critiqué et impopulaire âgé de 89 ans. Le temps d’Abbas est révolu. Il est absolument nécessaire qu’une personnalité plus dynamique le remplace et réforme l’AP pour en faire un organe de gouvernement plus légitime et plus efficace, capable d’unir les différentes factions palestiniennes.
Dans ces circonstances, personne ne correspond mieux à ce profil que Marwan Barghouti, qui croupit dans les prisons israéliennes depuis 2002.
Comment Abbas est arrivé au pouvoir
Abbas a été élu pour un mandat de quatre ans en janvier 2005. Il a succédé au président Yasser Arafat, qui était assiégé par les forces israéliennes et est mort dans des circonstances mystérieuses à la fin de l’année 2004.
Arafat était détesté par les forces de droite de l’establishment israélien, qui s’opposaient aux accords de paix d’Oslo de 1993, signés par le leader palestinien et le Premier ministre israélien de l’époque, Yitzhak Rabin.
Rabin a été assassiné par un extrémiste juif pour ses efforts de paix en 1995. Le processus de paix s’est effondré peu après, en grande partie à cause de l’opposition de Benjamin Netanyahu (dont le premier mandat de Premier ministre s’est déroulé de 1996 à 1999) et d’Ariel Sharon (Premier ministre de 2001 à 2006).
Abbas était un proche collaborateur d’Arafat et l’un des membres fondateurs du Fatah, le noyau dur de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP). Favorisé par Israël et son principal allié, les États-Unis, Abbas a remporté l’élection présidentielle palestinienne en 2005 face à une autre figure palestinienne de premier plan, Mustafa Barghouti.
Cependant, Abbas n’était pas populaire auprès de la jeune génération palestinienne. Elle le considérait comme un « vieux cheval » qui avait passé des décennies en exil à l’étranger.
Le Hamas, fondé en 1988 en tant que mouvement islamiste radical, a boycotté les élections, s’engageant à lutter jusqu’à la création d’un État palestinien indépendant.
Il y avait un candidat qui aurait pu battre Abbas, mais il ne s’est pas présenté. Il s’agissait du cousin de Mustafa, Marwan Barghouti, qui était – et est toujours – emprisonné en Israël et très populaire parmi les Palestiniens de tous bords politiques.
Qui est Marwan Barghouti ?
Marwan Barghouti était membre du Conseil législatif palestinien en Cisjordanie à la fin des années 1990 et avait noué de nombreuses relations étroites avec des politiciens israéliens et des membres du mouvement pour la paix.
Pendant la deuxième Intifada, de 2000 à 2005, il est devenu l’un des leaders des manifestations de rue contre l’occupation israélienne. En 2002, il a été emprisonné pour avoir prétendument orchestré des attaques contre des Israéliens et a été condamné pour le meurtre de cinq personnes. Il a été condamné à cinq peines de prison à perpétuité consécutives.
Au départ, Marwan s’était présenté à l’élection présidentielle palestinienne de 2005 depuis sa prison, mais après des discussions avec le Fatah, il s’était retiré.
En tant qu’analyste de longue date du Moyen-Orient, je pensais à l’époque que Marwan était la personne idéale pour diriger l’Autorité palestinienne. Je croyais qu’il pourrait travailler avec Israël et l’administration Bush pour mettre en œuvre les accords d’Oslo et réaliser les aspirations du peuple palestinien à disposer de son propre État.
Dans un éditorial publié dans l’International Herald Tribune en 2004, j’écrivais :
Il est considéré comme un héros par de nombreux jeunes Palestiniens, sa popularité n’étant surpassée que par celle d’Arafat. Il connaît bien les Israéliens, parle couramment l’hébreu et entretient de nombreux contacts transfrontaliers avec des partisans israéliens de la paix.
Il a pleinement soutenu le processus de paix d’Oslo et n’a appuyé l’Intifada que lorsqu’il a été convaincu que [l’ancien Premier ministre israélien Ariel] Sharon était déterminé à mettre fin à ce processus afin de poursuivre sa stratégie de longue date consistant à donner le moins possible aux Palestiniens.
Près de 20 ans plus tard, il reste d’actualité. Dans un récent sondage réalisé auprès des Palestiniens de Cisjordanie et de Gaza, Barghouti remporterait une élection présidentielle contre deux autres candidats de premier plan, le chef du Hamas Khaled Mashal et Abbas.
Parmi ceux qui ont déclaré vouloir voter, Barghouti a obtenu 50 % des suffrages, suivi de Mashal avec 35 % et Abbas avec seulement 11 %.
Campagne pour sa libération
Le Hamas a inclus Marwan, aujourd’hui âgé de 66 ans, dans sa liste de Palestiniens à libérer des prisons israéliennes en échange des otages israéliens encore détenus par le groupe. Israël a toutefois refusé de le libérer.
On sait peu de choses sur ses conditions de vie, car il a été transféré dans différentes prisons tous les six mois. Une vidéo a récemment fait surface, le montrant très affaibli et raillé par le ministre israélien de la Sécurité nationale, Itamar Ben-Gvir.
Le fils de Marwan, Arab Barghouti, a lancé un appel au président américain Donald Trump pour obtenir sa libération, affirmant que « mon père est un homme politique, il ne représente pas une menace pour la sécurité ». Sa mère (et épouse de Marwan), Fadwa Barghouti, s’est récemment jointe à cet appel.
Trump serait en train d’examiner la question.
Si les dirigeants israéliens et américains veulent vraiment que le cessez-le-feu à Gaza soit maintenu et conduise à la mise en œuvre des deuxième et troisième phases du plan de paix en 20 points de Trump, Marwan doit être libéré.
Considéré par le peuple palestinien comme une figure à l’image de Nelson Mandela, il est le plus à même de réformer l’Autorité palestinienne et de lui permettre de gouverner pour tous les Palestiniens.
Et parmi tous les futurs dirigeants palestiniens potentiels, il se distingue comme celui qui peut mettre en œuvre le plan de paix et évoluer vers une solution à deux États soutenue par la communauté internationale.