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barreau d'Istanbul, Génocide, Israël/Palestine, Turquie, Yasin Şamlı
Juan Cole
– Le Daily Sabah, proche du gouvernement du président turc Tayyip Erdogan, rapporte que le parquet général d’Istanbul a émis des mandats d’arrêt contre 37 responsables israéliens pour génocide.
Cette décision intervient alors que la Turquie et Israël se disputent au sujet de la proposition turque d’envoyer des soldats de la paix turcs à Gaza. Le gouvernement israélien rejette la présence d’une force turque à Gaza, considérant le gouvernement Erdogan comme hostile à Israël. Erdogan peut toutefois parfois avoir l’oreille de Trump sur cette question.
Le bureau a souligné le fait que des milliers de personnes ont été tuées ou blessées et que la population a été privée de logements et d’infrastructures. Le bureau du procureur a également cité la destruction par Israël d’hôpitaux dans la bande de Gaza.
Le document d’accusation conclut que l’État d’Israël a systématiquement commis un génocide et des crimes contre l’humanité à Gaza.
Le porte-parole du gouvernement israélien a rejeté l’accusation, la qualifiant de « coup de pub ».
Le principe de la compétence universelle en matière de crimes de guerre a toutefois été largement revendiqué par les juges. En 1998, le magistrat espagnol Baltasar Garzón a inculpé l’ancien dictateur chilien, le général Augusto Pinochet, pour les violations des droits de l’homme qu’il a commises au Chili. Il a été arrêté à Londres six jours plus tard. Les autorités londoniennes l’ont arrêté six jours plus tard lorsqu’il s’est rendu dans ce pays. Il a été autorisé à retourner au Chili pour des raisons de santé, mais y a été jugé et est décédé avant que le verdict ne soit prononcé. Il n’y a aucune raison pour que les magistrats turcs ne puissent pas exercer la compétence universelle, tout comme l’ont fait Garzón et ses collègues britanniques.
Reuters rapporte dans le même temps que les responsables de l’administration Biden ont pris conscience en 2024 des craintes des avocats du gouvernement israélien quant aux crimes de guerre commis par les forces israéliennes à Gaza. Malgré leurs dénégations désinvoltes, même les personnalités les plus lucides de la bureaucratie gouvernementale israélienne pouvaient clairement voir les crimes commis par l’armée israélienne.
La plainte en Turquie a été déposée par le barreau d’Istanbul. Elle visait le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, le ministre de la Sécurité nationale Itamar Ben-Gvir et le ministre de la Défense Yisrael Katz, ainsi que des personnalités militaires telles que le chef d’état-major Eyal Zamir et le commandant de la marine David Saar Salama. Salama a été inculpé parce que la plainte inclut l’interception illégale par Israël, dans les eaux internationales, de la flottille humanitaire Sumud composée de 50 navires, le 2 octobre, en violation de la Convention des Nations unies sur le droit de la mer et de la législation turque. Salama a été accusé d’avoir kidnappé les volontaires de la flottille et de les avoir torturés.
Le président du barreau d’Istanbul, Yasin Şamlı, qui a déposé la plainte, a souligné les centaines de balles tirées sur Hind Rajab, une fillette de 5 ans à Gaza, qui avait appelé à l’aide. Les forces israéliennes ont tiré sur l’ambulance venue à son secours, puis ont criblé de balles la voiture dans laquelle elle se trouvait. Le Daily Sabah a cité Şamlı : « Cet acte montre au monde entier qu’Israël commet un génocide ouvert. Israël tue des enfants par peur. Il n’y a aucune personne innocente qu’Israël s’abstiendrait d’attaquer. Israël est une menace pour toute l’humanité. »
Le président du barreau a également souligné ce qu’il a appelé une infrastructure terroriste israélienne, impliquant des frappes aériennes répétées sur le Liban, la Syrie, le Yémen, l’Iran, la Tunisie, le Qatar, l’Irak, Malte et l’Égypte.
Les articles 76 et 77 du code pénal turc définissent le génocide comme un crime :
Génocide
Article 76
(1) La commission de l’un des actes suivants à l’encontre d’un membre d’un groupe national, ethnique, racial ou religieux dans l’intention de détruire ce groupe, en tout ou en partie, par l’exécution d’un plan, constitue un génocide :
a) Meurtre intentionnel ;
b) Atteinte grave à l’intégrité physique ou mentale d’une personne ;
c) Soumission délibérée du groupe à des conditions d’existence devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle ;
d) Mesures visant à empêcher les naissances au sein du groupe ;
e) Transfert forcé d’enfants du groupe vers un autre groupe.
(2) Toute personne qui commet un génocide est passible d’une peine d’emprisonnement à perpétuité aggravée. Toutefois, lorsque les infractions d’homicide volontaire et de lésions volontaires sont commises dans le cadre d’un génocide, il y a cumul effectif de ces infractions, en fonction du nombre de victimes identifiées.